Les repas improvisés ou largement ouvert à toutes les personnes heureuses de le partager ont longtemps rythmé le vie sociale rurale. La fin des moissons ou en cette période la gerbaude offerte aux équipes des vendanges et des chais constituaient des moments attendus pour conforter le lien social. Rien ne relevait d’une organisation officielle avec un protocole bien réglé. Parfois quelques mesures de crincrin ou chez les Italiens d’accordéon terminaient une soirée généralement bien arrosée. Cette tradition se perd avec la nouvelle donne en matière d’agriculture.
La mécanisation des récoltes a peu à peu rendu la vie des propriétés très peu tournée vers l’extérieur. En plus le contexte actuel sur l’usage des pesticides et autres produits nocifs a durci les relations de voisinage rendant les conflits fréquents et même violents. Pour les collectes de céréales ou de foin il n’y a plus d’entraide manuelle et donc de nécessité de remerciements sous forme conviviale. Le retour des vendanges à la main a pourtant redonné son sens aux agapes de fin de récolte. Quelques grands châteaux du Bordelais et des propriétaires sensibles à la fidélité de leurs troupes « familiales » ou « amicales » maintiennent un rendez-vous terminant la saison de la viticulture.
Sous un hangar, dans une cuverie, dans la salle de réception les convives finissent de souder la solidarité acquise dans un travail collectif fatiguant et exigeant. Cette ambiance de fête païenne autour des premiers écoulements mais aussi de quelques bouteilles empruntées au stock des années antérieure appartenait aux moments privilégiés du monde rural. Ils restaient comme des repères mémoriels au même titre que la clôture de la cuisine du cochon. Tout rendez-vous offrant une perspective heureuse méritait des retrouvailles joyeuses.
Dans toutes les situations il était fait appel aux ressources propres. La diminution des boites serties de pâtés, le sacrifice des poulets, l’ouverture massive des confits de porc ou maintenant les gibiers stockés au congélateur, les plâtrées de riz au lait : la simplicité des mets allait de pair avec la qualité de l’accueil. L’essentiel était que les ventres soient pleins de telle manière que la réputation des organisateurs soit préservée. Les seules étoiles étaient celles que les nuages laissaient filtrer mais ne s’étalaient pas dans des guides. N’empêche que dans les villages on connaissait très bien els bonnes adresses.
Ces événements manquent et leur disparition reflètent une mutation sociale dans la ruralité qui conduit au repli sur soi, aux affrontement entre néo-ruraux et « ancrés » sur le territoire. On ne se fait plus confiance. Les repas destinés à rassembler ne séduisent plus comme avant la crise. Les salles des fêtes sonnent creux si la proposition effectuée n’a pas un caractère extraordinaire. Il faut bien reconnaître que souvent ce sont… les chasseurs qui parviennent le mieux à attirer les convives. La prolifération des sangliers favorise ces soirées en offrant des rôtis, des cuissot ou des cotes grillées.
J’aime bien ces repas à la fortune du pot ou du rôt ! Lorsque les différences de statut s’estompent il me semble toujours que je suis enfin dans un contexte qui me convient. Le principe de l’auberge espagnole renforce la sensation de co-construction d’un temps fort de l’amitié. Hier dans une grange encombrée d’un bric-à-brac hétéroclite autour d’une table improvisée presque une douzaine d’invités ont puisé dans des bocaux de pâtés faits maison, dans des plats de lambeaux cuisinés de « cochon sauvage », une marmite de flageolets et des fromages divers. Tout fut à rosé et celles et ceux qui voyaient rouge, les flacons circulèrent sans entrave. Rien d’exagéré mais un vrai échange.
La table restera le meilleur espace de convivialité. Elle n’a pas besoin d’être sophistiquée pour être vraiment profitable. La sincérité, l’indulgence, la tolérance, l’estime et parfois l’amitié dépassant les statuts transforment ce qui est considéré comme ordinaire en repas de rois. Ces moments deviennent essentiels mais se raréfient tant le climat est à la défiance, à la susceptibilité mal placée, à la fracture sociale causée par des à priori calamiteux. Au fait comment vote-t-on dans les zones rurales ?
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5 convives et 5 bouteilles voilà un repas convivial…
@ à mon ami Philippe
Une bouteille par convive ! La maison ne recule devant aucun sacrifice…
Depuis quelques jours, pour être bien arrosée… la Gironde est bien arrosée… !
Excellent pour les cèpes qui accompagneront un beau et bon morceau d’entrecôte… Vive l’automne !
Et laissons de côté un sujet qui fâche… le vote dans les zones rurales… Car on sait bien, hélas, qu’il ne se cantonne pas uniquement là !
Pour revenir à un commentaire plus joyeux…
« Tout fut à rosé… » personnellement, j’ai la bouteille qui penche… pour des rouges Médoc, Saint-Émilion, Graves…
Si j’ai, moi aussi, bouffé du curé, une peinture n’a cessé de m’interpeller: « L’Angélus », scène de la vie paysanne autrefois grâce à laquelle on connait Jean-François Millet. Pourquoi je vous dis ça? Parce qu’il est un château à Saint-Emilion qui s’appelle ainsi et dont la renommée a franchi les frontières. Mais ce qu’on ne sait pas, c’est qu’à portée d’un jet de sulfateuse du prestigieux domaine il existe un « petit » château où sont cultivées toutes les traditions évoquées par Jean-Marie. Retenez bien son nom: Château Rochebelle. Le propriétaire se nomme Philippe Faniest, créateur du petit train qui zigzague dans les vignobles alentour toute l’année. Allez y voir ou jetez déjà un oeil sur son site! Philippe, ancien footballeur (Girondins et Pingouins), saura vous accueillir et vous parler autour de la table d’une tradition qu’il entretient avec un soin jaloux. C’est aussi mon ami, celui de Jean-Marie itou. Salud y fuerza al corazon!
@ à mon ami christian
Merci pour ce tuyau qui n’est pas percé (il faut toujours faire confiance aux vrais amis… !). Les bons tuyaux se partagent et se dégustent entre bons amis et bonnes amies !
Bravo Christian pour ton espagnol ! Mais comme je suis restée prof… ¡ Salud y fuerza al corazón ! N’oublie pas de passer au clavier espagnol. Ah! Ah! Ah!
Avec un clavier Azerty (et un clavier Azerty en vaut deux ) ¡ : alt 173. ¡ Olé !
à J.J.
¡ Qué bien !
@Christian À propos d’Angélus et de repas conviviaux, chez les orthodoxes, on mange à la fortune du pope. Bon, j’arête …
@ à J.J.
Tu fais bien car… gare aux arrêtes !
Jean-Marie, les associations rurales se reconnaîtront en lisant ton paragraphe au sujet des repas qui doivent maintenant être « motivés »: « Les salles des fêtes sonnent creux si la proposition effectuées n’a pas un caractère extraordinaire ».
Avant, on écrivait sur une affiche le nom de l’assoc. organisatrice, le lieu du repas, la date et l’heure, le prix, et le jour dit les convives se présentaient en nombre…
Maintenant il faut ajouter: entrecôte, choucroute, couscous, méchoui, châtaignes et bourru, ou « au profit de… », et j’en passe…! Et que le quotidien local accepte de passer l’annonce plusieurs fois. Et même avec tout ça, on est souvent loin de « faire le plein ».
Nous tous, membre des assocs., connaissons ce problème.
Ce qui semble réunir le plus de monde maintenant, ce sont les « tablées » ou marchés nocturnes…Pourquoi pas? Mais l’hiver???