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L’Europe entre dans des turbulences peu démocratiques

Les élections au Parlement européen prennent progressivement leur place dans l’actualité nationale. Les listes à la proportionnelle donc objets de longs marchandages pour que les partis politiques devenus de plus en plus des entités de plaçage bon rang quelques potes, mettent parfois du temps à se finaliser. Se trouver en rang potentiellement éligible constitue la priorité des « installés » dans le système. Et les rivalités prennent le pas sur les autres considérations de fond. D’ailleurs il ne sera pas beaucoup question d’Europe dans les prochaines semaines. Cette situation n’est pas spécifique à la France.

Dans tous les pays l’enjeu national (voire nationaliste) prendra le pas sur toutes les autres considérations. Les oppositions tenteront de transformer un vote qui sera marqué par une abstention record en un refus des orientations mises en œuvre par le pouvoir en place. Tout sera fait pour que le scrutin soit un défouloir. Croire que l’on écoutera les arguments destinés à mettre en place une Europe sociale et pacifique des peuples relève de la plus grande naïveté. La haine, l’exclusion, la démolition, l’approximation et surtout le rejet sous toutes se formes, constitueront les bases d’une campagne médiocre et démagogique.

Il faut admettre que ces campagnes sont facilitées par le fonctionnement actuel de l’UE ! D’ailleurs la vérité oblige à admettre que ce n’est pas le Parlement qui constitue l’épine dorsale de la construction européenne mais… la composition de la Commission. Et là quel que soit le résultat de l’expression démocratique elle n’en dépend pas. Les grandes manœuvres ont donc débuté ! Les chefs des états ont entamé discrètement les palabres pour se répartir les postes de Commissaires. Tout se règle en effet à Bruxelles entre dirigeants non élus chargés de régler le fonctionnement européen avec des cohortes de fonctionnaires et de techniciens. Certes les élections en répartissant différemment les majorités ouvriront ou fermeront des portes à l’adoption ou le rejet des textes généraux qui n’intéressent personne mais ce n’est pas là que se trouve le pouvoir.

La fraîcheur des relations franco-allemande de ces dernières semaines doit une partie de son existence dans la rivalité déjà publique entre la fringante Ursula (Von Der Leyen) et le sémillant Thierry (Breton). La première a annoncé lors du Congrès de son parti qu’elle sollicitera un second mandat de Présidente de la Commission… provoquant l’ire de celles et ceux qui se verraient bien à sa place. Elle est en effet très loin de susciter l’enthousiasme dans son propre camp. Jeudi dernier, le Congrès du Parti populaire européen (PPE) a en effet officiellement entériné sa candidature par 400 voix pour (et 89 contre). Ce résultat constitue un vrai désaveu puisqu’à peine la moitié des délégués présents à Bucarest étaient inscrits et ont voté (1)

Notre Thierry a vite armé sa fronde pour expédier un caillou destiné à rappeler que le va-t-en guerre élyséen ne se laisserait pas faire. « Malgré ses qualités, Ursula von der Leyen est mise en minorité par son propre parti. La vraie question désormais : est-il possible de (re)confier la gestion de l’Europe au PPE pour 5 ans de plus, soit 25 ans d’affilée ? Le PPE lui-même ne semble pas croire en sa candidate » a écrit le Commissaire en charge du portefeuille le plus libéral puisque c’est celui du « marché intérieur ». Il s’est inquiété pour faire bonne mesure s’il était «possible de (re)confier la gestion de l’Europe au PPE (conservateurs européens) pour 5 ans de plus, soit 25 ans d’affilée ?». Un signal sur une guerre franco-allemande en préparation !

En attendant l’Italie s’est rangée du côté de l’Allemagne puisque près des mois de tensions entre les deux pays, Giorgia Meloni s’est rendue à Berlin pour le premier sommet bilatéral depuis 2016. L’occasion de donner un cadre institutionnel à la collaboration entre les deux puissances manufacturières européennes, mais aussi tenter de trouver une position commune sur la réforme du Pacte de stabilité actuellement négociée à Bruxelles. Un accord a été trouvé. Rome saura se montrer reconnaissante. D’autant que la situation financière, économique, industrielle et sociale de la France incitera les pays de l’UE a écouter d’une oreille distraite des prises de positions française.

Les élections qui s’annoncent n’auront aucune incidence sur le processus réel de fonctionnement de l’UE. La majorité minoritaire française si elle sort encore plus affaiblie du scrutin de juin, conduira les partenaires de l’UE a regarder son mentor avec un brin d’humour et de… condescendance. Le seul espoir c’est que ce ne soit guère plus brillant en Allemagne… Le malheur des uns peut, s’il ne fait pas nécessairement le bonheur des autres, aider à éviter de se sentir humilié. Et l »Europe dans tout ça ? 

(1) Selon le PPE toutefois, seuls 737 délégués avaient le droit de voter pour l’élection de la candidate, et 591 étaient effectivement inscrits.

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Cet article a 3 commentaires

  1. J.J.

    Constat sans appel du fiasco de l’union européenne et de ses politiques au petit pied.

     » Il fallait un calculateur, ce fut un danseur qui l’obtint. » Pierre Augustin Caron de Beaumarchais
    J’irai voter, par devoir citoyen, mai je pense que mon bulletin sera « vêtu de probité candide et de lin blanc » , selon le célèbre zeugma.

