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Le jour où je suis devenu un suspect (1)

Le périple était totalement imprévu. Alors que j’étais président national du Club des Villes et territoires cyclables, j’ai été invité au Congrès panaméricain des cités du continent développant des politique en faveur de la mobilité douce du 3 au 5 novembre 2011. La réunion regroupant des dizaines de métropoles se déroulait à Medellín cité colombienne dont la réputation n’était pas liée à la bicyclette. Je devais être sur place le 3 au matin pour une intervention sur la complémentarité des supports de déplacement. Au passage à Bogota où j’avais atterri la veille j’avais été reçu par l’ambassadeur de France retranché dans un bâtiment ultra sécurisé ressemblant davantage à un bunker qu’à une résidence diplomatique.

« Essayez de placer une expérience sur le tram et le vélo car nous sommes en concurrence avec les Espagnols et les Suisses pour un gros marché de construction de trams suspendus reliant les barrios situés sur les collines avec le cœur de la ville » me conseilla le diplomate. » Je ne peux pas venir avec vous car je reçois ma nouvelle collègue suédoise (sic). » Il souhaitait que je vante donc les modalités des contrats globaux français dans lequel les exploitants mettaient en place des moyens de déplacement complémentaires au tram et dans ce cas aux téléphériques. Une mission impossible car mon intervention était cadrée et n’avait pas du tout abordé ce sujet… La France n’obtint pas la construction mais… je décline à posteriori toute faute de ma part.

La découverte de Bogotá effectuée dès l’aube m’avait impressionné. Une sorte de ruche bourdonnante, vivante, exubérante et essentiellement basée sur la débrouille. La rue y constitue le lieu référence avec ses taxis « guêpes » et une foultitude de petits métiers (location de téléphones mobiles, vente de nourritures, gardiennage de chiens, écrivains publics…) dans laquelle tout est réputé dangereux. Ce jour là ma peur résida dans le déplacement vers l’aéroport dans l’une de ces voitures jaunes conduites par des « jongleurs » ou des « funambules » des courses folles au milieu d’une circulation intense et ne connaissant qu’une seule règle, celle du plus fort ou du plus malin. J’y oubliais mon chapeau de feutre qui… me fut restitué à Paris quatre mois plus tard. Comme quoi il y a des réputations internationales qui ne se méritent pas.

Le séjour à Medellín fut exceptionnel. Un accueil chaleureux et des rencontres toutes plus passionnantes les unes que les autres. Trop court. Le quatrième jour, une organisatrice m’installa dans un taxi qui m’emmena à l’aéroport très éloigné de la ville économiquement la plus riche et la plus accueillante de Colombie. Je me retrouvais seul avec mon bagage et mes billets. Le jour où tout bascula dans l’Imprévu débutait. Je devins en effet dans les minutes qui suivirent un suspect putatif.

Étranger, quittant Medellín après un bref séjour, avec une valise j’entrais dans la catégorie des voyageurs à contrôler. Il me fallut donc affronter pas moins de quatre fouilles successives : celle des vigiles de l’aéroport, celle de la police aux frontières, celle des douanes et juste au moment de monter dans l’avion celle de policiers en civil. Avant de repartir pour Paris le billet prévoyait une escale à Caracas de deux heures. Je n’y crus que quand je me retrouvais dans l’avion et qu’il quitta le sol colombien !

Le contenu de ma valise ayant été quatre fois bouleversé et épluché j’espérais une étape plus paisible au Venezuela. Ce fut le cas car je n’étais qu’en transit. Un couloir à part. Un contrôle allégé et je me retrouvais au comptoir d’Air France. Carte d’embarquement accordée et sérénité retrouvée dans le pays où les militaires étaient on ne peut plus visibles. Il ne restait qu’à patienter pour traverser l’Atlantique. Enfin espérer traverser car la mauvaise nouvelle tomba : le vol était retardé d’une heure. Pas grave. Il le fut de deux heures ! Plus inquiétant. Et vers 22 heures il fut annulé dans l’attente d’une pièce à changer ! « Mettez vous par groupes de cinq personnes et nous allons vous loger en attendant la réparation. Nous avons commandé des autobus » annonça en espagnol que je ne connais pas et en anglais que je pratique de manière parcimonieuse une cheftaine d(escale accourue en renfort.

Je me retrouvais avec un Vénézuélien, un Palois travaillant pour Total dans le pétrole, un Irlandais spécialisé dans la réparation des hélicoptères, un asiatique muet en dernière position de la cohorte qui quittait l’aéroport fort mécontente de la tournure prise par les événements. Le mécano habitué à sillonner la planète me fit comprendre qu’il ne fallait pas s’affoler car ça ne changerait rien à l’affaire. Jovial, optimiste, expérimenté il prit la direction du groupe. Je suivais jusqu’au moment où il fallut franchir le poste de police pour sortir de la zone d’embarquement…

(à suivre)

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Cette publication a un commentaire

  1. A. Blondinet

    Café Jean-Marie de sa vie? Voilà encore un élément de réponse. Et Ticlo dans tout ça? Brico et tricot en l’attente de son conquistador des temps modernes. Escritor intarissable dont on attend la sortie de son livre sur ses carnets de voyage…

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