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Les feux en cours et les contre-feux nouveaux

Le monde craque de partout et les fissures que l’on pouvait penser suturées se rouvrent dans un jeu ressemblant à celui beaucoup plus théorique de la bataille navale. La guerre entre l’Ukraine et la Russie s’intensifie avec la mise en œuvre de moyens humains et matériels sans cesse croissants. L’arrivée de Trump au pouvoir modifie chaque jour un peu plus les certitudes en matière d’alliances. Depuis son élection, le conflit aux confins est de l’UE prend une nouvelle tournure avec des offensives massives des troupes de Poutine soutenues par un déploiement technologique plus puissant. Cette montée en puissance nécessitent des efforts financiers considérables. Moscou ne pourrait pas maintenir un tel niveau durant plusieurs années supplémentaires.

L’autre conflit entre Israël et le Hezbollah met en jeu l’Iran dont le régime soutient financièrement et stratégiquement le mouvement chiite. Or le régime théocratique de Téhéran traverse une période difficile avec la population n’acceptant plus les contraintes imposées par le pouvoir et le blocus imposé par les puissances occidentales. La perspective d’un cessez-le-feu permet au régime des mollahs d’espérer ne pas avoir à mettre encore plus à contribution leur pays. Téhéran s’inquiète des éventuelles prises de position de Trump capable de soutenir une attaque israélienne sur les installations clés du programme nucléaire en cours. Les ayatollahs cherchent à gagner du temps.

Bizarrement un nouvel incendie vient de se réveiller en Syrie. Les islamistes dont on entendait plus parler ont effectué une offensive éclair et sérieusement affaibli le régime de celui que les Russes et les Iraniens soutiennent depuis longtemps. Dans le nord de la Syrie, la coalition de groupes rebelles poursuit sa percée face aux troupes du régime de Bachar el-Assad. Cette opération vient rappeler que s’il avait baissé d’intensité, le conflit syrien n’a jamais cessé. Depuis le début de la contestation contre le président syrien en 2011, différents groupes armés ont pris le contrôle de pans entiers du territoire. Des groupes rebelles qui avancent très vite ont conquis Alep. La deuxième ville de Syrie, échappe désormais au contrôle du régime de Bachar el-Assad. Le groupe islamiste Hayat Tahrir al-Cham (HTC) et les factions rebelles alliées « contrôlent la ville d’Alep, à l’exception des quartiers aux mains des forces kurdes. Pour la première fois depuis le début du conflit en 2011, Alep est hors de contrôle du régime »

Aussitôt à Damas les appels à la solidarité des pays amis disposant de forces susceptibles d’aider à comater les percées des troupes islamistes ont été lancés… Voici donc Russes et Iraniens contraints de mobiliser les uns leur aviation et les autres des troupes au sol et de plonger de toute urgence dans une guerre s’annonçant difficile et dangereuse. La renaissance de Daech n’a peut-être pas surpris tout le monde. Les bombardements russes sur Iblid agacent la Turquie ce qui n’est pas sans conséquences dans les alliances officielles ou occultes. Laisser tomber Bachar el-Assad ou faire semblant de le soutenir aurait un impact certain sur l’aura moscovite dans les pays où pourraient monter des actes de rébellion. Pour l’Iran ce serait un renoncement à jouer un rôle dans les événements du Proche-Orient.

Par ailleurs des mouvements se produisent dans le Sahel. Les principaux groupes séparatistes qui affrontent les forces gouvernementales dans le nord du Mali ont annoncé samedi se transformer en «Front de libération de l’Azawad (FLA)», dans un communiqué. La création «d’une entité politico-militaire portant les aspirations du peuple de l’Azawad à l’autodétermination » a été annoncée par les responsables du Cadre stratégique permanent pour la défense du peuple de l’Azawad (CSP-DPA), alliance de groupes armés séparatistes à dominante touareg créée en mai 2024, à l’issue d’une rencontre qui s’est tenue entre mardi et samedi. Face à eux ils ont d’anciens membres de l’armée privée russe Wagner et leurs actions peuvent déstabiliser la zone sahélienne où la France s’est retirée ou va le faire.

Ces événements « spontanés » tentent de modifier avant la fin de l’année les équilibres géopolitiques qui s’installaient. Il ne manquerait plus que la Corée du Nord et la Chine bougent vis à vis de Séoul ou de Taïwan pour que la tension gravisse un échelon supplémentaire. Le système bien connu du feu et du contre-feu a toujours existé mais à l’arrivée, les incendies finissent pas devenir incontrôlables avec toutes les conséquences que l’on connaît.

