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Les enfants oubliés sur les trottoirs

La rue mais aussi des squats, des bidonvilles, des carcasses d’automobiles ou des automobiles elles-mêmes servent de logement à des familles marginalisées par la loi, l’absence de logements accessibles ou par simplement la misère. Cette situation maintes fois dénoncée par les organisations de solidarité a toujours déclenché un commentaire facile : nous allons agir ! Le problème de l’enfance en difficulté dans un pays signataire de tous les textes relatifs à la défense et la protection de l’avenir de notre société, reste posé. Si les Départements au prix d’énormes efforts financiers tentent de répondre à des placements par la justice ou les services sociaux de plus en plus nombreux, l’État suave les apparences en esquivant le plus souvent possible sa responsabilité.

L’UNICEF France et la Fédération des acteurs de la solidarité révèlent, dans leur 6ème baromètre, une augmentation alarmante du nombre d’enfants sans abri, malgré les alertes répétées et les recommandations formulées, loin d’être suivies. L’incertitude du contexte politique fait craindre une dégradation de la situation et la cure d’austérité qui s’annonce n’incite guère à l’optimisme. Selon l’étude récemment publiée au moins 2 043 enfants étaient sans solution d’hébergement dans la nuit du 19 août dernier, soit une hausse de 120 % par rapport à 2020. Parmi eux, 467 ont moins de trois ans. Si ces chiffres illustrent une situation dramatique il ne sont vraiment pas exagérés car il faudrait aussi prendre en compte les mineurs non accompagnés  sans-abri et les familles vivant en squats ou en bidonvilles.

Le système d’hébergement est embolisé. Un système de tri s’est mis en place et les personnes les plus vulnérables, telles que les femmes enceintes ou les jeunes enfants, ne peuvent plus bénéficier d’un accueil dans certains territoires. Les difficultés financières des départements liées à la déstructuration de leurs recettes fiscales aggravent partout cette situation. En fait ils ont à assumer « l’aide sociale à l’enfance » alors que l’État se charge en principe de « la protection de l’enfance ». La complexité de cette répartition des rôles conduit à des dysfonctionnements basés sur le manque de moyens. Ainsi si l’État évalue le nombre de dossier traités à 380 500 mesures ce qui est très en-deçà de la situation réelle il explique qu’il confie 208 000 enfants à l’aide sociale à l’enfance dans 1 963 établissements dans lequel il ne met pas un euro  directement ! Les familles d’accueil se raréfient. Les situations psychologiques s’aggravent. Les places dans les lieus spécialisés manquent. 

Les auteurs de l’étude tentent d’expliquer que ne pas agir pour protéger ces enfants c’est pénaliser leur avenir et donc aggraver le coût ultérieur de leur prise en charge en raison de problèmes de santé ou de comportement social. Ainsi, 28 659 enfants étaient hébergés en hôtel dans la nuit du 19 au 20 août 2024. Malheureusement, en raison des nombreux obstacles rencontrés pour accéder à un logement stable, de nombreuses familles passent plusieurs années dans ces conditions. En Île-de-France, en 2023, les personnes hébergées en hôtel y résident en moyenne 44 mois. Cette situation est contraire à absolument toutes les conventions internationales mais… ces dernières ne sont-elles pas faites pour ne jamais être respectées !

La France s’enfonce inexorablement dans l’insécurité sociale. La pire des situations car elle pénalise les plus démunis, les plus faibles, les plus fragiles. Elle oublie ses devoirs républicains d’accueil et de protection.  Pas de places dans les établissements médico-sociaux spécialisés, pas de perspectives éducatives réelles pour des milliers enfants délaissés par leurs familles (drogue, alcoolisme mondain ou privé, drogue, indifférence, absence d’éducation, misère matérielle et culturelle); pénurie croissante de logements, montée affolante de toutes les violences : la situation s’aggrave de jour en jour.  L’abandon d’une solidarité réelle via des contributions justes et pérennes aux prises en charge des services publics se paiera très, très cher. L’aggravation de la pauvreté qui frappe cinq millions de personnes en France, la crise sanitaire de 2020 suivie de deux années de forte inflation frappent durement les plus modestes. Les milieux populaires, les chômeurs, les familles monoparentales, les immigrés sont les plus touchés.

