Depuis deux semaines la froidure règne sur la France. L’hiver serait provisoirement de retour avec des gelées matinales et des thermomètres qui s’amusent à être sous le zéro. Dans mes souvenirs d’écolier il y avait chaque semaine un préposé au relevé des températures pour suivre son évolution de manière collective. L’instituteur avait acheté un immense instrument de mesure enregistrant les minima et les maxima ce qui compliquait la tâche de celle ou celui qui effectuait la collecte. Dès que la campagne blanchissait, nous savions qu’un homme discret et gris apparaîtrait dans les fermes. Il profitait du froid durable pour rendre quelques visites convenues aux propriétaires qui l’attendaient anxieusement. Ce gars mystère récoltait les dividendes de son talent de tueur à gages. Personne n’aurait pourtant songé à l’arrêter. il était même d’utilité publique.
Il arrivait autant que je me souvienne? sur un Vélosolex bourdonnant ou une mobylette poussive alors que les lueurs de l’aube peinaient à éclairer les lieux où il commettait, sous les yeux d’une assistance plus ou moins apeurée, une œuvre sanguinaire. La brouillard enveloppait les bâtiments et son premier contrat était exécuté comme dans une théâtre d’ombres. La préparation méticuleuse de sa venue relevait de la responsabilité du commanditaire. Sa victime bien évidemment non consentante n’avait pas été prévenue du sort qu’il lui réservait. Comme son temps était compté puisque le bonhomme était payé à la pièce, dès son arrivée toute une escouade de complices entrait en jeu. Lui ne se mêlait pas de ces affaires compromettantes.
Bien avant son intervention, un grand feu alimenté par les ceps des vignes mortes ou du bois de récupération, réchauffait la rondeur ventrue de marmites en fonte où frémissait déjà de l’eau chaude. Une échelle dressée contre un mur ; une maie, sorte de pétrin en bois que l’on se passait d’un hameau à l’autre ; une table robuste avec des sortes de racloirs soigneusement affûtés : le décor annonçait une préparation d’un événement rituel.
L’homme venu dans le froid glacial avait aligné sur la table une série de couteaux. Il les regardait avec attention, passait prudemment son doigt sur le fil de chacun, les essuyait avec les torchons blancs dans lesquels ils étaient précédemment enveloppés. Avec tendresse il passait et repassait les lames sur une sorte de dague non pointue répondant à appellation de fusil. il attendait son heure. Il était pressé.
De l’arrière-cour s’échappaient des cris horribles qui transperçaient les tympans et déchiraient le silence de la campagne engourdie. Notre arrivant semblait insensible à cette détresse manifeste. Il attendait d’accomplir son forfait et d’ailleurs il témoignait d’une légère impatience en consultant sa montre. Il finit par retenir dans sa panoplie d’armes, une lame longue et effilée. Il vérifia qu’elle coupait comme un rasoir en tranchant devant le public d’enfants ébahis, une feuille de journal. Les préposés à l’accompagnement de celui qui gueulait de plus en plus fort, se débattait avec vigueur et tentait par tous les moyens de leur échapper ne manageaient pas leurs efforts. Utilisant des cordes, des crocs ou des objets contraignants la troupe avait sorti de sa cellule une bête approchant (et même dépassant) le quintal. Une sorte de monstre sale et bruyant finissait par être hissé avec des palans au dernier barreau de l’échelle pour être sacrifiée.
Lorsque le maintien de sa victime potentielle était assuré, le manieur de couteau s’approchait. D’un geste sec il plantait son arme blanche dans la gorge de sa victime toujours agitée par des cris vite étouffés. Du grand art. Une précision et un sang-froid qui lui valaient sa notoriété. Deux femmes avec une large bassine recueillaient le sang qui jaillissait par saccades de la blessure mortelle. le silence retombait sur les lieux du crime. Pour s’assurer que son œuvre était parfaitement accomplie, le tueur de ce matin blême élargissait la plaie. En quelques minutes, sa victime exsangue devenait inerte. Félicité par ses commanditaires pour son efficacité, l’exécuteur pouvait alors fièrement contempler son œuvre. Essuyant l’arme du crime avec un chiffon huilé il la replaçait dans la panoplie où il avait disposé les autres.
