You are currently viewing La chasse au fonctionnaire territorial est ouverte

La chasse au fonctionnaire territorial est ouverte

La Cour des Comptes pond parfois des rapports surréalistes car ils ne reposent que sur une vision comptable des analyses effectuées. Alors que les évaluations devraient prendre en compte un champ beaucoup plus large des constats et des préconisations effectuées. Ainsi lorsque les juges de la rue Cambon pondent une étude sérieuse sur l’emploi dans les Collectivités locales ils arrivent à une conclusion vite reprise en boucle par les médias. En fait ils ont examiné la situation globale des finances et ce sera bien évidemment passé sous silence. Pour allécher le client, la conclusion est résumé de la manière suivante : il faut supprimer 100 000 emplis de fonctionnaires territoriaux. Rien n’est plus populaire que de bouffer du fonctionnaire.

Le document qui évalue à + 5,4 % la hausse des dépenses de fonctionnement des collectivités sur les huit premiers mois de l’année en cours. Une hausse expliquée par des achats de biens et services dopés par l’inflation, par des dépenses sociales liées à l’augmentation de la précarité, et les dépenses de personnels. Bien évidemment n’a été retenu que le dernier constat. Or les deux premiers pèsent beaucoup plus que la masse salariale. Les exigences normatives dans absolument tous les secteurs de la vie locale et plus encore le désengagement de l’État sans compensation financière équivalente aux charges transférées sont évidemment une cause réelle des augmentations budgétaires constatée.

Si l’on prend par exemple la restauration scolaire, les contraintes réglementaires et les exigences qualitatives (taux de produits bio), l’augmentation du prix des denrées et la nécessité de ne pas aggraver les charges des familles font que les budgets communaux ont nécessairement accrus leurs dépenses. Dans absolument tous les secteurs de la vie sociale, le phénomène est exactement le même. Accueil de la petite enfance ? Si le privé joue avec l’encadrement ou les taux de remplissage, les contrôles sont impitoyables pour les structures publiques.  Dans les écoles maternelles où l’éducation nationale impose du personnel d’accompagnement qualifié doit-on considérer que l’on peur refuser les dépenses générées par ces demandes ? Qui a étendu la prise en charge par la commune site de leur installation les frais de ce niveau d’enseignement dans les écoles privées sous contrat ? Dans le sport, les fédérations imposent des critères, des équipements de plus en plus sophistiqués nécessitant un entretien coûteux. Pour la sécurité le nombre de policiers municipaux est jugé partout insuffisant puisque l’État n’assure plus sa responsabilité régalienne. Il faudrait que la Cour des Comptes liste en parallèle les décisions étatiques qui pèsent sur le budget communal, intercommunal ou départemental.

Tout le monde loue les mérites des agences France Service qui pallie le déménagement du territoire de certains guichets de l’État. A Créon le premier pas a été franchi avec un emploi jeunes en 2001 et actuellement si la collectivité géré l’antenne qui va recevoir près de 9 000 personnes dans l’année nécessite plusieurs salariées compétentes et dévouées. Qui finance la différence entre la réalité des coûts et les dotations de l’État ? Les récriminations sur les délais pour obtenir un passeport ou une carte d’identité sans se rendre compte que ce sont les mairies d’accueil des terminaux nécessaires aux demandes qui ont dû embaucher pour les faire fonctionner alors que la compensation de l’État ne correspond pas loin s’en faut aux salaires payés.

Alors la Cour des Comptes a trouvé une solution : le « retour progressif des effectifs des collectivités », qui emploient environ 2 millions de personnes, « à leur niveau du début des années 2010 », soit une « réduction de 100 000 emplois », ce qui permettrait d’économiser 4,1 milliards d’euros par an dès 2030. Comme toujours cette imprécation ne s’accompagne d’aucun exemple concret. Il existe bien évidemment des abus, des exagérations, des manquements et c’est regrettable. L’exigence citoyenne de disposer à proximité d’un contexte de vie correspondant à ses besoins. Il veut des routes en parfait état, des accotements fauchés, des trottoirs propres, des écoles accueillantes, des associations subventionnées, des mairies ouvertes six jours sur sept, des caméras de surveillance partout, des pelouses professionnelles, des réponses immédiates à chaque question, de la démocratie directe, de l’éclairage public constant, des locaux collectifs au top… et évidemment sans augmentation des charges et des recettes gelées ou en baisse.

La Cour des Comptes a eu en 2023 un budget annuel, voté par le Parlement, de 218 millions d’euros dont 88,53 % de ce budget sont alloués aux dépenses de personnel, soit 193 millions d’euros. 1 810 personnes travaillent pour cette institution, 798 à la Cour des comptes et 1 012 dans les cours régionales. Le coût moyen du personnel est de 101 000 € annuels. Les 25 millions d’euros restants concernent le fonctionnement courant et l’investissement (immobilier, travaux…). Aucune instance n’est chargée de contrôler les comptes de la Cour des comptes. Les éventuelles évaluations sont effectuées par « les pairs », soit les homologues de l’institution. Mais il n’existe aucune obligation à formuler de telles analyses.

Ce champ est nécessaire.

En savoir plus sur Roue Libre - Le blog de Jean-Marie Darmian

Subscribe to get the latest posts sent to your email.

Cet article a 2 commentaires

  1. J.J.

    « Si le -privé- joue avec l’encadrement ou les taux de remplissage… »
    Je sais que je m’obstine et l’on pourra m’accuser d’être sectaire (la tarte à la crème des bigots) de jouer sur les mots (ce dont je me soucie comme d’une guigne) mais l’enseignement ci désigné n’est pas privé du tout, il est même largement gavé. Le terme exact qui devrait s’imposer est CONFESSIONEL, pour éviter tout ambiguïté.
    Je viens de finir de regarder (c’est long et il faut suivre) l’enregistrement de l’émission « Envoyé Spécial » consacrée aux « cabinets de conseil » et en particulier Mac Kinsey. Édifiant, et « ça » explique pas mal de choses à propos de la situation actuelle, y compris du « haro » vigoureux sur les fonctionnaires territoriaux ou autres. …Emploi d’arguments et de procédés un peu limites (euphémisme) au niveau honnêteté et sincérité.

Laisser un commentaire