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Le rayon de soleil dans l’eau très froide

Tous les soirs au moment d’entamer une chronique je relis vos commentaires. J’ai vraiment l’impression désagréable de jouer les mauvais augures, de proposer que les aspects les plus déprimants de l’actualité ou d’évoquer des moments pénibles. Je n’arrive pas à trouver en lisant et relisant tout ce que l’actualité propose, un thème pouvant se prêter à une bonne dose d’optimisme. Suis-je incapable de détecter le rayon de soleil dans l’eau froide ? Suis-je victime d’une approche obtuse des multiples propositions distillées par les médias ? Ai-je perdu l’envie de dénicher dans le quotidien quelques paillettes de bonheur dans les aléas du quotidien ? Le seul fait de me poser ces questions démontre un certain désarroi…

Dès que je décolle pour aller respirer l’air frais j’ai du mal à me persuader que je n’entendrai pas parler de difficultés humaines en tous genres. Impossible de ne pas croiser une porteuse ou un porteur de nouvelles déprimantes. Les cancers, les maladies les plus invalidantes figurent au menu de toutes les conversations. Un banal « comment ça va ?.. » prend des allures angoissantes. Les suites de la crise sanitaire liée à la Covid sous toutes ses formes prennent une tournure concrète démoralisante. Il n’y a aucun refrain complotiste dans ce constat mais simplement le fait que durant deux ans, l’obsession de la protection contre le virus a été prépondérante, permet de penser que le reste a été négligé.

Tout le monde se débat contre les délais d’accès au service public de santé ou au surcoût des passages dans le secteur privé. La santé constitue la préoccupation principale de plus en plus de gens sans qu’ils fassent un lien quelconque avec les évolutions environnementales, climatiques ou sanitaires. La mort frappe semble-t-il durement en ce moment, même s’il faut prendre conscience qu’avec l’évolution de l’âge, les avis d’obsèques nous concernent davantage qu’à vingt ans. Je vais de cérémonies en cérémonies avec le sentiment qu’avant elles étaient moins nombreuses.

Ensuite débarquent tous les problèmes concrets. Les demandes de logement affluent avec des situations toutes plus dramatiques les unes que les autres. La pénurie s’accentue et les prix augmentent rendant l’accès à un toit toujours plus difficile. Quasiment aucune des communes soumises en France à la loi sur le logement social n’a progressé l’an passé. Vingt ans après son entrée en vigueur, seules quatre communes sur dix respectent la loi imposant au minimum 20 ou 25% de logements sociaux dans les grandes villes, révèle l’enquête de France Info et France Bleu publiée hier. Et rien n’ira en s’améliorant.

Difficile d’avoir le sourire, de plaisanter quand des sollicitations qui ressemblent à des suppliques parviennent jusqu’à vous car ailleurs les réponses ne sont que strictement administratives. Le seul fait d’écouter semble soulager les interlocuteurs. Allumer un faible espoir dans une société où sans réseau et par la voie commune vous n’obtenez rien, constitue un très faible plaisir face à un monde anonymisé, numérisé, distanciel et souvent aux abonnés absents en matière d’humanité. Dans ce monde de l’indifférence à l’autre, du nombrilisme renforcé, de la haine institutionnalisée, tendre la main devient l’exception.

Comment trouver un rayon de lumière dans la forêt obscure des démarches à accomplir, des injonctions administratives, des applications réglementaires diverses, des contraintes s’appliquant sans discernement ? Comment m’extraire du marécage social et du malheure des autres ? Chaque jour ou presque les inégalités se creusent dans tous les domaines entre ceux qui savent, ceux qui peuvent, ceux qui trouvent des chemins et les ignorants des arcanes d’une France complexe, qui n’ont aucun moyen matériel ou humain d’agir, ceux qui sont stigmatisés car ils ne parviennent pas à dénicher le sentier les conduisant à une éventuelle solution. Là encore mon plaisir personnel consiste à pousser les plus téméraires dans la bonne direction ou à les accompagner.

