Il faudrait des heures et des heures de pédagogie citoyenne pour que les électrices et les électeurs puissent être en mesure de décoder les « annonces » politiques. L’outrancière simplification médiatique découlant de la frénésie continuelle de restriction de l’usage du temps de parole ou d’image condamne bien évidemment la plus grande majorité des gens à des appréciations sommaires, globales et désastreuses. Mieux celle ou celui qui tente d’expliquer, d’analyser, d’informer se fait immédiatement traité (c’est mon cas!) « d’instituteur » casse-pied ! Il faut faire du lapidaire, du sommaire, du condensé et surtout ne pas critiquer ! La société des apparences et des effets spéciaux n’en finit plus de se discréditer par ses outrances, ses polémiques superficielles et surtout son manque absolu de culture citoyenne !
Chaque heure tombe une pseudo « information » sortie d son contexte et donc forcément facile à « avaler »… Répétée sans cesse elle devient une certitude que toutes les explications ultérieures n’effaceront jamais. Tous les gouvernements se servent de ce constat pour tenter d’apaiser l’opinion publique ou de lui redonner un espoir. Ainsi les Ministres réfléchissent à des mesures pour aménager la taxe d’habitation afin de diminuer l’effort fiscal demandé aux foyers les plus modestes. Cette déclaration du nouveau responsable du budget paraît aller dans le bon sens et donc elle sera louée par les contribuables soumis à cette taxe. Il faut alors rappeler que sur une commune comme Créon 28 % des foyers sont déjà totalement exonérés de la TH pour diverses raisons (âge, précarité, revenus…) et que dans certaines villes le pourcentage est beaucoup plus élevé.
La précision importante c’est que ces exonérations accordées par la loi des finances sont jusqu’à maintenant…compensées par l’État et donc les communes qui sont désormais les seules destinataires du produit ne sont pas lésées. Il faut donc vite rassurer tout le monde : l’annonce coûtera plus cher au budget de l’État alors que ce dernier annonce qu’il va diminuer ses dotations aux collectivités locales ! « L’ampleur de la mesure, les cibles concernées, la méthode en détail, il est trop tôt pour en parler », a estimé Christian Eckert, qui a néanmoins confirmé que le montant alloué à cette mesure en 2014 serait d’au moins 500 millions d’euros mais certaines informations de presse évoquent un coût qui pourrait atteindre le double ! Un effet de seuil va encore être très mal vécu alors que le principe même de « l’impôt juste » c’est la progressivité ! Il ne devrait donc ne pas y avoir d’exonération mais une contribution plancher à la vie collective et adossée à un système de lié aux revenus mais pas sur le principe actuel du « rien » et du « tout ». Dans un même ensemble immobilier dans deux appartements absolument identiques, sur le même pallier on a ainsi une personne âgée seule qui ne va rien payer et un jeune couple qui sera imposé plein pot ! Ont-ils des revenus si différents ?
La fiscalité locale est à cet égard totalement obsolète. Elle repose sur le fait que la propriété constitue un signe évident de richesse alors que souvent elle conduit à un appauvrissement plus ou moins durable (crédit, frais accru de déplacement, charges générales). En fait si l’on considère que la pression est trop forte elle l’est beaucoup plus pour les « propriétaires » que pour les autres. Ils ont en effet à acquitter la taxe d’habitation, la taxe sur le foncier bâti, la taxe d’enlèvement des ordures ménagères sur la base de la « valeur locative » de leur habitation. Avant de construire ou d’accéder à la propriété il faut savoir que les charges vont forcément augmenter. Une vraie réforme moderne consisterait non pas à faire varier le curseur des exonérations mais à définir un « impôt spécifique progressif identifié » pour chaque niveau de collectivité : une taxe dite communale, une taxe départementale, une taxe régionale. Aucune autre structure ne devrait percevoir directement un produit dont elle fixerait le montant. Ce serait un vrai choc de transparence et de simplification. Bien évidemment la seule référence serait celle du montant des revenus bruts (c’est à dire sans aucune des réductions actuelles) sur lesquels on appliquerait un pourcentage défini localement, départementalement et régionalement. Plus d’exonération, plus de surfaces de bâti à calculer et à évaluer, plus d’inégalités criardes d’une commune à l’autre, plus de dissimulation de la responsabilité des élus, plus de taxe d’habitation, de taxe sur le foncier bâti, plus de taxe sur le foncier non bâti.
Par ailleurs tous les services (eau, assainissement, déchets) seraient financés par la consommation sur la base de la taxe incitative (part fixe dite abonnement pour les frais structurels et modulation selon la consommation) et ils seraient gérés par des agences déconnectées de la gestion locale. Bref il faut cesser de faire du rapiéçage permanent d’un système à bout de souffle, boursouflé par les textes, les apparences et qui ne correspond plus à rien de sérieux et d’équitable. Mais je ne verrai jamais un gouvernement mettre en chantier un tel projet… ou même de le faire étudier. Tout le monde à intérêt à ce que ce soit complexe, illisible et injuste !
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« la taxe d’enlèvement des ordures ménagères sur la base de la « valeur locative » de leur habitation » n’est pas seulement payée par les propriétaires, je peux t’assurer par expérience que les locataires n’en sont pas exemptés(les propriétaires font l’avance mais ils ont toute latitude pour en récupérer le montant auprès de leurs locataires).