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Les coqs ont fini par sortir de la « mêlée » en chantant

Samedi soir il m’a semblé que le coq rouge sur le maillot des rugbymen français se redressait un peu plus qu’à l’habitude sur ses ergots. L’emblème de la France du sport a parfois servi de supports à des cocoricos nationalistes insupportables. Le choix de ce gallinacé comme symbole de notre fierté remonte à une moquerie de Jules César à l’égard des Gaulois puisque ceux qui n’ont pas perdu le latin que je n’ai jamais pratiqué à part comme enfant de chœur savent que « gallus » désignait à la fois les Gaulois et le coq ! Une comparaison qui parait-il ne déplut pas aux fans de Vercingétorix puisqu’ils le placèrent sur leur monnaie.

Au fil des siècles le fier volatile connut des moments plus ou moins glorieux. Il fut oublié ou mis en avant selon les choix politiques. Henri IV préféra la poule qu’il voulait mettre au port commun des familles et on négligea le maître des basse cour surtout que La Fontaine le ridiculisa dans une fable débutant par « Deux Coqs vivaient en paix ; une Poule survint/ Et voilà la guerre allumée » et se terminant ainsi après un combat fratricide: (…) » Son vainqueur sur les toits
S’alla percher, et chanter sa victoire.
Un Vautour entendit sa voix :
Adieu les amours et la gloire.
Tout cet orgueil périt sous l’ongle du Vautour.
Enfin par un fatal retour
Son rival autour de la Poule
S’en revint faire le coquet :
Je laisse à penser quel caquet,
Car il eut des femmes en foule.
La Fortune se plaît à faire de ces coups ;
Tout vainqueur insolent à sa perte travaille.
Défions-nous du sort, et prenons garde à nous
Après le gain d’une bataille. »

Napoléon tenta donc de le remplacer par un aigle impérial alors que la Révolution l’avait promu paré des couleurs tricolores pour remplacer la fleur de lys. Cette mise en avant lui valu d’appartenir aux symboles disparus durant plusieurs siècles (Restaurations et Second Empire) et c’est seulement la III° République qui le remit en avant. Il n’a jamais vraiment retrouvé sa place prépondérante dans l’imagerie populaire sauf sur les Monument aux Morts de 14-18 dans certains villages ou sur diverses pièces de monnaie. Seul le mouvement sportif s’en est emparé en 1909 exigeant sa présence sur les maillots de toutes les équipes nationales. Un vœu plus ou moins respecté jusqu’en 2015 où la décision de son retour fut définitivement confirmée par le Comité National Olympique !

La gloire du coq n’est cependant plus toujours appréciée dans la nouvelle conception de la vie dans les contrées où le bonheur serait dans les prés, les sous-bois, les cours des fermes. Son fameux chant matinal annonciateur de la disparition de l’obscurité et l’arrivée de la lumière donne lieu à des affrontements de plus en plus fréquents entre adeptes de la mixité des genres dans les poulailler et leurs voisins agacés par les cocoricos les empêchant de dormir sur leurs deux oreilles. Les réclamations, les récriminations, les protestations, les manifestations et les recours devant les tribunaux après avoir sollicité l’arbitrage du Maire se multiplient.

C’est en 2019 que Maurice, brave coq en pâte régnant sur une tripotée de sept vénérables poules et quelques aguichantes poulettes dans un village de l’île d’Oléron devint une vedette en raison du recours formulé devant le tribunal de Rochefort. Une procédure judiciaire de plus de deux ans qui valut au maître chanteur d’être exonéré de peine capitale. Il en perdit sa voix ce qui simplifia la situation. Le procès en ouvrit bien d’autres moins favorables. En effet, en Haute-Savoie, n propriétaire fut condamné à 3 000 euros de dommages et intérêts et 1 200 euros d’amende pour « troubles anormaux du voisinage » à cause de ses deux coqs trop bruyants car rivalisant d’ardeur quand l’aube était venue. La Cour d’appel a cassé ce jugement de lèse-cocorico !

Il a donc fallu une loi pompeusement destinée à définir et à protéger « le patrimoine sensoriel des campagnes » pour le 21 avril 2024 mettre une terme à ces conflits de voisinage entre « rurbains » et « ruraux ». Le maître coq ne sera plus cuisiné en vain par les gendarmes pour éviter que son chant permette à ses ennemis en fasse tout un plat. Désormais (et c’est logique) le texte demande que soit étudié l’antériorité à l’installation des plaignants du récital matinal comme pour le meuglement des vaches ou le son des cloches, sujets fréquents de conflits. Il existe même des colliers pour empêcher ce fier et glorieux animal de s’exprimer. Enfin il a ces qualités quand il gagne et nous oublions très vite la blague de Coluche : « le symbole de la France est le coq car il est le seul animal même les pieds dans la merde il chante… » Et en ce moment…

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Cette publication a un commentaire

  1. christian grené

    Non, non, Jean-Marie t’es pas tout seul. C’est si vrai que je t’invite un de ces jours au resto pour déjeuner un coq au vin. Si on va à Cardiff, ils le font avec des poivrots. Heu:.. avec des poireaux. Bises à toi.

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