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Tartines, beurre, chocolat, œufs, mimosa…

Durant le week-end, lapins, poules, poissons, œufs de toute taille et de toute consistance disparaîtront sans que la SPA aient de communiqué d’indignation à publier. Pour les gens ayant les moyens financiers d’accéder aux créations industrielles ou artisanales pascales ce sera le plus agréable des week-ends. L’essentiel étant de ne pas « rester chocolat » mais d’en consommer sans modération de manière ollé ollé ou au noir selon ses goûts. Près de 350 000 tonnes reflètent l’amour populaire pour cette productions seulement arrivée en Europe il y a 600 ans.

Venu d’Amérique centrale ou du sud où pour des motifs religieux ou médicaux, Mayas et Aztèques s’offraient une fève (de cacao) pour célébrer de grands événements, la boisson n’est arrivée en Europe qu’en1585, quand les Espagnols reviennent de leur voyage sur le vieux continent. Jusque-là, alors qu’il n’était réservé qu’à l’usage exclusif de la cour et des soldats, le cacao devient plus populaire. Les Français ne connaissaient pas encore son existence et il fallut attendre 1615, pour que la boisson chocolatée fasse son apparition !

C’est la fille de Louis Philippe II d’Espagne, Anne d’Autriche, passée par Sadirac et Créon en décembre 1615 lors de son mariage avec Louis XIII, qui lance la mode à la cour française. Un peu plus tard, en 1659, Marie Thérèse la femme de Louis XIV ouvrait une chocolaterie dans les quartiers des Halles. La voie royale en somme !

Contrairement à ce que l’on pense la première plaque n’arrive qu’en 1674 car il s’agissait surtout de déguster une tasse du fameux breuvage auquel on prêta très vite des valeurs aphrodisiaques. Bayonne accueillit seize ans plus tard une fabrique avec la vente aux personne ayant les moyens de prétendre à acheter des productions très simples, amères et limitées en quantité. Après une période de doute sur ses effets le chocolat obtient une soutien ferme des médecins de l’époque tant il aurait eu des effets bénéfiques sur la santé. Ce coté positif ne s’est jamais démenti. Avec plus de 11 kilos par an et par habitant la France se soigne donc aux productions cacaotées.

Désormais les fabricants rivalisent d’imagination pour réaliser des assemblages colorés, des combinaisons de saveurs originales et des concentrations en cacao très différentes. Cette course à l’originalité dissimule en fait des triches sur les dosages. En fait le partage du chocolat repose comme en bien d’autres circonstances sur le naturel. Quand je rentrai de l’école le « quatre heures » qui se prenait en fait à cinq reposait par la force des moyens financiers sur ce principe.

La fin de la guerre mondiale et le retour des denrées coloniales permettaient un accès plus facile à la…poudre ! Bordeaux possédait de multiples fabriques dont celle de la marque Louit le précurseur mais tant Menier que Poulain tenaient dans les années 50 le marché populaire. Nous découpions une tartine du « sept-cents » pour l’enduire d’une bonne couche de beurre. Il suffisait ensuite de saupoudrer le tout de poudre de chocolat ou mieux de râper des copeaux avec une lame de couteau pour confectionner le plus agréable des « goûters ». On est loin des barres sophistiquées ou des breuvages tout prêts ! Une barre de tablette glissée dans un morceau de pain constituait une autre version de ce plaisir partagé du « plaisir chocolat. 

Je n’ai pas souvenir d’avoir participé à une chasse aux œufs enveloppés dans de fines feuilles dorées ou une recherche du lapin pour Pâques pourtant le grand rendez-vous religieux de l’année pour les Italiens. De chocolat il n’y avait point (ou très peu) dans la famille mais en revanche les pontes de la basse-cour avaient été soigneusement conservées. Le plat essentiel du repas des fêtes en avait absolument besoin. Un moment particulier quand Pasqua (c’était le nom de ma grand-mère italienne) apportait sur la table de la salle à manger avec patins les œufs mimosa. La tradition est maintenue depuis toujours.

L’abondance ne repose pas nécessairement sur la caractère raffiné des mets proposé mais essentiellement sur la valeur qu’on leur accorde. Je n’échangerai le souvenir de ma tartine beurrée au chocolat et des œufs garnis de mayonnaise maison et recouverts d’un linceul jaune contre rien d’autre. Ils me permettent de ne pas oublier d’où je viens ce qui est essentiel pour croire simplement dans mon chemin de vie.

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Cet article a 7 commentaires

  1. christian grené

    Bonjour Jean-Marie! Tu t’en doutais, ta rubrique du jour suscite en moi une émotion. Dès que l’on évoque les oeufs mimosas, l’eau me vient à la bouche et la larme à l’oeil… Jeff, on est tout seul sans toi.

  2. Gilles Jeanneau

    Comme vous, j’ai un faible pour les oeufs dur mayonnaise…
    Et pourtant, ils ont disparu des menus des restaurants sauf encore dans certains routiers. Mais qui tendent eux aussi à disparaître!
    Quelle honte!
    Je ne sais pas d’où vient la chasse aux oeufs en chocolat cachés dans le jardin. Moi aussi, je n’ai découvert ce plaisir pascal qu’à l’âge adulte.
    Allez, bonne journée quand même.

