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Quand Canal devient l’arbitre

La puissance de Canal+ dans le monde du rugby devient inquiétante. En effet outre le fait qu’il gère à leur convenance le programme du week-end en raison des 113,6 millions d’euros versés à la Ligue, il dispose d’un poids considérable sur le déroulement des rencontres. Certes la présence de la chaîne n’influe pas sur les résultats, même si l’ordre des retransmissions peut avoir une influence sur la motivation des équipes. Elle joue cependant un rôle parfois décisif dans le résultat avec sa participation à l’arbitrage vidéo ou le retour par les ralentis sur es actions que l’œil humain d’un arbitre ne détecte pas. En fait comme me le confiait un ami c’est « Canal + qui finit par arbitrer ».

Il suffit que le regard froid d’une caméra soit ou non braqué au bon moment sur une action, pour que la décision prenne un toute autre dimension. En effet l’homme « vidéo » dans sa cabine est tributaire de la qualité des images qui lui sont proposées. Parfois même les commentateurs possèdent des éléments que celui qui aide l’arbitre de champ n’a pas. En remontrant les actions immédiatement après leur déroulement, la chaîne influe sur les prises de position. Avec les possibilités offertes par les tablettes ou les mobiles, les spectateurs réagissent illico. Quand les ralentis  sont diffusées sur les écrans géants de stades l’effet est encore plus fort.

Samedi soir lors de la superbe victoire bordelo-béglaise sur La Rochelle, le geste crtiquable de Jamibert vis à vis d’Aldritt illustre parfaitement cette situation. A l’image montrée et remontrée à satiété, ce sont ajoutés les commentaires en direct puis sur le plateau des journalistes ou des consultants. Ce qui autrefois aurait été un événement sans aucune importance réelle a été jeté en pâture à plus d’un million de téléspectateurs absents du stade. L’ouvreur international a eu beau présenter ses excuses pour ce qui était maladroit, malvenu et déplacé mais qui était bien différent d’autres gestes ou d’autres comportements moralement nettement plus condamnables.

Les propos de Dourthe sur le plateau ont été le bouquet. On sait qu’il a toujours été exemplaire dans ses confrontations, qu’il n’a jamais chambré ses adversaires, qu’il n’a pas été outrancier dans ses déclarations et donc le voir s’ériger en « Père la Morale » avait quelque chose de désolant. Il a même mis en doute la sincérité des excuses présentées à Aldritt par Jalibert. On se serait cru sur un plateau de Cnews où l’outrance immédiate a valeur de sanction médiatique. C’est dans l’air du temps de « juger » avant même que l’on connaisse les tenants et les aboutissants d’un acte. Vouer Jalibert aux gémonies pour un tape que je pense irréfléchie et marquée par la suffisance, un joueur qui s’est donné à fond au cours d’un match de haute intensité a quelque chose de malsain.

D’ailleurs comme le veut la tradition du rugby les deux hommes se sont expliqués et c’est là l’essentiel. Canal + n’a manifestement pas mené de réflexion sur son vrai rôle de diffuseur. Toute puissante la chaîne prend la main sur le rugby professionnel et le monde de l’arbitrage se pose quelques questions. Les Bayonnais qui ont sacrément secoué le cocotier après leur défaite face au Stade Français dans les dernières minutes ont appris à leur dépens que l’arbitrage vidéo repose sur un principe simple : « je vois ou je ne vois mal ou pas du tout ».

Le recours à la vidéo a été brièvement effectué mais n’a pas condamné la décision de valider l’essai de la victoire parisienne. L’arbitre de champ a donc validé la marque. Mieux le commentateur a vanté la qualité de la séquence stadiste en rediffusant sous tous les angles cette action ! Inutile de revenir sur son déroulement le Stade Français avait réalisé un spectaculaire redressement. Il ne s’agit pas d’un procès d’intention mais simplement de ma part la volonté de montrer que le « montreur d’images » a dans les faits tous les pouvoirs et que les « officiants » sont tributaires des moyens techniques qu’il déploie. Les arbitres sont sous son pouvoir. 

Lors de la rencontre UBB-La Rochelle il n’y a eu que peu de situations confuses de ce type. « Monsieur » Raynal a parfaitement géré les événements. Il a été un bon « instituteur » au sens originel de cette fonction en sanctionnant brièvement mais fermement l’auteur d’un acte condamnable par rapport aux valeurs du rugby. Comme à l’habitude le reste c’est un problème entre les hommes concernés et méritait pas un tel tapage ! 

Je suis certain qu’il y aura bientôt un exalté qui proposera de confier à l’Intelligence Artificielle la gestion des situations que les caméras de Canal auront détectés. L’arbitre les répercutera sur la pelouse au nom de l’impartialité et de la parfaite connaissance des règles du jeu que possédera l’IA. Et même un jour on pourra laisser la décision s’inscrire sur l’écran… en économisant la présence humaine. Je sais ça vous coupe le sifflet ! 

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Cet article a 2 commentaires

  1. Pc

    Avec la vidéo la paire Palmié/Imbernon n’aurait pas joué plus de 10 mn par match, et le grand orateur Dourthe aurait reçu nombre de cartons.
    Les anciens joueurs de ma génération tiennent souvent ce discours concernant la video, mais supporterait-on maintenant de voir voler poingts et crampons sur les têtes chevelues de l’époque.
    Il y a le pour et le contre. Beaucoup d’essais accordés autrefois seraient maintenant refusés et inversement, ce qui va dans le sens de l’équité. Quand à canal+ et sa brêle de commentateur (difficile de trouver pire), c’est un marchand d’image pour un public qui en grande majorité ne connaît rien au rugby, il vend sa soupe c’est tout…
    Jalibert à toujours été ce qu’on appelle un « morpion » au rugby, il y en plein les stades des comme lui.

  2. A. Blondinet

    En tant que « Pingouin », né en terre Adélie, je ne vais quand même pas posé mes pieds palmés sur le terrain d’Ovalie.

    Qui a dit l’épais Palmié?

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