Jetant un coup d’œil sur sa montre, « l’assassin » s’inquiétait du retard pris . « Ils doivent m’attendre !Allez je pars vite. C’est pas tout mais j’en ai encore cinq à tuer ce matin. C’est le jour car la lune est parfaite et tout le monde me réclame alors j’ai eu du boulot ! » Il récupérait discrètement ses gages. Les billets rangés dans son portefeuille reflétait cette activité débordante. Regardant une dernière fois le cadavre que les hommes de main descendait de sa position de pendu pour l’étendre dans son cercueil sans couvercle où on déverserait vite des litres d’eau bouillante après avoir brûlé sa peau avec des torches de brande sèche. Un café bien chaud et une « remorque » de gnôle maison pour peut-être endormir ses remords et il enfourchait sa monture motorisée pour se rendre dans un nouvel endroit où il devrait répéter son savoir-faire de …tueur de cochons.
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Parmi mes nombreuses activités hivernales (généralement du samedi), il m’est arrivé de me livrer à ce rite sanguinaire. Pour éviter les horribles clameurs et aussi les souffrances de la bête, on lui assénait sur la tête un solide coup de mailloche, et ensuite tout allait très vite(l’arrivée des chalumeaux à gaz a été un progrès pour déshabiller la bête de ses soies). Il le fallait, car débiter l’animal, cuisiner ce qui était cuisinable, saler les viandes, emplir les bocaux, les stériliser etc. , tout devait être « plié » avant le lundi matin.
J’évitais de me procurer une trop grosse victime car avant l’arrivée des congélateurs il fallait aussi envisager sa consommation assez rapide (les jambons donnaient toutefois de la « marge »).
Évidemment je pratiquais cette activité à titre individuel, à moins que je n’aie trouvé un comparse, ce qui nous permettait de « tuer une moitié de cochon » chacun, selon l’expression régionale : « tuer le cochon » consistait à mettre fin à l’existence de la pauvre bête, mais aussi procéder à la préparation de la chair de l’animal, de la tête à la queue.
Hélas tout ce « folklore » alimentaire et porcin est maintenant oublié. Pour des prétextes essentiellement sanitaires, je pense que l’élevage de porcs doit être sévèrement contrôlé, et leur abattage par des « particuliers » strictement interdit .
Le personnage que tu nous décris avec talent était parfois surnommé « Le Saigneur du village ».
Parmi mes nombreuses activités hivernales (généralement du samedi), il m’est arrivé de me livrer à ce rite sanguinaire. Pour éviter les horribles clameurs et aussi les souffrances de la bête, on lui assénait sur la tête un solide coup de mailloche, et ensuite tout allait très vite(l’arrivée des chalumeaux à gaz a été un progrès pour déshabiller la bête de ses soies). Il le fallait, car débiter l’animal, cuisiner ce qui était cuisinable, saler les viandes, emplir les bocaux, les stériliser etc. , tout devait être « plié » avant le lundi matin.
J’évitais de me procurer une trop grosse victime car avant l’arrivée des congélateurs il fallait aussi envisager sa consommation assez rapide (les jambons donnaient toutefois de la « marge »).
Évidemment je pratiquais cette activité à titre individuel, à moins que je n’aie trouvé un comparse, ce qui nous permettait de « tuer une moitié de cochon » chacun, selon l’expression régionale : « tuer le cochon » consistait à mettre fin à l’existence de la pauvre bête, mais aussi procéder à la préparation de la chair de l’animal, de la tête à la queue.
Hélas tout ce « folklore » alimentaire et porcin est maintenant oublié. Pour des prétextes essentiellement sanitaires, je pense que l’élevage de porcs doit être sévèrement contrôlé, et leur abattage par des « particuliers » strictement interdit .
Le personnage que tu nous décris avec talent était parfois surnommé « Le Saigneur du village ».
Bonjour,
la Saint cochon le rite barbare des païens ressurgit tous les premiers dimanche de février à Bourg en Bresse. Merci de prononcer à la mode des pays de L’Ain BourKK et pas BourGG.
En Bresse, département de l’Ain, est organisée chaque année une manifestation qui vise à animer la ville de Bourg-en-Bresse et à favoriser le tissu économique local. Elle repose sur la vente de charcuteries par les professionnels de la région et sur la démonstration d’une activité importante de la vie rurale du passé : la transformation d’un porc en charcuteries.
