You are currently viewing La justice secouée par l’affaire du bracelet

La justice secouée par l’affaire du bracelet

Les rapports entre les citoyens et ce qui devrait être « leur » justice puisqu’elle est rendue en leur nom sont éternellement marqués par la situation de celle ou celui qui en parle. En effet un condamné la considère toujours comme trop sévère et le plaignant comme trop laxiste. Sauf que si un jour les rôles sont inversés ils passent d’une position et d’un avis à l’autre. Combien de fois peut-on entendre dans le quotidien les gens se plaindre d’une pseudo-mansuétude des tribunaux à l’égard de personnes ayant commis des fautes. Les mêmes râlent ou vitupèrent quand ils sont pris en défaut estimant que les policiers ou les gendarmes feraient mieux de s’intéresser.. aux autres. Tous les jours de dizaines de milliers de délits sont constatés et sanctionnés mais le mythe consiste à croire que seule la sévérité sauvera la société des déviances coupables. Combien pourraient se taire… et pratiquer un examen de conscience salutaire ?

Dès qu’une personnalité est concernée, c’est le déchaînement au moment des verdicts. Récemment, avant même que le jugement soit prononcé une pétition était lancée pou condamner… les juges. Aujourd’hui après la condamnation d’un ex-Président ce fut un concours de lamentations, de plaidoirie sur les plateaux de télévision, des éditoriaux suspicieux. Bien évidemment après trois jugements consécutifs basés sur les textes et lois en cours la sanction a été décrite comme inique et dangereuse pour l’équilibre des pouvoirs dans notre République. On retrouve sans cesse les mêmes arguments. L’insupportable c’est que si l’on décode ces diatribes, les coupables sont les femmes et les hommes chargés d’appliquer un code voté au nom du peuple à leur initiative.

Bien entendu lorsque l’on débat au sommet de l’État des peines « plancher », du renforcement des sanctions, des incarcérations ce ne peut concerner que « la racaille » qu’il faut judiciairement Karchériser ! Ainsi le « héros » de la journée avait en 2011 chargé le député UMP… Éric Ciotti de lui remettre un rapport sur l’application des peines. Il voulait ainsi donner des gages à l’opinion dominante un an avant les élections présidentielles. Son «bilan»: le mauvais taux d’application et d’exécution des peines. Était un handicap. C’est pourtant un diagnostic dont il s’était fait l’infatigable porte-parole depuis longtemps. Déjà en 2005 et 2006, ministre de l’Intérieur, il s’était fait une spécialité de la dénonciation du «laxisme» et de «l’irresponsabilité» de la chaîne judiciaire.  L’indignation est donc très adaptable aux circonstances.

Il serait l’innocente victime d’un complot des juges. Comment imaginer un instant alors que les dizaines de décisions antérieures rendues par des dizaines de magistrats sur les affaires qui l’assaillent de toutes parts aient été concertées ? D’ailleurs le chantre de la répression tous azimuts se plaint de problèmes de forme mais ne revient absolument pas sur le fond des affaires. Quand on explique les circonstances des écoutes des coups de téléphone de Bismuth ce n’est pas du tout ce que la « machine » montée par sa défense tente d’imposer via les médias comme une vérité. Il arrive trop souvent que le système effectue le procès avant que ce dernier ait lieu mais il devient très fréquent qu’il soit refait après le verdict.

En fait la vraie perdante de cette affaire n’est autre que la Marine nationaliste. Elle regarde vers le 31 mars avec une pointe d’angoisse car le verdict qui l’attend sera difficile à contester puisque les faits sont beaucoup plus établis que ceux qui touchaient l’ex-Président. Elle n’espère plus qu’une exonération inéligibilité immédiate. L’hypothèse d’une élection présidentielle anticipée ne paraît pas très solide compte tenu de la personnalité de celui qui se considère comme intouchable encore pour deux ans. Le pauvre François III héritier d’Henri IV est en sursis dans un tel contexte. A cet égard le choix par Bayrou (qui rappelons le est toujours sous la menace d’un jugement en appel) de l’heureux élu pour le poste de Garde des Sceaux et de la Justice sera révélateur. Il sera scruté par de nombreuses personnes.

On a failli oublier durant quelques heures le drame de Mayotte où un ouragan n’a pas fait la différence entre ceux qui avaient des papiers en règle et ceux qui n’en avaient point. La libération de Watson défenseur courageux des cétacés fut éclipsée par un bracelet électronique. Pas certain que l’on assiste pas au même déchaînement dans les autres procès qui arrivent pour la même personne. Les communiqués de soutien sont prêts. Les éditoriaux sont déjà travaillés. Les appels au peuple envisagés. Et événement extraordinaire, voici que la France si sourcilleuse de son indépendances par les temps qui courent se tourne vers l’Europe pour dire quel est le droit !  « Une chose n’est pas juste parce qu’elle est loi […] mais elle doit être loi parce qu’elle est juste. » a pourtant écrit Montesquieu.

Ce champ est nécessaire.

En savoir plus sur Roue Libre - Le blog de Jean-Marie Darmian

Subscribe to get the latest posts sent to your email.

Cet article a 4 commentaires

  1. J.J.

    Que l’on tourne l’affaire dans n’importe quel sens, que l’on développe une floppée d’arguties, les faits délictueux sont avérés, quelle que soit la procédure qui a permis de les dévoiler. La loi doit être appliquée « sans discussion ni murmures ». Dura lex, sed lex.
    Que le coupable s’estime heureux, en 1793, il eut été déclaré coupable …et coupé.

