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L’histoire des passeports se passera mal

La notion de service public est indissociable de la responsabilité de l’État. Du temps où existaient dans les transports, dans l’éducation, dans l’énergie, la santé dans tous les actes régaliens d’une République a depuis que la plateforme du Conseil National de la Résistance  a été mise en œuvre par la République. Tous constituaient la seule richesse des plus pauvres puisqu’ils leur permettaient d’accéder à des réseaux pouvant être ouverts seulement à ceux qui avaient les moyens financiers. Lentement sous l’influence du libéralisme exacerbé, ces services publics sont devenus des services privés au public de plus en plus éloignés et inégaux.

Bien évidemment la très grande majorité des Françaises et des Français en a conscience. Il n’y a pas un seul jour où la carence des réponses apportées ne soit perceptible. L’éloignement géographique et temporel n’ont dans aucun secteur été gommés par la fameuse dématérialisation. Elle a même complexifié les modalités d’accessibilité. Il faut y ajouter la distance des lieux où l’on peut les solliciter car les territoires n’ont pas nécessairement les outils identiques en matière de services publics.

Il faut sans cesse répéter que sans la volonté, l’opiniâtreté des élus locaux bon nombre d’entre eux n’offriraient plus le minimum républicain. Sans le réseau associatif les « trous dans la raquette » seraient béants. Sans les efforts financiers des collectivités territoriales les annonces de l’État n’auraient absolument aucune réalité. Mieux ministres et « sur-ministres » se promènent dans tous le pays pour tenter de positiver et de répondre aux sondages d’opinion recensant les reproches effectués à un administration qui dans les faits n’existe plus. L’État surveille, interdit, réprime, condamne mais n’a plus aucun moyen réel d’agir !

Les déclarations de la cheffe du gouvernement témoignent de la vague de mousse communicative actuelle. L’obtention d’un passeport ou d’une carte nationale d’identité, documents relevant du rôle fondamental de l’État a été sous-traité pour la confection du dossier aux communes. Cette décision a permis, comme celle pour tous les autres pièces officielles (cartes grises, permis de conduire, carte de séjour) aux Ministres de l’Intérieur successifs de se vanter d’avoir pu diminuer le nombre de fonctionnaires dans les préfectures. Et c’était leur seul objectif. Bercy est derrière!  En fait, pour la énième fois il s’agit d’un transfert de charges vers les communes !

J’ai été parmi les premiers maires en Gironde a accepté un poste dédié aux demandes de passeports en 2009 (la CNI est arrivée plus tard). Le versement de l’État était forfaitaire (5000 €) avec le nécessité d’aménager un local fortement sécurisé pour les appareils et qu’il soit dans un espace accessible aux handicapés. Le reste à charge pour la commune était de 13 000 €… Ce sont donc les contribuables créonnais qui financent seuls les demandes venant de tout le Département. En effet le lieu est ouvert à toute personne quel que soit sont lieu de résidence. Un élu me disait que dans les centres de sa communauté de communes rurales seulement 20 % des demandeurs y habitaient ! 

La Première des Ministres peut d’autant plus promettre de diminuer par deux les temps d’attente qu’elle ne portera pas la responsabilité d’un éventuel échec. Ces délais, aujourd’hui en moyenne de 66 jours, seront ramenés « à 30 jours cet été » puis « à 20 jours à l’automne », a précisé la cheffe du gouvernement. Il s’agit, a-t-elle complété, d’arriver à « 1,8 million de rendez-vous par mois », soit un doublement par rapport à il y a un an.

Pour y parvenir, la Première ministre veut d’abord faciliter la prise de rendez-vous, en raccordant toutes les communes de France au site national, afin que « tous les Français puissent avoir une vision d’ensemble des rendez-vous qui sont disponibles ». Et illico elle trouve la solution : des incitations financières seront mises en place pour permettre aux communes de proposer aux Français des rendez-vous en soirée, mais aussi le samedi.

Raccourcir ces délais passe donc par le déploiement de 650 bornes servant à recueillir les empreintes nécessaires à l’obtention des titres d’identité. Elles seront en priorité déployées sur les trente départements « où l’on constate des délais et des difficultés pour obtenir » passeports et cartes d’identité, a-t-elle détaillé. Au total, ces mesures représenteront 100 millions d’euros de soutien « pérenne » de l’État aux collectivités, a ajouté Élisabeth Borne, qui souhaite « rassurer » les maires et les pousser à « recruter des agents » pour assurer ces nouveaux rendez-vous.

La Première des Ministres méconnaît totalement la situation des communes étranglées en 2023 et encore plus en 2024 par la réforme fiscale, l’augmentation du coût de l’énergie, des alaires et des denrées essentielles. Elles ne pourront pas embaucher… ou alors elles vont à la ruine.

En mai 2022 le ministre de l’intérieur avait déjà annoncé un plan d’urgence de 500 nouveaux points de confection des passeports et des CNI. Un échec dont l’évaluation n’a pas été faite. Alors les 650 supplémentaires en 3 mois il n’y a personne de sérieux pour y croire…

Cet article a 6 commentaires

  1. Laure Garralaga Lataste

    Quel était le chant des Républicains espagnols ?
    ¡ No pasarán !
    Auquel j’ajoute…
    ¡ Sin embargo pasaron !
    traduction : et pourtant, ils sont passés et ont sévi jusqu’en 1975 !

  2. Laure Garralaga Lataste

    Quel lien y a-t-il entre ce Roue Libre du jour et cet hymne républicain espagnol ?
    La Fontaine… » La raison du plus fort est toujours la meilleure »… !

