Être le fils ou la fille de… n’a jamais été une sinécure. Il est même très pénible parfois de porter le nom de celle ou celui qui a acquis une certaine notoriété ou jour un rôle dans la société. Cette situation ingrate et stressante devient pesante dès qu’il faut se confronter aux autres. Il faut persuader les autres que vous êtes vous-même sans renier votre ascendance. Un joli numéro d’équilibriste que souvent les enfants ont beaucoup de monde à mener à terme. Construire sa vie publique ou professionnelle sans mimétisme avec ceux qui vous ont accompagné constitue souvent le souci des jeunes alors que l’on parle souvent autour de vous de succession. Dans le fond le souhait le plus répandu des adultes réside dans leur envie de voir leur progéniture s’inscrire dans la continuité. Et c’est à la fois un défi et une facilité pour leurs choix de carrière.
La fille de celui qui occupe en comptant les jours Matignon a mis en lumière ce dilemme permanent. En révélant, sans lui en parler l’agression dont elle avait été victime dans un livre publié hier Hélène Perlant, l’aîné du Béarnais qui n’a rien vu, rien entendu et surtout rien dit a mis en évidence cette difficulté à exister par rapport à l’image paternelle. « Je suis restée trente ans dans le silence avant de me confier à mon premier mari. » Un silence qu’elle a expliqué : « Mon père, j’ai peut-être voulu le protéger, inconsciemment, je pense, des coups politiques qu’il se prenait localement. » Ces confessions (c’est normal pour Bétharam) sont pour moi émouvantes. Elles traduisent les difficultés de positionnement de celles et ceux tentent de se construire sans causer le moindre tort à leurs parents.
Cette professeure agrégée de Français (comme son père), professeur dans un lycée bordelais n’a jamais souhaité en dehors de son métier s’inscrire dans la continuité. Elle avoue avoir porté le nom « Bayrou » avec bien des difficultés. Elle a même décidé de s’en débarrasser pour prendre le patronyme de sa mère. « Ça été ma liberté, pour ne plus être confondue avec mon père. “Ah ! Elle, c’est la petite Bayrou !” J’ai été exposée longtemps, parfois même aux insultes lorsqu’il s’agissait d’adversaires politiques, persuadés que la petite fille aussi était solide. » Bien d’autres « fils ou fille de… » effectueraient le même témoignage. Son livre est donc avant tout l’affirmation de sa différence et de… son existence.
Les accusations sur la réussite des enfants d’une personne « connue » naissent très vite. Pistonnés, favorisés ou recommandés : ils ne peuvent pas se rassurer que leur statut car il règne toujours un doute sur leur réussite. La suspicion demeure sur leur parcours. On le ressent très vite. Quelle que soit la vérité elle n’est pas admise. L’appréciation qui est portée sur le parcours est souvent similaire à celle que l’on porte sur une héritière. Il est vrai que dans une certaine société tournée vers le profit ou l’économie cette pratique se pratique sans gêne et sans critiques. Si tout n’est pas faux dans ce type d’accusations, la généralisation blesse bien des familles.
Depuis quelque temps, le fils de Nicolas Sarkozy se lance dans la politique. Il est apparu sur les plateaux de télé donnant son avis sur tout et s’inscrivant dans le cirque médiatique préparatif aux &élections municipales. Il paraît en effet qu’il débuterait sa carrière à Menton « Ehpad de luxe sous ciel d’Azur ». Voici un rejeton qui tente de dépasser son papa sous bracelet et il ne lésine pas sur les éléments de langage » similaires à ceux de papa. Fiston souhaite ne pas être un héritier mais entrer dans la catégorie des conquérants. Pour sa part il ne changera pas de nom… Soyez-en sûrs !C’est pourtant assez rare car souvent dans le domaine de la politique, les attaques subies par les parents détournent les enfants de ce chemin difficile.
La remarque « tel père… telle mère…tel fils…ou telle fille » reste difficile à digérer pour les descendants qui tentent souvent d’exister face à l’adversité que fait naitre leur apparition dans la vie sociale. Les paroles blessantes pleuvent : « il (elle) ne vaut pas sa mère (ou son père)… » ; « elle (il) ne serait pas là sans son père (ou sa mère)… » ; « elle (il) est intouchable car il (elle) est protégé(e).. ». Il arrive que des enfants craquent face à cette pluie de considérations leur déniant la possibilité de mériter ce qu’ils ont atteint. Le pire c’est quand la pression a été mise contre l’avis « de la fille ou du fils de… » par les parents eux-mêmes et qu’il ya un échec au bout du chemin. J’en ai croisé personnellement quelques-uns.