  2. Pc

    L’avocat de Sarko s’est couvert de ridicule hier soir sur la 5, coincé entre son envie de hurler l’innocence de son client (on sentait qu’il se retenait) et son devoir d’avocat tenu d’accepter (pour l’instant) le verdict.
    Finalement il a dit: « mon client est innocent mais il accepte le verdict  »
    Heureusement que le ridicule ne tue pas.

  3. faconjf

    Bonjour,
    on peut parodier le regretté Jean Ferrat
    Faut-il pleurer, faut-il en rire ?
    Fait-elle envie ou bien pitié ?
    Je n’ai pas le coeur à le dire,
    On ne voit pas la justice passer.
    Du coté rire on peut maintenant se moquer de l’ex-méprisant à talonnettes et bracelet aux pieds qui fustigeait en octobre 2007 : c’est un Nicolas Sarkozy Président, assis sur le canapé rouge de Michel Drucker, qui compare les magistrats de la Cour de cassation à des « petits pois » sans « saveur ».
    Plus tard, en 2014, son avocat Thierry Herzog parlera, au téléphone, avec Nicolas Sarkozy (alias Paul Bismuth), de ces « bâtards » de juges.
    Les petits pois sont rouges (hihi! ) devant la condamnation définitive de leur ennemi juré ( bof!). L’homme qui a réussi sa vie avec à 69 ans un bracelet électronique Rollex, continue sa croisade anti-petits pois, vert de colère cette fois( re bof!).
    Incroyable retournement de l’Histoire… Contre les « petits pois » de Paris, Nicolas Sarkozy appelle au secours d’autres « petits pois », plus gros, européens : les magistrats de la CEDH qui siègent à Strasbourg.Ce recours s’explique par la jurisprudence : la CEDH a déjà condamné la France, en 1990 (arrêt Kruslin et Huvig contre France), pour des écoutes téléphoniques abusives, contraires au respect de la vie privée (inscrit à l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme)…
    C’est cocasse car, lors de la primaire de la droite, en 2016, François Fillon demande que la France sorte de la CEDH. Nicolas Sarkozy exige sa réforme. L’an dernier, Laurent Wauquiez s’en prend au « coup d’Etat des juges ». Et Gérald Darmanin, ministre, se dit prêt à payer toutes les amendes pourvu que la France expulse qui elle veut…Nouvel épisode de l’arroseur arrosé.
    La blague n’est pas finie les « petits pois » de la Cour de cassation ont encore du pain sur la planche ! Le 6 janvier va s’ouvrir, et pour 3 mois, le procès du financement de sa campagne de 2007. Y a-t-il eu un pacte secret avec Kadhafi, en échange de sa réhabilitation diplomatique ? Il risque 10 ans de prison, 375.000 euros d’amende et 5 ans d’inéligibilité.
    Et dans l’épisode suivant , l’affaire Bygmalion, du nom de la société qui gérait ses meetings de 2012, et dont les factures ont explosé (43 millions d’euros de dépenses, soit près du double du plafond autorisé). En appel, Talonnettes et bracelet a déjà écopé d’un an de prison, dont 6 mois avec sursis. On va encore se gondoler en taule!
    Du coté pleurer on peut se lamenter du deux poids mesures de la justice il faudrait bien un livre de 600 pages* pour expliquer la question du dévoiement de la magistrature qui a fait de la justice, en violation de la séparation des pouvoirs, une force politique autonome sans légitimité de l’élection démocratique. Depuis la présidentielle de 2017, la mansuétude judiciaire dont bénéficient Mac-ronds et ses amis,( la fortune du banquier d’affaires disparue où l’affaire Benalla et son coffre-fort mystère, l’affaire du béarniais et de toutes les autres… ). Mansuétude à comparer avec la brutalité de la répression des mouvements sociaux ou des GJ , la porosité aux mouvements sociétaux minoritaires, la différence de vitesse de traitement de telle ou telle affaire, qui en sont autant d’expressions. La protection judiciaire dont bénéficie Macron et la condamnation de Sarkozy sont les deux fa(r)ces de la même pièce.
    Celle d’une magistrature devenue force politique au détriment de sa mission.
    Si un juge intègre veut enquêter sur la corruption dans notre pays ( 20ème rang mondial ) il peut commencer par ici https://aurores.org/wp-content/uploads/2024/12/membres-diner-siecle-02-2020.pdf
    Bon courage à lui, on voit par exemple sur cette liste de 2020 Stéphane Noël, le Président du Tribunal Judiciaire de Paris nommé par Mac-ronds,aux côtés du directeur de cabinet de Bruno de Le Maire et de Gabriel Attal, les patrons de banques et de fonds d’investissements.
    Ces dîners étaient alors organisés par Olivier Duhamel, qui reconnaîtrait peu après avoir violé son beau-fils pendant des années, en toute impunité et alors que ses proches s’échinaient à dénoncer ces faits depuis des années, les enquêtes le concernant étant systématiquement enterrées.
    On peut rêver … à l’indépendance de la justice, papa Noël va venir.
    Bonne journée
    * Une Justice politique: Des années Chirac au système Macron, histoire d’un dévoiement Broché – Grand livre, 13 janvier 2021 de Régis de Castelnau (Auteur)

  4. Alain.e

    Et ce monsieur a la légion d’ honneur , avec son bracelet et sa rolex ce sera du meilleur gout , et ça bave sur les profs , il ne mérite que mon mépris , et il l’ a sans problème .
    Premier président condamné aussi lourdement sous la V république , chapeau l’ artiste .

Laisser un commentaire