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Cet article a 3 commentaires

  1. J.J.

    « la coalition de groupes rebelles »…. qui ne se produit pas par hasard, et qui est probablement soutenue et financée par quelque puissance occulte. Et une fois le but atteint, comme en Afghanistan, on laissera la population à la merci des sauvages dont on a provoqué l’arrivée au pouvoir.
    Toujours chercher à qui le crime profite… en principe. À moins qu’à force de cracher en l’air, ça leur retombe sur le nez.

  2. faconjf

    Bonjour,
    la géopolitique n’est pas une science exacte surtout qu’une autre partie se joue sous les cartes à notre vue. Pour faire simple (comme le dit @JJ ) à qui profite le crime de l’incendie d’Alep ? La réponse est sans appel à l’occident et sa « base avancée » Israël. Comment en effet faire d’une pierre plusieurs coups pour tenter l’effondrement des dominos. L’Orient le jour titre « Le domino régional ne s’arrêtera pas en Syrie » , déstabiliser l’Iran par la Syrie est un objectif d’ Israël. En 2016, le Hezbollah a joué un rôle-clé dans l’offensive du régime de Bachar el-Assad pour reprendre Alep aux groupes de l’opposition. Or les évènements post 7 octobre clouent littéralement le Hezbollah au Liban empêchant de ce fait ses milices armées par l’Iran de venir en aide à l’armée Syrienne fatiguée, divisée, mal équipée et usée par la guerre sans fin. En fait, Israël espérait vaincre le Hezbollah et ainsi éliminer l’influence de l’Iran. Mais ayant perdu, Israël a opté pour le plan B, qui consiste à éliminer la capacité de l’Iran à ravitailler le Hezbollah via la Syrie. Pour y parvenir, Assad doit tomber. Erdogan, qui ne manque pas une occasion, semble avoir joué le jeu pour ses propres intérêts. L’empreinte d’Israël sur l’attaque était évidente lorsque l’armée syrienne a été frappée par une attaque majeure « à l’aide d’un bipeur et d’une radio explosés », blessant de nombreux militaires de l’armée syrienne – une répétition parfaite de la même attaque contre le Hamas plus tôt. Les intérêts d’Israël se rejoignent avec ceux de nombreux autres, notamment ceux des pays arabes du Golfe, de la Turquie, des États-Unis et de leur mandataire dans la guerre contre le terrorisme, etc.
    Les alliés opérationnels de Bachar el-Assad se limitent à la Russie et à l’Iran voila qui pourrait embarrasser le tsar et les mollahs de Téhéran. Ces derniers se voyant bien obligés de mobiliser des troupes au sol,(le Hezbollah étant hors jeu) dans un contexte politique intérieure plus que mouvant.
    Le tsar est lui aussi visé par ce front secondaire qui présente l’avantage pour l’occident de soustraire des moyens au front Ukrainien en phase d’effondrement, la guerre électrique menée par Vladimirovich Putin participe grandement à la désorganisation en arrière du front.
    Se poser la question de qui paye l’armement et les équipements des troupes rebelles ne donne que quelques éléments de réponse. Les financiers de cette opération restent dans l’ombre, la présence de la Turquie et sa diplomatie « Byzantine » sur le territoire Syrien complexifie le problème. « Ce serait une erreur, à ce stade, d’essayer d’expliquer les événements en Syrie par une quelconque ingérence étrangère », a affirmé le ministre turc des Affaires étrangères, Hakan Fidan, dont le pays contrôle plusieurs zones du nord syrien et soutient plusieurs groupes rebelles en Syrie.
    Les États-Unis, qui disposent eux aussi de soldats au sol dans le nord de la Syrie, soutiennent les Forces démocratiques syriennes (FDS) dominées par les Kurdes PKK/YPG , qui ont combattu le groupe jihadiste Etat islamique (EI) en Syrie. Il faut rappeler au passage que la Turquie est l’alliée des USA au sein de l’OTAN…
    Pas facile d’y voir clair sur la Syrie, pays stratégique que les occidentaux rêvent de morceler, d’effriter pour redessiner la carte de la région conformément aux intérêts financiers. Intérêts financiers qui sont, à leurs yeux, bien supérieurs aux vies des malheureux Syriens.
    Bonne journée

    1. J.J.

      « les Forces démocratiques syriennes (FDS) » !!! Ça me rappelle une célèbre réplique cinématographique d’Audiard.

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