Pendant ce temps à l’Assemblée nationale on parle de censure. Pendant ce temps on suppute sur les attributaires de postes ministériels. Pendant ce temps celles et ceux qui le peuvent virent leurs bénéfices potentiellement taxables dans les paradis peu regardant au cas où. Pendant ce temps les éternels ambitieux se voient horlogers en chef à la place du détraqueur des horloges institutionnelles. Pendant ce temps des enfants cauchemardent sur les trottoirs, des enfants survivent au jour le jour, des enfants pleurent avec le ciel qui ne les épargne pas. Et ce n’est pas à Manille ou à Bogota…

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Cet article a 5 commentaires

  1. J.J.

    Est ce que MM Wauquiez, Retailleau, Larcher, que l’on voyait hier parader fièrement sur les étranges lucarnes, ayant l’air de se croire d’importants personnages, ont un avis sur cette question ?

    Est ce que l’on a également un avis cette question de la part du pâtre des montagnes et du centurion des clepsydres ?

    C’est pourtant dans leurs attributions non ?

  2. François

    Bonjour J-M !
    « Les enfants oubliés … sur les trottoirs »
    Certes, en cette période de rentrée, après la joie des Jeux RÉUSSIS (Ouf!) qui se terminent et la cacophonie politique, voici un titre accrocheur qui a une résonance Cnews, BFMTV et autres, ce qui me surprend de ta part. Oui, tu m’obliges à penser au « marronnier » que l’on peut aussi qualifier de fait divers …de société ! !
    J’approuve à 100 % ta description consternante en 2024 qui, bien sûr, demande une solution avant l’hiver. Juste une question à te poser (tu t’en doutes!) à toi, l’instit-ancien maire : comment peut-on gonfler les effectifs scolaires avec ces cas déplorables sans apporter de solution logement ? Subsidiairement, comment garnit-on la case adresse d’un dossier scolaire ? En mettant « quai de Brazza, trottoir côtéGaronne, 4ième abri de cartons » ? Rien de traumatisant pour personne n’est-ce pas ?
    En quarante-cinq ans d’antenne communale sociale agricole complétée par du CCAS, je n’ai pas connu de cas similaire mais la période alors faste et lumineuse est en train de s’assombrir !
    Malgré le réchauffement climatique, la solution camping-toile ne peut point être pérenne ! Donc quelles solutions … qui ne soient pas des « cataplasmes sur jambe de bois » comme souvent ?
    Même si je suis certain qu’il existe encore quelques solutions en dur, il faut reconnaître une certaine frilosité des loueurs quand on voit l’état des logements en sortie : les détériorations qui n’ont rien d’usagères nécessitent plus d’€ qu’une simple peinture ! ! Même dans notre campagne, les portes se ferment … parfois après avoir (dernièrement) occasionné des incendies colatéraux ! ! !
    Mais revenons aux enfants de la rue et … aux parents.
    Tout d’abord, n’oublions pas que certains, issus de communautés étrangères (tu mettras le mot qui te plaît ! ) ne font que reproduire leur mode de vie … sous un « soleil plus clément » et que, comme disait un certain Rocard, « nous ne pouvons pas accueillir toute la misère du Monde » … et la remodeler !
    Ardent défenseur de la Prévention, je suis certain que la solution est dans ce cadre comme pour beaucoup de maux. Le manque d’autorité parentale et éducative entraîne l’oisiveté qui est toujours mère de délinquance, trafics et autres larcins. Quand la démission pour x raisons devient la règle, le péril du déclin pointe vite sa présence. Toi, le tolérant, tu vas trouver ma solution extrémiste mais la délivrance d’un permis de parentalité devra être légiférer utilement ! Il ne faut pas toujours considérer l’Humain en devenir comme un potentiel électeur ! Que sont devenus les patros (sous x étiquettes), les clubs de sport même réactivés temporairement par les J.O. ? Les clubs de jeunes ? Et les VRAIS ÉDUCATEURS conventionnés ( nous en avons déjà causé et déploré !) ?
    Tous ces motifs, bien que semblant éloignés, sont en réalité très liés et ne sont que la trame du fait désolant que tu relèves. Il ne faut pas les ignorer en se retranchant derrière des idéologies désuètes qui ont amené cette triste situation.
    Bien amicalement

