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Le temps des douleurs et celui des lendemains qui déchantent

Très connu pour sa fameuse « servante du château », le chanteur Ricet Barrier avait également formulé la fin de vie de manière humoristique. « Passé soixante ans, quand on se réveille sans avoir mal quelque part, c’est qu’on est mort. » Nous sommes probablement nombreux a donné sa véritable valeur à ce constat impitoyable que je préfère nettement à celui gaulliste qui fait de la vieillesse « un naufrage ». Quand durant de longues années on s’est oublié dans l’action, le travail ou le soutien aux autres il est vrai que le passage vers les dernières années n’est guère rassurant. Le corps couine et il faut accepter de ne plus l’exploiter au maximum.

Dès que l’on entre dans un processus de soins, l’horizon diminue très vite puisque l’esprit qu’il faudrait garder ouvert et tourné vers les autres, se réduit à ce que l’on considère comme son triste sort. Le sentiment d’une injustice nous privant du droit à la liberté d’action même réduite ne cesse de grandir. La société n’admet plus que la jeunesse ne soit pas éternelle. Alors la moindre alerte prend des allures de catastrophe surtout si l’on entend des mots de maux que l’on pense réservé aux autres. Il faut  accepter de ne plus maîtriser son propre sort. Et si on a eu le moindre pouvoir temporel on y est guère préparé. La maladie devient une obsession surtout depuis la crise sanitaire.

Il paraît qu’au cours de l’année écoulée les arrêts maladie des Français ont été en forte hausse et ont progressé de 7,9 %. Bien évidemment illico les gens qui ne font que compter, ont vite tiré le signal d’alarme puisque le surcoût pour la sécurité sociale pourrait être de 8 milliards dans ce seul domaine en 2027. Les raisons de cet accroissement des périodes d’arrêt du travail leur paraissent à eux évidentes : tricheries sur les documents, complaisance de certains médecins et  abus des salariés. Bien évidemment il n’y a aucune référence aux conditions de travail et… au fait que le contexte social et environnemental ait été largement modifié.

Toutes les maladies chroniques augmentent en France et dans le monde. Par exemple le diabète ne cesse de progresser. La maladie, touche plus de 500 millions de personnes dans le monde, en tue deux millions chaque année. Si le diabète de type 2 représente neuf cas sur dix, celui de type 1, dit insulinodépendant, progresse d’environ 4,5 % par an dans notre pays. Près d’un Français (adulte) sur trois, et 20 % des enfants âgés de plus de 9 ans, selon l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), souffriraient de rhinites saisonnières provoquées par une allergie aux pollens, plus connues sous l’appellation de « rhume des foins ».

La maladie de Parkinson dont on a fini par admettre un lien direct avec l’usage des pesticides,  touchera selon les estimations en 2030 une personne sur 120 de plus de 45 ans et le nombre de patients parkinsoniens pourrait augmenter de 56%. Depuis 30 ans, le nombre global de nouveaux cas de cancer en France augmente chaque année. Cela s’explique principalement par le vieillissement de la population – qui fait exploser le nombre de cancers du sein ou de la prostate – et l’amélioration des méthodes diagnostiques. Il y aurait bien d’autres statistiques en ce sens et bien d’autres causes à analyser.

Il est donc inévitable de ne pas « mourir en bonne santé » contrairement à ce que l’opinion dominante laisse espérer. Le système de santé tourne à plein régime et permet dès que la maladie apparaît de transformer la crainte en espoir. Enfin pour celles et ceux qui accèdent à ce qu’il se fait de mieux dans ce secteur de la préservation de la vie. En effet se pose de plus en plus la question des capacités financières nécessaires pour accéder aux soins. Le niveau de certaines retraites enlève toute illusion dans ce domaine à bien des gens malades. Avoir un rendez-vous rapide se monnaye de plus en plus cher. Accéder aux soins est inégalitaire et hasardeux. Les suppléments exigés atteignent des sommes inaccessibles et obtenir un rendez-vous dans le secteur 1 tourne au cauchemar.

