Le vrai miracle du front uni des syndicats consiste dans le fait qu’ils ont réussi à mobiliser des citoyennes et des citoyens dans une période d’après Covid où il semble que la participation aux actions collectives soit mal en point. Certes, plus que jamais la technique de la minorité agissante contre tout et n’importe quoi progresse mais le collectif a du mal à exister. C’est probablement le phénomène le plus réconfortant car il s’accompagne d’un retour vers les institutions qui constituent un contre-pouvoir organisé durablement. Pour le pouvoir en place, la situation risque d’être préoccupante car depuis pas mal de temps le rapport de force était inversé.
Ainsi la CFTC annonce + 175 % des demandes d’adhésion. Des adhésions syndicales à la hausse, principalement boostées par la mobilisation sociale actuelle. A la CGT on multiplie les adhésions par 2,5 par rapport à une année normale. Ce sont plutôt des jeunes: on est à 40% de moins de 40 ans et un tiers de moins de 30 ans. Enfin, la CFDT, premier syndicat de France, affirmait début février avoir déjà enregistré près de 10.000 adhésions depuis janvier. Soit 40% de plus qu’en temps normal. Il en est ainsi dans des proportions diverses pour tous le syndicats. La crise provoquée par une réforme imposée a relancé le sentiment que seul on n’a plus le pouvoir de combattre n’importe quel projet.
Il n’est pas certain que ce retour vers la solidarité touche de la même manière les partis politiques. Ils sont en effet apparus comme à la « remorque » du mouvement syndical et n’ont pas su gérer les temps que leur procurait le fonctionnement de la vie démocratique. Le retour au Palais Bourbon a démontré que l’on repartait vers des passes d’armes déconnectées des soucis réels de la très grande majorité des citoyens. Adhérer à un parti ne constitue plus le moyen de lutte le plus efficace et inconsciemment les jeunes le ressentent. Ils se mobilisent sur des combats qu’ils estiment conformes à des valeurs fortes. Devenus des écuries électorales les formations politiques n’attirent plus grand monde.
Les années d’absence d’éducation « civique » et la pauvreté des pratiques démocratiques dans le milieu scolaire a causé une « décitoyennisation » dont on pensait qu’elle serait irrémédiable. Le sursaut du à l’hostilité au projet de réforme et plus encore à l’attitude du locataire de l’Élysée représente une chance qu’il serait lamentable de gâcher. Il faut en profiter pour expliquer, former, rassembler car les difficultés se situent dans un proche avenir. Le libéralisme a propagé l’idée que la réussite pouvait être qu’individuelle. Avec les attaques contre le système des retraites le gouvernement a réveillé le sens du collectif dépassant même les « classes » sociales et générationnelles. On doit lui en être gré.
En fait les têtes pensantes de la majorité minoritaire pensent encore que le pourrissement de la situation finira par décourager la contestation. En ouvrant des chantiers tout aussi critiquables ils espèrent aussi allumer des contre-feux salvateurs. Surtout si ces derniers s’appuient sur des sondages ou des enquêtes d’opinion démontrant que c’est une réponse à leurs préoccupations : les aides sociales en serait une, l’immigration en serait une autre. Ce sont deux exemples où il leur faudra trouver un consensus avec la droite-extrême faute d’espérer négocier ouvertement avec l’extrême droite.
Il n’y aura plus de manifestations de masse pour défendre la démolition du RSA ou pour durcir les conditions d’accueil des migrants. Il faudra voir alors qu’elle est la solidité du front syndical uni car il n’y en aura pas sur le plan politique. En Italie la « Musomélonie » a lancé le processus sans soulever les masses populaires. Le gouvernement italien a choisi le 1er mai pour supprimer le « revenu de citoyenneté », une aide qui bénéficiait à des millions de personnes, pour le remplacer par un « chèque d’inclusion », qui va toucher moins de monde. Le symbole de l’annonce de cette mesure le 1er Mai a de quoi inquiéter.
La pauvreté n’ayant jamais été aussi forte dans notre pays avec près de 11 millions de personnes en deçà du minimum vital et dont plus de la moitié de ces pauvres sont des femmes. Souvent l’insertion professionnelle est impossible en raison des difficultés liées au logement (la situation devient catastrophique), à la santé (l’accessibilité aux soins est impossible), à la mobilité (sensible sur les zones rurales). En-a-t-on suffisamment conscience pour défendre celles et ceux qui sont dans cette situation? La lassitude de la contestation inutile, le sentiment que l’enjeu se situera lors des présidentielles, le manque de perception globale des enjeux l’emporteront-ils sur la solidarité renaissante ?
Contraint par une situation financière globale à diminuer ses dépenses plutôt que de prôner une juste répartition de l’effort collectif aux recettes le gouvernement va causer « gestion » et « danger » en oubliant que c’est sa politique qui a mené au bord du gouffre. Que diront les syndicats ? Quelle réaction de l’opinion publique quand elle ne sera pas majoritairement concernée par les mesures ? Est-elle prête à défendre des valeurs qu’elle a oubliées depuis des décennies comme la fraternité ou l’égalité ? La détestation du politique masquera-t-elle les espoirs de renouveau démocratique ? La résignation reste probable…
En savoir plus sur Roue Libre - Le blog de Jean-Marie Darmian
Subscribe to get the latest posts sent to your email.
Bonjour,
en consultant cette carte disponible ici https://www.visualcapitalist.com/minimum-wage-around-the-world/
Il s’agit de la carte mondiale des salaires mensuels minima là où ils existent. On comprend tout de suite en regardant l’UE que la relocalisation en France c’est du pipeau. France 1 380$, Bulgarie 315$ , Hongrie 383$, Grèce 626$, Portugal 690$, Pologne 584$. Les délocalisations vers l’Est de L’UE et le travail détaché vont continuer encore et encore. Bientôt l’Ukraine dans l’UE avec un salaire minimum à 146$ mensuels ( le plus bas salaire mondial c’est au Pakistan 111$), soyez les bienvenus dans le libéralisme Européen et sa concurrence libre et non faussée .
Les combats valeureux des organisations syndicales n’y changeront rien, la mise en concurrence des salariés dans l’espace UE conduit immanquablement à la paupérisation des salariés de tous les pays.
Pour avoir beaucoup défilé ces derniers mois, je constate le nombre important de têtes blanches dans les cortèges. Il faudra encore un peu de patience aux gouvernements qui succéderont à celui-ci, pour voir les derniers déambulateurs quitter le pavé des villes.
La prochaine offensive annoncée c’est le travail forcé des « assistés » du RSA et l’accès Kafkaïen aux prestations chômage et solidarité. Les prestations sociales de santé et de retraites sont dans le wagon suivant. L’Europe libérale a encore très faim et le gâteau retraite santé si gros et appétissant gorgé des milliards récoltés sur les salaires…
Allez! encore un petit effort il nous faut rejoindre en première étape les salaires de la Grèce et de la Pologne pour réduire les coûts de production et rejoindre enfin le plein emploi.
M’ enfin! cessez de râler c’est pour votre bien et celui de vos enfants et puis vous l’avez voulue l’Europe qui sauve.
Bonne journée
Bonjour,
NON JE NE L’AI PAS VOULU CETTE EUROPE ET BEAUCOUP D’AUTRES NON PLUS.