Mais le choix de cette activité comme vecteur patrimonial de la société Bressane n’est pas évident, en particulier par le fait que celle-ci repose sur la mise à mort d’un animal, mise à mort qui ne peut facilement devenir un spectacle. Pour pouvoir être exhibée, cette pratique subit un processus sélectif qui lui fait alors perdre son sens principal et qui crée de l’incompréhension tant de la part des citadins que des ruraux ou encore des organisateurs. L’exemple de «la Saint Cochon dans la ville» montre les ambiguïtés et les limites de la patrimonialisation alors que se multiplient des fêtes mettant en relation une activité et un territoire.
Ben voila, c’est dit le cochon c’est bon mais pas question de tuer l’animal à l’ancienne en pleine ville devant des enfants et de bonnes âmes hypocrites. On se contentera donc de l’opération de » buclage » au chalumeau de la victime tuée » proprement » à l’abattoir et ramenée encore tiède sur les lieux festifs. Le « buclage et l’échaudage » achevé la victime est débitée à l’ancienne sous les yeux du public. Le saigneur de la cérémonie ouvre l’abdomen de la victime suspendue à une échelle et les viscères de l’animal se répandent hors de son corps. Beurk! disent alors les enfants. Le saigneur de la cérémonie se saisit de sa hache pour fendre en deux la victime.La tête du porc est séparée du corps avec application et jetée dans un seau d’eau. Puis le travail s’arrête et la victime reste au pilori oubliée alors des spectateurs qui s’en vont acheter la charcuterie sur les stands ou rejoindre les buvettes. A la buvette les vins régionaux du Bugey et du Mâconnais accompagnent les tartines de fromage fort. Les amateurs d’authenticité peuvent se rabattre sur les photos d’époque agrandies et exposées dans le marché couvert. Pour les frustrés du moment précédant la mort de la victime un concours d’imitation du cri du » caillon » ( nom du cochon en patois Bressan ) à lieu vers midi. La victime aux termes de sa » fête » étant non estampillée des fameux sésames sanitaires finira … à l’équarrissage car impropre à la consommation humaine. Les lots gagnants de la tombola 1/4 de cochon proviennent de l’industrie.
Merci de m’avoir suivi dans ma promenade.
Et bonne journée
En parlant de cochons et d’hypocrites vous pouvez lire cela :
https://www.les-crises.fr/donald-trump-est-soutenu-par-la-big-tech-pour-reduire-les-impots-dereglementer-les-cryptomonnaies-et-remplacer-les-travailleurs-par-l-ia/
Il est grand temps de faire usage de notre droit ultime qui dépasse de beaucoup celui du droit de vote, notre ticket de consommateur. J’extrais de l’article ce passage » … il y a beaucoup de distractions, beaucoup de choses qui sont lancées pour attirer votre attention. Mais l’essentiel se résume à remplacer les travailleurs par l’intelligence artificielle, à remplacer la monnaie par la crypto-monnaie et à se débarrasser de toute forme d’imposition sur la richesse qui pourrait se présenter .Voilà le programme. C’est très simple. Et le seul pouvoir que nous avons en tant que citoyens – et je pense que c’est un pouvoir énorme – est de nous asseoir là et de dire : « Vous savez quoi ? Nous n’utiliserons plus vos produits ». Et nous avons accepté toutes sortes d’atteintes à la vie privée, toutes sortes de surveillance, toutes sortes de manipulations en échange de commodités. Je pense qu’il est temps pour nous d’examiner cette relation et de nous demander : « Pourrions-nous accepter moins de commodités pendant un certain temps en échange de la reconquête de l’autonomie humaine ? » « . Pour ma part il a bien longtemps que j’ai saisi l’importance de ce que disait Coluche » Il suffirait que personne n’en achète pour que ça ne se vende pas ». Ainsi je raye de la liste de mes achats les produits dont je sais qu’ils financent des projets nuisibles à l’humanité ou des guerres. Je refuse d’utiliser les proméne-couillons à dos d’animaux mal traités lors de mes voyages. Je suis un fervent défenseur de la réutilisation de tous les produits manufacturés. Steve Jobs peut garder ses produits estampillés à la pomme, je ne suis pas une poire.
