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La privatisation devient la norme sociale

Le désengagement de la puissance publique en faveur de la défense des valeurs républicaines s’accentue dangereusement. Qui oserait soutenir que la liberté, l’égalité et la fraternité ont progressé depuis le début de ce XXI° siècle dans le pays qui a inventé ce triptyque qui fut révolutionnaire. L’ultra-libéralisme qui a pris le pouvoir au nom de la nécessité de construire un monde meilleur reposant sur la seule référence au profit. Au nom de cette idéologie portée par une élite traversant les strates dirigeantes dans tous les secteurs, les responsables ont totalement désintégré les débats idéologiques. Les mots n’ont plus aucun sens et certains ont même totalement disparu du vocabulaire car ils risquaient de contaminer quelques esprits éveillés.

Épisodiquement sortent des enquêtes journalistiques fouillées sur les ravages de la privatisation des épisodes essentiels de la vie humaine. En ouvrant tout ce qui est essentiel dans le quotidien de la vie collective au système de la concurrence libre et non faussée souhaité par l’Europe, à l’exploitation financière les politiques sont responsables de fractures profondes dans la société. Les services publics qui étaient la seule « fortune » des précarisés et des oubliés du monde du fric ont été dénigrés, démembrés et sciemment détruits. Ils survivent au milieu d’un tempête causées par les crises successives s’abattant sur la France.

Le vieillissement annoncé de la population a vite été exploité par les fameux groupes financiers ayant trouvé une activité juteuse à développer. Profit maximum avec services minimum ou tarifs prohibitifs laissant sur le bord de la route de la dépendance les plus démunis : la privatisation incontrôlée a montré son vrai visage. Les établissements publics souffrent financièrement car sous budgets contraints quand les autres utilisent à plein régime les possibilités offertes par le système du secteur libéral.

En Gironde il est par exemple impossible d’ouvrir des lits nouveaux pour ne pas obérer les finances de l’État et des secteurs ruraux attendent des décennies une opportunité de créer un EHPAD. La spéculation bat son plein sur les chambres de résidences services que l’on achète comme autant de produits financiers.

Dans quelques jours paraîtra un nouvel ouvrage (1) dénonçant les crèches privées dans lesquelles les manquements aux règles élémentaires de protection des enfants confiés par des parents toujours à la recherche d’une solution de garde, seraient multiples. Encore une fois la rentabilité éclipse toutes les considérations empreintes d’humanité. Bien évidemment comme dans tous les autres secteurs d’activité à caractère réputé « social » les fonds publics sont alloués à ces structures à but lucratif puisque leur existence évite la création par les organismes publics de lieux d’accueil similaires. Insuffisance de contrôles effectifs, aucune participation effective des familles strictement consommatrices, tarifs invérifiables et personnel sous pression permanente.

La santé (voir chronique de hier) ; la sécurité (les manifestations, les événements divers doivent être couverts par des entreprises privées) : la distribution de l’énergie (les dégâts sont déjà réels mais vont aller en s’aggravant) ; l’éducation (elle est devenu une affaire économique dans bien des niveaux) ; le sport (les excès deviennent outranciers) ; la culture (la télé s’enfonce dans ma médiocrité sur les chaînes privées réputées gratuites) : tout concourt à l’inégalité, l’asservissement au fric, la précarité et l’exclusion. Tout se monnaye. Tout se paye. Tout se marchande. Il n’y a que les références à l’argent qui servent d’étalonnage aux valeurs républicaines.

Les récents appels aux secours des associations humanitaires qui tentent de masquer la réalité d’une pauvreté grandissante reflètent la mutation des esprits. Nul n’a évoqué les causes profondes de cet afflux de personnes en déshérence sociale car ce serait remettre en cause les prétendues solutions miracles du pouvoir en place. La réponse a été immédiate : « cessez de vous plaindre et d’agiter les symboles de notre échec et acceptez quelques chèques déductibles des impôts que nous aurions payés ; Circulez il n’y a rien à voir vous avez ce que vous demandez ».

On ajoute que le manque de bénévoles, l’absence de solidarité humaine pourtant aussi essentielle que les fonds appelés n’a pas ému outre mesure les responsables politiques. Aucune mesure pour la valorisation du bénévolat associatif n’est évoquée ou mise à l’étude. L’État aime bien que l’on fasse à sa place et le moins cher possible ! Quelques hautes autorités iront visiter un espace de collecte ou de distribution, parleront de solidarité, loueront les mérites de ceux qui les accueillent et promettront des subsides qu’ils n’ont plus. Même la pauvreté est « privatisée » de manière indirecte car elle dépend de la générosité des gens qui peuvent l’être !

(1) Bérangère Lepetit et Elsa Marnette sont journalistes au Parisien et autrices de « Babyzness » (éd. Robert Laffont)

 

Cet article a 2 commentaires

  1. christian grené

    A défaut de briguer la présidence de la République ou d’en être le premier ministre, que n’a-t-on pas choisi notre Jean-Marie pour être un Sulky? Euh!… un Sully?

  2. J.J.

    Liberté Égalité Fraternité peuvent être rayés des frontons des édifices publics, car des
    édifices publics, bientôt il n’y en aura plus.
    À la place, sur de nouvelle structures, Moi, Mon fric, Mon ego feront très bien l’affaire.

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