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La fin programmée et calculée de la fonction publique

Récemment un ancien Président de la République dont l’honorabilité peut être mis en doute a bavé sur les enseignants faisant baver de plaisir les populistes de tous crins. « On me dit qu’il n’y a pas assez de fonctionnaires dans l’Éducation nationale. Mais c’est d’une démagogie invraisemblable !», a éructé Nicolas Sarkozy sur BFM. « Le statut du professeur des écoles : c’est 24 heures par semaines, 6 mois de l’année. Eh oui ! Entre les vacances et les week-ends ! Je sais il faut préparer les cours… maternelle, grande section ». « Je sais qu’il faut corriger les copies et je sais que c’est un boulot difficile. Nous n’avons pas les moyens d’avoir 1 millions d’enseignants » Rappelons que les enseignants en France en 2024 ne sont qu’au nombre de 851 600. 

Cette sortie bien relayée sur les médias qui façonnent l’opinion dominante n’a pas manqué de faire réagir ce week-end férié. Déjà en 2008, Darcos ministre en titre, parlait des professeurs de maternelle  dont : « la fonction va être essentiellement de faire faire des siestes à des enfants ou de leur changer les couches ». il est toujours de bon ton de baver sur les professionnels responsables de l’accueil et de l’accompagnement vers le savoir dans l’enseignement primaire. C’est une constante dans l’histoire de la République. « Trop de vacances ! », « fainéants barbus et de gauche ! » ; « peu d’heures effectives de travail » : il fut une époque où les poncifs à caractère politique traversaient l’opinion publique. C’était une constante. « L’exemplaire Sarkozy » n’a donc rien inventé.

En fait les remarques concernent absolument tous les fonctionnaires, ces pelés, ces galeux qui ruinent le pays en étant totalement inutiles. Courteline avec « ses ronds de cuir » ou plus récemment les Chevaliers du Fiel avec leurs sketchs sur les employés municipaux ont construit leurs notoriété sur la caricature des employés de l’État ou des Collectivités territoriales. On en rit mais parfois il faut bien avouer que que les attaques sont beaucoup moins humoristiques.

Enseignant ? Mais diantre si la fonction est aussi confortable que cela pourquoi les critiqueurs n’ont-ils pas candidaté à un poste ? Il suffisait d’être candidat à 16 ans au concours d’entrée à l’école normale pour devenir instituteur et ensuite d’être affecté dans une classe maternelle ou élémentaire de Gironde ! Le paradis… selon ces contempteurs d’une fonction où l’on ne ferait pas grand-chose avec un salaire confortable. Ils ont deux solutions : ou ils ne voulaient pas et ils ne serait intéressant qu’ils en donnent les raisons ou ils ne pouvaient pas et leur déception est à la mesure de leurs critiques !

C’est tellement attractif pour les conditions de travail et surtout les salaires que année après année le nombre de candidat(e)s chute. Plus largement c’est toute la fonction publique dans tous les secteurs (santé, sécurité, justice, enseignement, secrétaires de mairie, militaires, employés territoriaux…) qui n’a plus d‘attractivité. D’après l’organisme France Stratégie 15 % des postes offerts aux concours de la fonction publique d’État ont été non pourvus en 2022, 21 % des lits de l’AP-HP fermés la même année, dont 70 % par manque de personnel, 64% des collectivités territoriales indiquant au moins un champ professionnel en tension en 2023. Ces quelques chiffres illustrent la crise que connaît la fonction publique.

Il n’y a plus en moyenne 4 candidat(e)s en moyenne sur un poste contre 8 à 12 antérieurement. Cette situation reflète une désaffection croissante pour les concours de la fonction publique, en particulier dans la fonction publique d’État qui recrute essentiellement par cette voie d’accès. Un nombre de candidats insuffisant pour satisfaire aux exigences des jurys − parfois même inférieur au nombre de places offertes − et des désistements de plus en plus nombreux d’admis à l’issue des épreuves de sélection expliquent un taux de couverture en net recul depuis plusieurs années

Cette crise est d’une nature et d’une ampleur inédite, et devrait se prolonger dans les années à venir. Les auteurs du rapport de France Stratégie éclairent de manière alarmante ces difficultés d’attractivité et leurs déterminants : » image, carrières, rémunérations, conditions de travail, en comparaison avec le secteur privé ». Autant de facteurs qui doivent être mobilisés conjointement comme leviers d’action pour reconstruire une réponse aux offres non pourvues.