Au cas où ma précédente réponse sur la saint cochon pourrait être interprétée faussement, je précise que mon enfance s’est déroulé en milieu agricole et que j’ai tué de mes mains des animaux domestiques. Que je ne suis pas végan mais bien omnivore ce que je dénonce c’est l’hypocrisie et les mensonges.
faconjf @ « Il suffirait que personne n’en achète pour que ça ne se vende pas ». Ça, c’est « beau comme l’Antique », comme disent certains, et j’applique depuis longtemps cet apophtegme.
Je partage entièrement les idées exprimées dans ce texte, entre autre le dernier paragraphe : ayant vécu dans un milieu semi rural, j’ai moi aussi, ayant appris en regardant les voisins, procédé à des exécutions capitales de volailles et autres nourritures potentielles(le poulet PAC n’existait pas encore).
Je n’ai jamais pris aucun plaisir à pratiquer ce genre d’activités, mais on n’en faisait pas « tout un fromage », et en tant qu’omnivore je n’ai jamais culpabilisé non plus.
@ JJ hors sujet … Quoique en parlant de cochons celui-ci s’est bien engraissé sur les cons-tribuables-cons-sommateurs.
https://www.francetvinfo.fr/monde/europe/union-europeenne/pourquoi-l-ancien-commissaire-europeen-thierry-breton-a-t-il-eu-le-droit-de-rejoindre-le-comite-consultatif-de-bank-of-america_7020146.html
Comme tous les agents au service de Washington une fois grillés / épuisés / licenciés ont aussitôt soit reçu un poste de prof dans une quelconque université américaine, soit été embauchés par une banque US. C’est leur façon de remercier leurs fidèles serviteurs. cela a été le cas du grand patron de la Commission Européenne Jose Manuel Barroso, qui, une fois son mandat terminé, a été immédiatement embauché par Goldman Sachs et du Premier Ministre Tony Blair qui, une fois remercié, a fini à la JP Morgan ?
Eh bien voici le tour de Thierry Breton, l’homme des suicides chez Orange, celui qui a détruit Bull,Thomson, Atos, etc., récemment remercié par la patronne de l’UE vient d’être embauché par la… Bank of America. Et que dire des conseillers de l’Élysée et de Matignon … Bizarrement le CHER, très cher Thierry possède aussi depuis 2015 la nationalité Sénégalaise par le président Macky Sall . L’ancien ministre français y a passé son voyage de noces, acquis la maison de l’ancien Président Léopold Senghor, compté parmi ses clients la principale cimenterie du pays et ouvert un bureau Atos. Cet amour inconditionnel pour le Sénégal s’explique par le climat, pas pour des raisons fiscales. Lors de son départ pour Bruxelles, Thierry Breton a empoché 40 millions d’euros. Cette fortune représente la valeur de l’ensemble de ses actions Atos qu’il a eu le temps de céder à 65 euros l’unité (contre 0.019 euro aujourd’hui) avant de faire ses valises. «Sans compter cette retraite chapeau qu’il demande à lisser chaque année dans le bilan financier et à toucher à l’issue de son mandat de commissaire, pour éviter les scandales. Elle était, selon Libération, gérée par Axa, pour un montant d’environ 14 millions d’euros brut», complète . euro aujourd’hui) avant de faire ses valises.
Ben mon cochon!!
faconjf @ « I » sont tous pareils » : le pantouflage (très en vogue à Bercy), avec le parachute en or massif. C’est paraît il le même Bertrand qui aurait fait annuler les élections en Roumanie, autrement dit l’art de s’occuper de ce qui ne le regarde pas (vraisemblablement également contre monnaie sonnante et trébuchante.
Ces élections étaient peut être « sujet à caution » mais on n’avait pas à sen mêler.
Et moi qui croyais que la nuit des longs couteaux s’était déroulée du 29 au 30 juillet 1934 !
Le pauvre canard doit avoir peur à son tour. Sauf s’il s’appelle Donald.
N’ étant pourtant plus tout neuf , je poste quand même le neuvième commentaires .
Je crois comprendre que de nombreux cochons se cachent parmi les hommes politiques et autres hommes d’ affaires , a l’ inverse de notre aimable goret ,ce n’ est pas nous qui le saignons , mais ce sont eux qui nous saignent ….
Je citerai Mark Twain » ne vous battez pas avec les cochons , vous vous salissez tous les deux et le cochon aime ça »
Cordialement.