J’ignore ce que vaut l’ouvrage d’Hélène Perlant et je ne le lirai pas pour connaître les agissements scandaleux qu’elle a vécus mais pour découvrir la manière douloureuse dont elle a traversé sa vie de « fille de.. ; » Quand elle écrit : Vous avez 14 ans. Je précise le contexte : vous aviez perturbé, l’année précédente, la préparation à la communion solennelle supervisée par une bonne sœur, avec qui l’abbé s’affiche ostensiblement… Ces deux-là m’avaient à l’œil ! Elle avait quelque chose de sadique, de très malveillant, une vraie méchante, qui a voulu se venger. Lui m’avait déjà lancé : “Toi, la fille Bayrou, insolente comme ton père ! (…) », on comprend mieux la réalité !
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Je ne m’étais pas rendu compte de ma chance, je suis le fils de Personne(officiellement).
Bonjour,
en écho à @JJ résonne la chanson fils de personne rock âpre, dur, revanchard, sur des paroles signées Philippe Labro, invective les « fils de quelqu’un » dont à chaque refrain se démarque Johnny Hallyday vociférant qu’il n’est pas né d’un père « militaire, milliardaire, fonctionnaire », sous entendant qu’il ne doit sa réussite à personne.
Pour ma part je suis aussi fils de personne , en considérant qu’être le fils de quelqu’un de connu ou fortuné est une référence ou un boulet à traîner.
Dans le cas présent nous sommes en plein conflit de loyauté. Le conflit de loyauté est un sentiment ressenti par l’enfant lorsqu’il a l’impression qu’il est contraint de prendre parti pour l’un de ses parents à l’occasion d’un conflit parental ou lorsqu’il est contraint de faire un choix ou qu’on lui demande de cautionner ou non un comportement.
Se pose aussi le problème de la parole de l’enfant et de sa reconnaissance dans les milieux dits « chrétiens traditionalistes ». Un milieu « bourgeois » au sens péjoratif – Le terme « bourgeois » désigne aussi de manière péjorative, un individu superficiel, sans distinction ni originalité, ayant des goûts vulgaires, qui est conformiste et fait passer le matériel et l’argent avant le beau et le raffiné.-. Un milieu où la parole de l’enfant recevait plus de claques que d’écoute.
Dans un tel milieu sourd et aveugle à la vie de ses propres enfants le paraître est plus important que l’être, comment se forger une juste représentation de la vraie vie avec des « culs de bouteilles » en guise de lunettes? C’est souvent dans la rupture et l’évasion que la guérison d’une jeunesse amputée de la vérité du monde s’opère. La reproduction à l’identique des conformistes ou traditionalistes se réalise souvent peuplant ainsi les bancs des écoles militaires, de santé ou de l’ENA. Le diplôme marquant et démarquant les zélites du peuple des gueux. L’empreinte des traditionalistes à profondément marqué la justice de notre pays édifiant ainsi des barrières dans la reconnaissance de la voix des enfants ou du droit à mourir dans la dignité.
Le Béarniais est l’illustre descendant de cette bourgeoisie se qualifiant de bien pensante engluée dans ses mensonges grossiers et coupables.
Personne ne peut m’interdire de penser que le livre en question n’est qu’un contre-feu pour empêcher l’incendie, qui couve depuis des décennies, de détruire l’image d’une « familia grande ».
bonne journée
« je suis le fils de Personne(officiellement). » Dans mon cas, non pas ne pas être fils de « quelqu’un », de connu, d’illustre, d’important, mais cela signifie strictement une absence physique totale d’un géniteur mâle.
Expérience pour les gens de ma génération au moins aussi difficile que d’être le fils de quelqu’un.
Heureusement la situation a évolué plutôt en bien.
J’en aurai à écrire … j’ai durement acquit la liberté d’être moi et un prénom plutôt qu’un nom. Et je suis partie construire ailleurs avec juste qui j’étais. Le plus dur c’est lorsque le père ou la mère decident à votre place ce qui est bien ou pas de faire … durant plus de 40 ans dans les couloirs de la vie publique j ai eu à vivre l’invisibilité lorsque je croisais l’homme père Maire President vice président député suppléant ect … il avait tellement peur que je serve de grenade à dégoupiller pour l’atteindre que j’ai fini pas imaginer que je n’étais rien puisque même lui ne me reconnaissait pas ! J’ai été bouleversée par le témoignage de Helene Perlant car je connais ce silence de ne pas lever les yeux ou de ne pas raconter les « pourritures » subit. Car en plus « fille femme » c’est encore plus difficile !
Pour la petite histoire j’ai souvent été l’oreille qui écoute les filles et les fils de … comme la grande sœur qui sait ce que ça fait et qui partage son parcours pour rassurer …
Aujourd’hui libre comme jamais et loin par choix je peux enfin dire : je suis la fille de papa et maman et c’est ma plus jolie déclaration d’amour