La France comptait en 2022 5,7 millions d’agents publics, répartis dans trois « versants » : la fonction publique d’État (45 %), la fonction publique territoriale (34 %) et la fonction publique hospitalière (21 %). Entre 1991 et 2022, l’emploi salarié public a progressé de plus de… 25 % (augmentation de la population, application de normes d’encadrement, émergence de nouveaux besoins…) quand l’emploi salarié privé progressait lui de 32 %, avec une accélération ces dernières années.

La croissance de l’emploi public s’est ralentie depuis une quinzaine d’années et est désormais portée par celle des… contractuels dont le sort est incertain et les rémunérations faibles. La part de l’emploi public parmi l’ensemble des salariés a été relativement stable sur les trente dernières années, passant de 24 % au début des années 1990 à 22 % aujourd’hui alors que l’on entend tout le contraire dans les discussions politiques. Mais c’est électoralement rentable et médiatiquement exploitable.

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Cet article a 4 commentaires

  1. J.J.

    Et l’on n’évoque jamais les technocrates et hauts fonctionnaires, pantouflards à l’occasion, de Bercy par exemple, qui eux sont maintenus, malgré l’emploi des « agences de conseil », style Mac Machin », beaucoup plus performantes(?) et travaillant parfois même gratuitement(voir campagne présidentielle 2017). Ces honorables personnages bénéficient toujours, quelle que soit leur situation, des avantages inhérents à leurs fonctions, même quand ils ne les assument pas. Quant à leurs émoluments, leurs montants semblent inversement proportionnels à l’utilité de leur fonction.
    Pour ceux là, pas question de rationner la bonne soupe.