Ce soir je n’aurai pas noirci le tableau général. Hier mercredi jour de marché, plus que tous les autres, les retrouvailles au bar Créonnais d’une douzaine de complices deviennent donc des moments exceptionnels. Pas un seul des participants à ces retrouvailles ne rencontre pas d’une manière ou d’une autre, un problème mais il semble l’oublier devant son rosé, son café, son Porto, son lait fraise, son Ricard menthe, son galopin ou son demi sans faux col. Enfin je le crois. Dans ce creuset où toutes les différences se fondent pour rire, pour « chambrer », pour débattre (pas trop), pour commenter ou pour jouer, je partage avec gourmandise. Je ris sans trop pisser dans mes protections port prostatectomie. En sortant la chape de plomb retombe… Mais ce qui est pris n’est plus à prendre ! J’ai échappé à la malédiction de la mouise ambiante.

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Cet article a 14 commentaires

  1. Gilles Jeanneau

    C’est peut-être moi qui t’ai contaminé avec mon pessimisme insistant !…
    J’avoue que Stéphane EICHER a fort bien résumé la situation de ce siècle morose dans sa chanson « déjeuner en paix »:
    « Les nouvelles sont mauvaises d’où qu’elle viennent »
    Allez bonne journée quand même.

    1. facon jf

      Pt1 je l’Eicher ! j’ croyais que c’était  » déjeuner en pets « … OK je sors, mais je vais revenir.

  2. J.J.

    Je crains Jean Marie, qu’à l’âge où nous arrivons, et moi, encore plus que toi, ce que tu décris devienne un irréversible quotidien, ce qui n’est pas encourageant certes, mais on ne peut échapper aux réalités.
    L’égoïsme et la terreur règnent plus que jamais en maîtres sur ce monde et n’annoncent pas des lendemains qui chantent.
    Les comiques qui font semblant à Dubaï de débattre de l’avenir de la « planète » ne convainquent à l’évidence personne.
    Je suis encore peut être plus pessimiste que toi, mais je me demande si les jours de l’humanité sur cette planète, qui elle survivra à tous les cataclysmes, ne sont pas comptés.
    Et moi je n’ai pas de petit bar Créonnais…alors malgré tout, en dépit de mes aller retour quotidiens à l’hôpital pour mes soins, j’essaie de garder le moral.

  3. Pierre LASCOURREGES

    A travers la liste des commandes de boissons énumérées au comptoir du Bar Créonnais, je reconnais les fameux consommateurs qui se distinguent… Si vous voulez en savoir plus, rejoignez la prochaine tournée!

  4. François

    Bonjour J-M !
    La bonne nouvelle de la journée, c’est, en lève-tôt… de POUVOIR LIRE le carnet des avis d’obsèques du quotidien départemental …. !
    Puis, sans se pincer, on dévore Roue Libre ! !
    Après, les emm …….S commencent ! ! ! !
    Amicalement

  5. MARTINE PONTOIZEAU-PUYO

    BONJOUR A TOUS
    FAITES UN EFFORT ET GARDEZ LE MORAL N’ALLUMEZ PLUS TELE RADIO ET JOURNAUX. REGARDEZ LE CIEL LE SOIR AU COUCHER DU SOLEIL, il a parfois des couleurs étranges, magnifiques, et regardez le jour quant il ne pleut pas la forme des nuages, j’en ai photographié d’étranges mais je ne sais pas les publier sur le net
    allez pensez aux NoËL de votre enfance combien plus joyeux et modestes. Nous étions heureux, maintenant le DIEU ARGENT a tout gâché. Donc il nous reste la nature à regarder, les oiseaux à nourrir, nos chats ou chiens à caresser et des bonnes lectures à faire ou à relire. Ressortez vos beaux vêtements (si vous y rentrez) faites vous belles et beaux comme par le passé, souriez, remerciez, soyez gentils, et soyez bien en vous.
    je vous embrasse toutes et tous, prenez soin de vous, je vous aime. Martine

    1. François

      Bonjour @MARTINE PONTOIZEAU-PUYO !
      Pour les photos sur le net, vous pouvez vous adresser à ….J-M : depuis quelques jours, l’instit’ vient de compléter son bagage « connaissances du net ». Quelques leçons vont nous le rajeunir !
      Amicalement

    2. Laure Garralaga Lataste

      @ à mon amie Martine Pontoizau-Puyo
      Ton commentaire a remis en mémoire les Noëls de mon enfance… à mon réveil, je découvrais dinette, chambre à coucher pour ma poupée non pas achetée au super marché mais fabriquée par le père Noël (oui !) et… l’inoubliable « orange » qui me rappelait mon pays d’origine que ma famille avait dû fuir pour cause de guerre incivile !