  3. christian grené

    Buenos dias Laurita. Jadis et naguère, Verlaine écrivait:
    « Murs blancs, toit bleu, c’est l’auberge fraîche au bord
    Du grand chemin poudreux où le ciel brûle et saigne
    L’auberge gaie avec le Bonheur pour enseigne
    Vin rouge, pain tendre, et pas besoin de passeport »
    Mon copain Popaul ne m’en voudra pas d’avoir interchangé couleurs du toit et du vin, c’est mon passeport pour la liberté qui m’y autorise.

  4. LAVIGNE Maria

    Que dire ? Ils sont hors sol, ne vivent pas dans le même monde que nous. Les promesses n’engagent que ceux qui y croient. Après les incendies qui ont détruit notre belle forêt Girondine et Landaise, Jupiter a bien promis la plantation de 1 milliard d’arbres. Où sont ils ces arbres ? Il n’a sans doute pas la réponse, il faudra semer…
    Bonne journée avec cette pluie bienfaitrice

  5. facon jf

    bonjour,
    la question sous-tendue est, pour moi, quel projet pour les ruraux ?
    14 216, c’est le nombre de décès par an en plus dans les zones rurales, révèle une étude menée par l’Association des maires ruraux de France (AMRF) et dévoilée ce jeudi 20 avril par nos confrères de France Bleu. Selon cette étude, à âge et sexe égal, l’indice de mortalité des bassins de vie ruraux est supérieur de six points à celui des bassins de vie urbains (104 en milieu rural contre 98 en ville).
    Ces résultats confirment donc, selon l’association, que « la localisation en ville ou à la campagne devient un facteur déterminant des inégalités d’espérance de vie ». Face à ce constat, elle rappelle « l’importance de la proximité dans l’organisation du service de santé », et appelle à une « refondation de la démocratie sanitaire ».
    Bref ! l’AMRF pointe les déserts médicaux, perso je les trouve « petits bras » sur ce coup.
    Les difficultés des ruraux ne se limitent pas au problème sanitaire, malheureusement tout ce qui était simple avec 20 ans de moins à la campagne devient atrocement compliqué pour les plus âgés.
    La raréfaction des moyens collectifs de transport isole les plus vieux ruraux.
    La centralisation de toutes les administrations et les recours généralisés d’internet traumatisent une génération éloignée du tout numérique.
    La disparition des commerces de proximité isole ces populations qui se privent -par force- de produits importants pour eux.
    L’inflation sur les produits énergétiques paupérise les plus anciens, notamment les veuves ne disposant que de pensions de réversion misérables. Comment se chauffer, s’éclairer, cuisiner les repas en réduisant drastiquement le poste énergie ?
    Plus de quatre ans après la crise des « gilets jaunes », alors qu’une vague Rassemblement national a déferlé en juin dans les campagnes, le bilan de la lutte contre les déserts médicaux, du développement d’alternatives à la voiture ou de la couverture numérique – l’une des meilleures d’Europe sur le papier – reste « plutôt décevant », note le Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques (CEC). Décevant qu’ils disent ces grands sages ! Inexistant serait plus approprié.
    Selon la nouvelle définitionde l’INSEE , les espaces ruraux représentent 88 % des communes françaises, 91,5 % du territoire et 33 % de la population avec 21,9 millions d’habitants, ce qui place l’Hexagone au second rang des pays les plus ruraux d’Europe derrière la Pologne.

    Bof!! 33% de la population rurale qui se jette dans les bras du RN c’est pas grave, tant que la majorité des bobos urbains votent pour la macronie tout va bien.
    RAF des vieux ruraux qui manquent de soins et qui grelottent dans leurs grandes passoires thermiques, leur avenir c’est de disparaître .
    Ça fera des opportunités pour aménager des RBnB pour oxygéner les bobos dans des zones désertifiées.

    En attendant les maires ruraux tentent de faire toujours plus avec toujours moins.
    Le retour de la taxe carbone voulue par les grands mamamouchis de l’UE ne va rien arranger . Dès 2027, les foyers devront s’acquitter d’un prix du carbone sur le carburant et le chauffage. Ce prix serait cependant plafonné à 45 euros/tonne au moins jusqu’en 2030. Et son entrée en vigueur potentiellement repoussée à 2028 si la flambée des prix de l’énergie est amenée à se poursuivre.
    Vous voyez l’UE est bonne fille, elle prévient à l’avance pour que vous puissiez vous installer en ville. Trop sympa!!

    Bon dimanche

  6. La retraite ne pouvant être à 60 ans, j’ai du me faire une carte d’identité dans les plus brefs délais pour avoir accès à une formation et un nouveau job dans notre belle startup nation*.
    Habitant à 15mn de Créon, je comptais me rendre là-bas, voire en Gironde… Entre deux et 3 mois d’attente pour avoir un RDV en mairie.
    Alors je suis allé dans le 85, et deux allers-retours plus tard, soit plus de 4h de route et une prune pour excès de vitesse de 6km/h*, j’ai eu ma CNI.

    Comme quoi il suffit de traverser la route pour avancer…
    *avez-vous remarqué quant on traverse un certain nombre de départements, on ne s’est jamais si la vitesse sur les départementales des-dits départements est limitée 80 ou de 90km/h !
    *un bien beau pays qui possède trop de communes et mais pas assez d’autoroutes privées et de lignes TGV privatisées ! 😉

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