  2. facon jf

    Bonjour,
    le dimanche 29 mai 2005, les Français votaient «Non» au référendum sur le Traité constitutionnel européen (TCE). Il s’agit d’un événement capital dans l’Histoire de notre pays. Élection faisant suite au duel Chirac – Le pen de 2002 premier séisme électoral pour la France. Chirac ne tire pas les leçons du fort vote lepéniste. Sur les conseils d’Alain Juppé, il décide de créer un parti unique à droite, l’UMP, en fusionnant le parti gaulliste RPR, le parti centriste UDF, et le parti libéral Démocratie libérale, ( Madelin). En faisant cela, il coupa encore un peu plus son mouvement de ses racines gaullistes et de son ancrage populaire. Courant 2004, Jacques Chirac décide de recourir au référendum et de ne pas passer par la voie parlementaire. Il est alors convaincu d’une victoire massive et facile pour le Oui. Il semble avoir oublié le précédent du référendum pour le Traité de Maastricht (1992), où le Oui, qui était censé l’emporter largement, ne gagna que de justesse.
    La campagne commence et le clivage gauche – droite s’efface complètement. Et c’est la naissance du fameux UMPS avec en face de lui une union pour le Non. Fédérant les opposants de l’extrême droite à l’extrême gauche en passant par à droite de Villiers , Pasqua, Nicolas Dupont-Aignan et à gauche Chevènement, le PCF, les trotskystes du Parti des Travailleurs ainsi que Emmanuelli, Hamon, Montebourg, Mélenchon . Plus surprenant, Fabius, pourtant éminent représentant de l’aile droite et libérale du PS, est aussi partisan du Non.
    Philippe Séguin l’avait bien dit : « La droite et la gauche sont deux détaillants qui ont le même grossiste, l’Europe. »
    C’est sans conteste là que sont les racines du Mac-Ronnisme, le « en même temps » qui mélange UMP et PS chaque groupe jetant pardessus bord les valeurs républicaines et sociales pour épouser un eurolibéralisme forcené.
    Finalement, le jour du scrutin, le Non l’emporte largement avec 54,6 %. On s’aperçoit que les jeunes (18-60 ans) ont massivement voté pour le «Non». On constate aussi que ce sont les classes populaires qui ont fait la victoire du Non et qu’il existe une fracture entre des territoires périphériques perdants de la mondialisation, qui ont voté Non, et des métropoles bien intégrées à la mondialisation, qui ont massivement voté Oui. Trois jours plus tard, les Néerlandais votent Non eux aussi. La Constitution européenne est morte. Mais pas enterrée, le cadavre est ressuscité par Sarko. En 2007, il est élu. Malgré son soutien au «Oui» en 2005, les électeurs du Non ont massivement voté pour lui en 2007. Il seront magnifiquement cocufiés par Sarko. qui ratifie le traité de Lisbonne le 13 décembre 2007 dans la capitale portugaise.
    Élu en suivant la ligne Buisson-Guaino, c’est-à-dire une ligne légitimiste * (Buisson) et bonapartiste/gaulliste (Guaino), Nicolas Sarkozy a le plus souvent gouverné en suivant une ligne orléaniste, défendue par d’autres conseillers : Xavier Musca et Alain Minc, deux Inspecteurs des Finances résolument libéraux, centristes et européistes. Ce choix de la ligne orléaniste pour conduire le pays, en dépit des engagements qui avaient été pris durant la campagne de 2007, n’a pas porté chance à la droite française sur le plan électoral. Sarkozy a montré que gagner grâce aux électeurs du Non et faire ensuite la politique du Oui est une impasse.
    L’UE(rss) n’a pas tiré la leçon des referendums français et néerlandais de 2005 ni du Brexit en 2016 (et de sa confirmation par les électeurs britanniques aux Européennes de 2018 et aux Législatives de 2019). Elle ne se remet pas en question et ne fait rien pour se faire aimer des peuples. Les électeurs du Non ne veulent pas la fin de l’UE, ils veulent une autre UE, moins bureaucratique, moins soumise aux lobbys, plus sociale, plus démocratique, plus efficace. Ils veulent une UE qui protège et pas une UE qui entrave les citoyens et réduit la marge de manœuvre des politiques. Ils veulent une Europe des Nations qui respecte l’identité et la souveraineté nationale et populaire des pays qui la composent.
    Ce qui est certain c’est que les politiques ont peur du peuple et c’est la raison pour laquelle il n’y a plus eu de référendum depuis 15 ans, résultat les cocus de l’UE (rss) votent avec leurs pieds pour l’abstention ou pour le clan Le pen,
    Bonne journée

  3. facon jf

    Pour éclairer mon propos : L’historien René Rémond a théorisé l’existence de trois droites en France : légitimiste (traditionaliste), bonapartiste/gaulliste (populaire, patriote, autoritaire, sociale et favorable à l’usage du référendum), orléaniste (libérale et centriste). Le sarkozysme a été une synthèse de ces trois droites.
    Et c’est aujourd’hui le courant d’idées légitimiste teinté d’un peu de Gaullisme, plus ou moins social, que prône la droite extrême pour mordre sur l »électorat du clan Le pen-Zemmour. Le courant Orléaniste est lui bien caché aux électeurs c’est pourtant la finalité de toutes les droites y compris de la Mac-Ronnie.

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