  3. Michel Caron

    jean Marie a raison de parler de l’accroissement de l’insécurité sociale,et de la situation alarmante de la partie la plus vulnèrable de notre jeunesse. La pauvreté est un des principaux facteur de VULNERABILITE qui touche une partie importante de notre société. Il est vrai aussi,et très regrettable,que la question de la protection de l’enfance ne semble guère motiver nos parlementaires et les formations politiques dont ils sont issus. La France n’est pas à la hauteur de ses engagements internationaux en matière de respect des doits de l’enfant.
    Certes,les départements ont ils des difficultés à faire évoluer leur budget social à la hauteur des besoins de nos compatriotes;mais je pense qu’il est désormais GRAND TEMPS que l’Etat et l’assemblée des départements de France décident de procèder à une REFONDATION de la politique de protection et d’aide sociale à l’enfance;et ces deux acteurs institutionnels seraient bien inspirés d’ouvrir ce grand chantier en y intègrant le mouvement associatif expérimenté et compétent en la matière.
    J’affirme ici que les formations politiques qui se réclament du font républicain quand il s’agit d’empêcher l’extrême droite d’arriver au pouvoir,gagneraient en crédibilité à PROPOSER ENSEMBLE au nouveau Premier Ministre ,d’ouvrir ce chantier prioritaire avant l’hiver. Ainsi,l’Etat,les départements et les associations compétentes pourraient redonner des moyens et du sens aux ENGAGEMENTS RÉCIPROQUES qu’ils prendraient à l’égard de la partie la plus vulnèrable de notre jeunesse ;c’est là une belle occasion de rassembler les énergies et de mobiliser les initiatives dans une convergence encourageante des formations politiques qui trouveraient là l’occasion d’aller au delà de leur tactique à court terme et de leur tendance au sectarisme. Et ainsi,une lueur pourrait se lever dans un Climat de crise de confiance des Français à l’égard des responsables politiques. Ce chantier conduirait utilement aussi à l’opportunité de reformuler notre conception de la Protection Sociale précisément par une nouvelle approche des multiples formes de vulnérabilité qui appellent une grande politique de solidarité.
    Contre la tentation du désespoir et de la colère muette ou bruyante,je veux croire – et je PARIE comme Pascal- que c’est possible de porter avec force et vigueur cette GRANDE AMBITION SOCIALE.

  4. facon jf

    Bonjour,
    ici dans la merveilleuse région Aura, dirigée jusqu’à peu par le très catholique Wauquiez, tout va bien. A preuve ce témoignage:
     » Cette fois, c’est 11 jours… Ce vendredi 16 août, le Samu Social, à Lyon, a laissé à la rue un nouveau-né de 11 jours. Ce soir, je pense à toi, tout petit être. Je me demande ce que c’est que de découvrir la rue depuis le bitume, dans la chaleur et les bras d’une mère qui ira puiser dans son cœur les forces qu’elle n’a pas encore retrouvées pour t’envelopper et t’aimer. […] Dans une autre vie, tes grands-parents se seraient précipités pour t’admirer 1000 fois et te répéter combien tu es beau. Normalement, tu sais, tout petit être, on dort dans un lit et ce n’est pas le Samu Social qui vient te rencontrer. Tout petit être, j’ai tellement honte de l’accueil qu’on te réserve sur cette terre. Ce sont des histoires d’argent et de politique, des gens qui décident que ça coûte trop cher que tout le monde soit logé. Mais sache-le tout de suite, c’est possible de faire autrement. Alors c’est pour ça qu’on bataille, de toutes nos forces. » Maud Bigot
    Directrice opérationnelle du Samu Social 69
    https://actu.fr/auvergne-rhone-alpes/lyon_69123/lyon-des-bebes-de-5-et-11-jours-dorment-a-la-rue-le-choc-terrible-j-ai-honte_61508291.html
    Suite à la réprobation générale, ce vendredi 30 août, le président de la Métropole de Lyon, Bruno Bernard (EELV), a annoncé la reprise, à compter de ce jour, de la mise à l’abri de femmes sans-abri, avec un enfant de moins de trois ans.
    Mi-juillet dernier, la Métropole avait cessé ses prises en charge. Après un mois et demi de tensions, il annonce un retour à cette compétence, avec une contrainte supplémentaire : seules les personnes « liées à notre territoire » seront hébergées. « Le reste, on arrête. On ne peut pas pallier les manques des départements voisins », marque Bruno Bernard, dans son très chic bureau du 20 rue du Lac à Lyon.
    Donc si je comprends bien il va falloir trier les personnes « liées à notre territoire » des autres nécessiteux « non liées à notre territoire ». Un numéro tatoué sur l’avant bras des nourrissons sera-t-il la solution retenue???
    Bon dimanche

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