J’ai personnellement assisté à une scène où une personne dans une clinique privée n’était pas en mesure de régler les 763 € se supplément d’honoraires exigés. Elle a demandé un étalement sur trois mensualités… avec l’espoir que la facture qui lui avait été délivrée serait prise en compte par son assurance n’ayant que le nom de mutuelle. Certes elle aurait pu aller à l’hôpital public mais avec des délais tels que son mal aurait atteint un niveau supérieur. Alors elle paye à crédit en trois chèques non datés !

En voulant à tout prix se protéger de la mort ou la vaincre, dans une forme de délire dangereux, les femmes et les hommes dont je suis, confirment ce que les Anciens avaient compris dès la naissance de la philosophie : la crainte de la mort cause notre malheur – ou notre fuite en avant. Et que pour bien vivre, il faut accepter d’être mortel et de le faire entrer dans son quotidien. Ne jamais se prendre pour un surhomme et savoir que le chemin a forcément un terminus est beaucoup plus facile à écrire qu’à pratiquer. En attendant il vaut mieux donner sa chance au présent et se plaindre tous les matins des petites douleurs d’une vieille carcasse car elles nous accompagnent pour nous rendre réalistes. Pourvu qu’elles soient là demain…

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Cet article a 8 commentaires

  1. J.J.

    Pas très guillerette ce matin l’ambiance, mais on ne peut échapper à la réalité.

    Platon et Montaigne (comme La Fontaine, auteurs « incontournables ») ont écrit de belles choses sur le sujet. On s’en inspire, certes, mais on reste seul avec ses angoisses du lendemain.
    On peut se consoler en se disant que c’est le passage qui sera difficile, mais après ….une paix éternelle dont on n’aura probablement même plus conscience, attendu que l’on sera revenu sans doute à un néant que l’on aurait jamais dû quitter. Le concept d’immortalité de l’âme a été crée sans doute pour rassurer. J’espère bien ne pas avoir un âme immortelle.

    1. Exact je suis désolé mais ma culture chansonnesque est défaillante comme ma santé ! Amitiés et merci

  2. DGN

    Antoine.B, médecin extraordinairement humaniste qui m’a, un jour, sauvé la vie, disait à juste titre  » La douleur n’a aucune vertu. Elle n’a qu’une utilité, celle de nous prévenir qu’il faut s’occuper un peu mieux de son corps « . Depuis, j’essaie (tant bien que mal) de mettre en pratique sa maxime….. et comme Ricet Bariet le prônait, je me réjouis chaque matin, grimaçant dans la descente des escaliers vers mon café-sauveur, de profiter encore de la vie.

  3. DURAND GÉRARD

    Ça fait peur et encourage à mieux se prémunir de ces ennuis de santé

  4. alain Clause

    les douleurs du matin te rappellent que tu as la chance d’être encore vivant !

  5. Alain. e

    J ai la douleur d’ apprendre , que Ricet Barrier s’ est accaparé la bonne du curé d’ Annie Cordy , alors que lui , c’ était plutôt  » la servante du château » qu’ il visait ….
    Plus sérieusement , il est vrai que passé un certain age , c’ est un combat de tous les jours pour garder la santé.
    Je pratique la marche nordique en club depuis neuf ans déjà , deux fois par semaine , et en constate les bienfaits .
    Nous ne sommes pas tous égaux devant la maladie et les douleurs , j’ ai foi en la science pour continuer à résoudre une grande partie de tout ces maux .
    Cordialement

  6. christian grené

    J’arrive à peine de la clinique Jean Villar, à Bruges, et que lis-je en croyant finir la matinée en roue libre? Brrrrr! Si Mongénéral est celui qui a écrit, dans le tome 1 de ses Mémoires de guerre, « La vieillesse est un naufrage », un certain Chateaubriand l’aurait peut-être dit avant lui . Allez, bonne journée à tou(te)s et… à votre bonne santé!

  7. J.J.

    « La vieillesse est un naufrage » Apprenons à nager.

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