  2. faconjf

    Bonjour,
    la tempête qui va s’abattre sur les fonctionnaires se forme au pays de l’homme à la tronçonneuse, un an après l’arrivée de Javier Milei en argentine les économistes français ne tarissent pas d’éloges sur son bilan.
    « Un an après, en matière budgétaire, un assainissement des finances a été opéré et le solde public est passé au vert sur les 9 premiers mois de l’année. L’inflation mensuelle est tombée à 2,7%. C’est très élevé pour les standards européens, mais c’est le taux le plus bas depuis trois ans et la tendance est bonne. Tout un symbole : la fin du contrôle des loyers à Buenos Aires a entraîné un doublement de l’offre locative et a fait baisser le montant des loyers. Quant aux comptes extérieurs, ils sont rétablis et à nouveau en excédent. Le rebond de l’économie est aussi perceptible depuis le 2? trimestre et la croissance argentine devrait connaître un fort rebond en 2025 avec un PIB en hausse de 5% selon le FMI. Sur le papier, la copie rendue est parfaite, si ce n’est que ces bons résultats ont un coût social extraordinairement élevé.
    L’amélioration des comptes publics est indéniable mais elle s’explique en grande partie grâce à une véritable décapitation des dépenses publiques : plus de 33 000 emplois publics ont ainsi été supprimés en moins d’un an, et cela va continuer (la cible étant de 50 000). Mais c’est aussi une diminution drastique des dépenses sociales avec des coupes budgétaires dans l’éducation, la santé et les services sociaux. Vient également s’ajouter le gel des projets d’infrastructures et la suspension des chantiers publics avec, à la clé, des milliers d’emplois perdus dans la construction. Et la liste ne s’arrête pas là : la fin des subventions pour les transports et l’énergie entraîne des augmentations de coûts pour le consommateur, et c’est enfin la réduction des transferts fédéraux aux provinces. Résultat du passage de la tronçonneuse, la situation sociale s’est considérablement dégradée. Selon les standards du pays, le taux de pauvreté a grimpé de moins de 42% au second semestre 2023 à près de 53% sur les 6 premiers mois de 2024, soit plus de 1 sur 2. En un semestre, 5,2 millions d’Argentins auraient ainsi basculé dans la pauvreté.  » source https://www.xerficanal.com/economie/emission/Alexandre-Mirlicourtois-Argentine-massacre-a-la-tronconneuse-un-an-apres_3753452.html
    Nos éminents économistes de salon ne voient que le coté qui les arrangent et en profitent pour tirer sur le modèle social de notre pays jugé démagogique et clientéliste. Ils poussent ainsi la classe politique à utiliser la tronçonneuse, c’est ce que préconise le  » géant politique à talonnettes » Narkosy ( contraction de de son véritable nom Sarközy de Nagy-Bocsa).
    La logique déployée est la suivante:
    – Notre modèle social nous coûte beaucoup trop cher par rapport aux richesses produites et donc nous payons la différence par la dette.
    – D’autre part, il décourage tous les efforts. Aussi bien des “pauvres” qui ont de moins en moins intérêt à travailler préférant les aides sociales, que les riches dont les efforts ne sont plus récompensés puisqu’ils sont surtaxés.
    – Il faut réduire les dépenses de fonctionnement de l’État en supprimant les emplois de fonctionnaires à commencer par l’Éducation Nationale.
    C’est la chanson à la mode que les merdias vont tous reprendre en chœur comme le nouveau Gāyatrī mantra des gouvernements à venir.
    Devenir enseignant, un métier sous payé, déconsidéré et de fait dangereux, interrogez les jeunes autour de vous et vous constaterez comme moi du peu d’intérêt pour ce projet. Quel avenir pour une nation sans enseignants ?
    L’actualité rebondit sur les dangers du professorat ici en France dans le procès Paty et les évènements en Syrie .
    « J’ai décapité le prof, là je vais faire le djihad en France », avait envoyé le terroriste avec une photo de la tête tranchée de sa victime, à un compte Instagram ayant pour pseudonyme Dnevnik_71. « Allah Akbar ! Que la paix, la miséricorde et la bénédiction d’Allah soit sur toi », lui avait répondu ce dernier.
    Les investigations permettront d’identifier cet interlocuteur : Faruq Shami, un pseudo-journaliste qui est en réalité un djihadiste, membre actif de l’organisation HTS.
    L’enquête rapporte que cet homme était en contact avec de jeunes radicalisés en France. Il leur donnait des conseils sur la religion ou le djihad en utilisant des comptes Instagram anonymes. Selon le FBI, qui a partagé des informations avec la police française, les dernières connexions IP de son compte Instagram ont toutes borné à Idlib, bastion de HTS depuis 2017.
    Par ailleurs, un mois avant l’assassinat de Samuel Paty, Faruq Shami avait publié sur Facebook une vidéo appelant le président de la Tchétchénie, « à envoyer des frères en France » en marge de la republication des caricatures du prophète Mahomet par Charlie Hebdo.
    En fait Talonnettes Narkosy, qui vit aux crochets de la société, a raison!! moins de profs réduit d’autant les cibles pour les terroristes. Ce gribouille de la politique ne mérite rien de moins que la justice fasse (enfin!!) son travail de fonctionnaire c’est à dire défendre l’intérêt général et assurer le respect de la loi en matière pénale.
    Bonne journée

  3. Christian GUICHENEY

    Jean Marie,
    Je partage tout à fait ton texte et ces propos indignes d’un ancien président doivent être dénoncés. J’ai consulté les sites des 2 syndicats d’enseignants majoritaires du premier degré et sauf erreur de ma part, aucun communiqué d’indignation…
    Les temps ont bien changé….

  4. Philippe Labansat

    Pourtant, se faire chier dessus par tout le pays, journalistes, chroniqueurs, jusqu’aux politiques de presque tous bords, se faire payer à coups de pied au cul, voir les missions démantelées, ou au contraire largement étendues avec des effectifs qui fondent comme neige au soleil, tout ça devrait attirer…
    …au moins les masochistes…

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