  6. facon jf

    Bonjour,
    mais comment faites-vous pour être triste ici en Absurdistan ? Le pays merveilleux de l’emmêmetemtisme doctrine merveilleuse qui permet de dire une chose en faisant le contraire ou de dire une chose et la contredire dans le même moment. Le pays qui fait rire la terre entière de sa diplomatie. Un pays qui fait la guerre aux terroristes en Afrique et dont le Chef de l’État ridiculise le représentant d’un pays allié devant toutes les télés du monde. Une aimable plaisanterie qui nous a obligé à quitter le terrain au grand bénéfice des Ruskoffs.
    Un pays qui fait la leçon au sujet du conflit Ukrainien, se prive du pétrole et du gaz Russe mais continue à importer du combustible nucléaire avec le Russe Rosatom.
    Un pays qui soutien Netanyahu et fait semblant de défendre les enfants de Gaza.
    Un pays qui organise les « ZEUJOLYMPIQUES » tout en étant incapable d »assurer ni les transports en commun, ni la sécurité et qui déclare « nous sommes prêts « . Je vous laisse deviner la crise de rire des touristes tant attendus qui vont surtout se faire bousculer, insulter et dépouiller. J »imagine le contrôle au faciès des touristes à peau pas assez blanche par des vigiles à la formation sommaire ou par les policiers épuisés par la surcharge de travail. Tout va bien on va bien rire.
    Le ralentissement économique se fait sentir partout, mais pas chez nous! Tout comme l’inflation qui est parfaitement maîtrisée par le grand mamamouchi de Bercy qui lorgne sur le poste bientôt vacant à l’Élysée.
    Tout va bien aussi sur le front de l’immobilier où les futurs propriétaires pourront emprunter sur 27 ans au lieu de 25 sous réserves de faire 10% de travaux en plus de l’achat, PDR diraient les d’jeuns.
    Tellement d’occasions de rire à un point jamais atteint, c’est à se demander pourquoi dans un si beau pays il se vend, tous psychotropes confondus, pas moins de 150 millions de boîtes chaque année.
    Je suis un peu loin pour trinquer avec vous mais je vous encourage à utiliser le jus de la vigne comme antidépresseur.
    Au fait j’oubliais de souligner que nous sommes sur la 3 éme marche du podium pour les accidents mortels du travail en Europe, ça donne au moins le sourire. Pas de soucis, encore un effort de démantèlement de l’inspection et la médecine du travail et la médaille d’or est pour nous.
    bonne journée

    1. Gilles Jeanneau

      Vous êtes bien revenu , mon cher ami, et j’adhère sans réserve à votre commentaire d’une lucidité étonnante…
      Bonne soirée maintenant!

  7. christian grené

    Merci Jean-Marie d’enchanter tous nos matins même s’il arrive, par la force des choses, qu’il y ait parfois un goût un peu âcre dans le café. L’événement guide ton pianotage sur l’ordi et il faut saluer la performance quotidienne, sauf dimanche. Mon problème, c’est que je dois m’interdire de plaisanter sur certains sujets. Continue comme ça!

    1. Laure Garralaga Lataste

      @ à mon ami christian grené…
      Quand ton café est âcre, plonges-y une petite douceur… tu mesureras ainsi son efficacité !

  8. Alain .E

    Un psy disait récemment à une connaissance ,  » c’ est pas forcement un signe de bonne santé mentale que d’ aller bien dans un monde qui va si mal  »
    Le constat n’ est pas faux finalement , et moi qui me porte plutôt bien , du coup devrais je m’ interroger sur ma santé mentale ??
    nous pouvons choisir entre regarder la noirceur ou la beauté de ce monde , je souscris aux propos de Martine , ne pas être aveugle , mais faire pencher la balance du bon coté.
    Cordialement.

    1. Laure Garralaga Lataste

      @ à mon ami Alain.E
      Pas de panique… sur la santé mentale ! En revanche, restons vigilants sur « ce monde qui va si mal… ! »

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