A qui le tour maintenant ?

Quelles seront les réactions européennes après les législatives de juin 2027 lorsque le nombre de députés du RN dépassera celui de Geert Wilders auxPays-Bas ? En fait l’émoi causé par la « victoire » de ce populiste outrancier, raciste et déglingué n’a pas été analysé de manière très sereine. Le système électoral hollandais de la proportionnelle intégrale mérite une approche du résultat bien différente de celle que les médias ont propagée sans la moindre réflexion raisonnable.

Ainsi ce qui est présenté comme un « exploit » de plus de 20 ans de diffusion de la haine et de la xénophobie ne représente que 25 % de la Chambre basse. Si le même scrutin s’était déroulé en France sur les bases de la proportionnelle aux dernières législatives le RN aurait eu avec 18 % des suffrages exprimés la bagatelle de 102 députés soit proportionnellement un résultat supérieur aux 89 obtenus au second tour. Les deux situations ont un point commun : il est impossible de gouverner seul. Et c’est là que se situe la réalité. Partout où le populisme parvient au pouvoir il ne peut le faire sans des complicités… du reste du monde politique.

C’est le cas partout sauf en Hongrie. En Italie, en Slovaquie, en Lettonie, en Suède, en Finlande

les partis réputés « traditionnels » de droite voire de centre gauche ont mis leur mouchoir éthique dans leur poche pour s’allier avec des populistes bon teint. Il est à peu près certain qu’en France le vote des législatives ne donnera pas de majorité absolue au RN au sein de l’assemblée nationale. Tout cependant n’est qu’une question de marchandage et de capacité des « achetables » sur le marché à rejoindre le camp de l’extrême droite.

Chez les Bataves Wilders à la tête d’un parti ne comptant que sa personne a bâti une stratégie purement marketing. Il accorde des labels, des étiquettes en autorisant les candidats à se parer de son soutien et à porter l’enseigne de son parti. Ainsi il a détruit les forces traditionnelles qu’il n’a cessé de vilipender ou de dénigrer. Son score tient à cette haine tous azimuts qu’il n’a cessé de déverser depuis des années. On voit donc difficilement ceux qu’il a humilié venir lui prêter main forte.

Il ne faut pas oublier que les trois entités de gouvernement battues représentent environ 70 sièges et qu’il y a environ douze autres partis politiques qui se répartissent une quarantaine de sièges. Donc les jeux ne sont pas faits. Il va y avoir une sorte de cordon sanitaire qui sera mis pour éviter que l’extrême droite n’arrive au pouvoir mais les dégâts sont irrémédiables. La mise en cause du fonctionnement européen que les Hollandais avait concrétisé par un rejet du traité constitutionnel en 2005 comme les Français a prospéré. Le non-respect de la volonté populaire et non populiste pèse depuis des années sur les scrutins dans bon nombre de membres de l’UE.

Le fonctionnement actuel de l’Europe basé sur un ultra-libéralisme intégriste et sur le seul dogme de la croissance via la consommation sombre sous les coups de boutoir d’un populisme exploitant le désarroi des classes sociales victimes du monde du profit. Partout la gauche qui représentait un espoir de changement se fait tailler des croupières car elle a renoncé à ses valeurs. La démocratie-sociale n’est plus audible coincée entre des discours extrémistes s’entretenant l’un l’autre.

Aux abois les gouvernements en place tentent de prêcher le « rassemblement national », « l’union sacrée » ou le « front commun » à la manière de celui qui après avoir crié au feu alors qu’il n’était pas réel se retrouve face à un incendie qui gagne sans cesse du terrain. En Espagne, au Portugal la situation se précarise. En France beaucoup d’élus locaux de droite commencent à préparer leur enrôlement dans l’équipage de la Marine nationale. L’exploitation de l’exaspération croissante facilite ce recrutement qui passera par les municipales de 2026.

Je suis de ceux qui pensent que le rouleau compresseur des valeurs fondatrices du vivre ensemble sont laminées chaque jour un peu plus par le discrédit croissant pesant sur les forces politiques passées et présentes. Les querelles strictement politiciennes, les prises de position débridées ou électoralistes accentuent le climat délétère actuel. Rien ne s’améliorera dans les mois qui viennent. Aura-t-on par exemple un autre débat que celui manichéen d’être pro ou anti-européen ? Aura-t-on une proposition d’un autre Traité européen permettant de croire dans l’UE ? Le doute est permis.

En attendant une seule question réaliste se pose : à qui le tour dans les pays du vieux continent ?

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