En attendant une prise de la pastille salvatrice, les peuples pris dans la seringue des mesures anti-pandémiques secouent le cocotier des certitudes. C’est avec étonnement que l’Europe enregistre de nouveaux soubresauts contre les décisions de son gouvernement sur le territoire des Pays-Bas. Nul ne pensait que la révolte batave serait d’une telle violence compte-tenu de la sérénité semblant marquer la vie publique dans le plat pays. De quoi faire réfléchir l’Élysée et Matignon qui avancent masqués vers un nouveau confinement.
Un couvre-feu à partir de 21 heures est entré en vigueur samedi et c’est le premier que découvre les Néerlandais depuis le début de la Seconde Guerre mondiale. Immédiatement une contestation s’est installée alors que la Covid-19 progresse très rapidement en raison des liens directes avec la Grande-Bretagne. Le pays ne soutient pas cette démarche de prévention selon un sondage où plus de la moitié de la population s’y oppose ou doute de l’utilité de la mesure.
Sous l’influence des réseaux sociaux qui se sont mis à tourner à plein régime en une journée , les premières manifestations se succèdent avec une violence particulière. Magasins pillés, abribus vandalisés, voitures incendiées, jets de pierre contre la police, centre de dépistage brulé : Rotterdam et Amsterdam ont été la proie de nuits d’émeutes oubliées depuis 40 ans. La contestation s’est répandue vers Haarlem où la police a essuyé des jets de pierre et des tirs de mortier. Près de 200 personnes ont été arrêtées ce qui est un nombre record au plat pays.
Ce qui devrait inquiéter les autres membres de l’UE c’est le constat sur les auteurs de ces troubles : des jeunes bien sous tous rapports qui protestent contre ce qu’ils considèrent comme une atteinte à leur libertés fondamentales. Il en s’agit nullement de bandes organisées mais d’une désapprobations multiformes regroupant des gens de toutes les couches sociales. Ce phénomène dénote un malaise profond qui est lentement monté à l’occasion d’une mesure jugée trop restrictive.
Un mouvement que l’on peut considérer comme négationniste mettant en cause les discours scientifiques ou plus encore l’utilité du confinement a germé avant d’éclater dans des rendez-vous informels de défoulement « collectif ». Cette attitude dans une société d’habitude plus paisible constitue une alerte forte pour d’autres plus cabossées. Une conjonction d’éléments populistes, complotistes, religieux, politiques constitue le ferment de ces « jacqueries » ce qui ne s’est pas produit ailleurs.
Bien que n’ayant que légèrement dépassé seulement les 2 000 morts le Danemark est également secoué par des épisodes anti-restrictions. La fermeture des bars, des restaurants, des écoles a provoqué une éruption de mécontentements. Là l’extrême-droite a déployé ses forces sur la base du slogan « Liberté pour le Danemark ! On en a assez ! » Un mouvement Men in Black Danemark », très actif sur Facebook organise des manifestations depuis plus d’un mois contre la « coercition » et la « dictature ».
Les mêmes phénomènes se sont produits en Allemagne et secouent également l’Espagne. A Madrid un défilé des milliers de personnes ont également manifesté contre les mesures sanitaires, dénonçant la « tromperie » d’un virus qui, selon certains manifestants, « n’existe pas ». Les mots d’ordre sont identiques chez les « ultra-orthodoxes » israéliens ou parmi les jeunes Libanais. Cette forme de contestation a donc toutes les chances de surgir ailleurs dans les pays dits « civilisés ».
Des formes « soft » de complotisme voient le jour et sont inoculés par des réseaux totalement incontrôlables. Ils n’ont pas d’anti-corps pour les stopper ou au moins les ralentir. C’est l’une des raisons pour lesquelles le troisième confinement met tant de temps à émerger et que le gouvernement avance aussi lentement que dans la distribution des vaccins. L’opinion est déboussolée et ne sait plus à quel plateau de télé-perroquet se fier.
La tentation de la désobéissance civique risque bel et bien de prendre son essor. On n’avait pas prévu l’émergence des « Gilets jaunes » alors que le climat général était bien moins tendu et moins pourri qu’il ne l’est actuellement. Des médecins, de plus en plus nombreux, alertent sur les conséquences des deux premiers épisodes de confinement sur la santé mentale: anxiété, dépression, parfois jusqu’à des tentatives de suicide. Il y aurait selon l’un d’entre eux que trois manières de réagir: « se résigner, se révolter ou alors faire face de manière efficace ». A vous de choisir !
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Un constat qui m’est personnel : je trouve dans l’émergence de l’irrationnel sous les formes les plus variées des raisons de s’inquiéter.
Les arguments de certains niant la pandémie sont parfaitement aberrant, nier l’évidence est une forme de fanatisme, nous en avons des exemples récents..
« des jeunes bien sous tous rapports qui protestent contre ce qu’ils considèrent comme une atteinte à leur libertés fondamentales ».
Je conteste la qualification de « biens sous tous rapports ». Que l’on balance des pavés sur la police, représentante de l’ordre et de l’état contesté, je veux bien à la rigueur, c’est de « bonne guerre ».
Mais s’en prendre aux commerçants, aux propriétaires de voitures que l’on brûle, aux biens des particuliers, je vois plutôt là une forme de vandalisme et de sauvagerie qui rappelle fortement les black blocs agissant pour le compte d’obscurs donneurs d’ordre.
Les prétexte du refus des mesures de restrictions sanitaires par une majorité de citoyens ne serait-elle pas une bonne occasion pour certains pour « foutre le bordel »?
Le fait que l’on soit hostile à des mesures jugées trop « drastiques », qu’on les conteste, et que l’on exprime son mécontentement ne justifie pas cet excès de violence dont sont victimes en premier d’innocents citoyens .
Je remarque que, quel que soit le pays ou le continent ou se produisent ces évènements, il semble que «le ventre soit encore fécond, d’où a surgi la bête immonde ».
Pour ma part, je ferais un distingo entre les Gilets jaunes qui se sont levés pour faire face à la violence sociale qu’imposent nos gourvernants !
Quant aux jeunes « bien sous tous rapports », n’est-ce pas une résultante de 75 ans de paix civiles, d’enfants gâtés par le (néo)libéralisme, ou l’on veut tout, tout de suite….
Une enseignante de 1ère section de maternelle, il y plus de 10 ans remarquait déjà dans le comportement des petits enfants, qu’ils ne savaient pas sublimer leurs frustrations, avec un comportement gentil/laxiste des parents, qui ne savaient pas leurs dire NON et leurs expliquer pourquoi.
« Françoise Dolto a tenté d’aider une génération de parents ébranlés dans leurs repères par Mai 68 et qui cherchaient de nouvelles règles pour élever leurs enfants. Nous vivons, nous, dans une autre époque, que certains décriront comme marquée non par le refoulement et l’inhibition, mais au contraire par l’exhibitionnisme et la valorisation de la transgression… Toute la question est donc de savoir ce qui, dans le corpus doctrinal de Dolto ressort du contexte historique où elle s’inscrivait, et quelle est la part de son enseignement qui résiste au temps et mérite d’être transmis. »
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