  3. J.J.

    Je n’ai connu le « vrai « chocolat que bien après la Libération :

    « Les tickets donnaient droit à des produits variés et variables en qualité et quantité selon l’âge, le sexe et ou les activités des bénéficiaires : je fus J1 puis J2, ce qui me donnait droit à une ration de chocolat. En réalité la substance ainsi baptisée se composait de barres de caséine vaguement sucrée et enrobée d’une couche d’environ 1 millimètre de  » vrai  » chocolat. Selon les circonstances et les hasards des approvisionnements, ma catégorie d’âge se voyait parfois généreusement attribuer une ration de bonbons qui se présentaient sous la forme de boulettes multicolores, légèrement sucrées et acidulées. Au bout de quelques jours, cette friandise absorbait l’humidité et se transformait alors en une masse gluante et compacte, particulièrement appétissante. »
    Le meilleur pain était pour le moins noir, fabriqué avec une farine de blé blutée avec un fort pourcentage de son, mais il pouvait également avoir été pétri avec de la farine de seigle, d’avoine, de fève, que sais-je ? Il se présentait alors sous la forme d’une boule noirâtre et dont l’intérieur (on ne peut pas parler de mie) consistait en une pâte noire et compacte ressemblant à de la boue.
    (extrait de mes « Mémoires de guerre »)
    Un soupçon d’abondance revenu, j’ai connu les délices de la tartine de pain beurré agrémentée de chocolat râpé, qui était concurrencé à la belle saison par quelques fraises écrasées et saupoudrées de sucre.
    Ça m’a appris la sobriété en tout, j’apprécie particulièrement le chocolat sous toutes ses formes, mais je le consomme, comme toutes les bonnes choses que j’aime, de façon épicurienne : le désir et l’attente décuplent le plaisir.

  4. François

    Bonjour !
    « 7,3 kg par an ! » Aïe ! Je dois tirer la moyenne vers le haut avec … 40 kg (avoués !!) de chocolat noir 50 % ! ! ! et encore, si mes escapades pyrénéennes ne m’ont pas conduit en touriste gourmand à Oloron Ste Marie où un beau magasin « à l’odeur alléchante » m’impose … une pause. Cet lieu a une particularité bien singulière qui inquiète mon toubib : à la simple vue des étals copieusement garnis, vous sentez que votre pèse-personne va se fâcher ! Bizarre, bizarre ! !
    Au milieu des nombreux bonbons, plaques, petits lapins et autres assortiments, j’ai découvert les plaques mélées en kilo-surprises qui ont fait de moi un fervent du 100 % pur cacao ( faut s’accrocher mais quel régal … même si la plaque n’accuse que 50 g !!).
    Si vos envies de liberté vous conduisent vers Oloron, méfiez-vous : les oursons en chocolat sont plus nombreux que les vrais … mais leurs griffes sont émoussées ! ! ! Dommage que le magasin soit fermé le dimanche ! ! Dommage, dommage ….
    Après cette escapade gourmande, revenons à ton feuillet … chocolaté !
    Les 4 h « pain copieusement beurré (la mie d’une miche de 4 livres a de gros trous !) avec une bonne couche de copeaux de chocolat Poulain 400g », le tout soigneusement préparé par Mémé : comme toi @Christian, les larmes du souvenir dégoulinent de mes yeux de sénior ! Cela ne peut point se comparer à un BN industriel ou un goûter Mac Do !
    Les œufs de Pâques : là, c’est le souvenir de  Grand Mère (maternelle) qui s’impose. À la fin du repas familial, les tontons et tatis s’éclipsaient. Dès leur retour, comme une volée de moineaux piailleurs, les cousins et cousines s’éparpillaient dans le jardin et le proche bois de Grand Mère . Des cris de joie jaillissaient à la découverte attendue des œufs multicolores que l’on devait ramener et … compter. Tous les ans, quelques uns manquaient à l’appel : les yeux baissés des gourmands avouaient leur « absence »  vite pardonnée ! !
    C’était Pâques ….il y a plus de soixante ans ! Pas d’ordi ! Pas de tablette ! Non mais des joies simples …en famille ! !
    Amicalement.

  5. Philippe Labansat

    Vers la fin des années 60, le goûter des internes du Lycée de Libourne (un tiers de l’effectif du Lycée environ), à la fin de l’après-midi, consistait en du pain au chocolat.
    Sous le grand préau, un employé du Lycée (eh oui, il y en avait une dizaine à l’époque, cuisine, entretien, Michel Morin…) attendait les internes avec un grand panier de tartines de pain et un autre de barres de chocolat, sûrement pas de la meilleure qualité.
    En attendant, les internes se jetaient sur ce ravitaillement qui permettait de patienter jusqu’au repas du soir.
    J’avoue que, par faim et gourmandise, il m’est arrivé de me glisser crapuleusement dans la file d’attente, moi qui n’y avais pas droit, puisque j’étais externe…

    1. J.J.

      « J’avoue que, par faim et gourmandise, il m’est arrivé de me glisser crapuleusement dans la file d’attente, moi qui n’y avais pas droit, puisque j’étais externe… »
      Oh le vilain gourmand ! Ça se pratiquait dans tous les internats.

      Et c’est vrai qu’il y avait tout un « petit peuple » de personnel d’internat et d’externat avec lesquels nous avions des relations souvent cordiales.
      Le plus célèbre dans le lycée, c’était le concierge, redoutable cerbère qui ne laissait sortir personne sans autorisation en dehors des heures légales. Un personnage pittoresque, mutilé de la guerre de 14, qui tirait horriblement la patte. En cas de panne de courant( ce qui arrivait fréquemment), ou s’il y avait une communication importante à faire aux élèves, ou si l’un de nous était convoqué par une « autorité », il battait le rappel au son du tambour, ce qui lui avait valu le « sobriquet » de Napoléon (sans doute en référence aux grognards, avec sa grande taille et sa moustache imposante).

  6. MARTINE PONTOIZEAU-PUYO

    bonjour et bon weekend de Pâques
    que de souvenirs remontent à la surface en lisant le texte de JMD.
    Tartines beurrées chocolat râpé ou en poudre, pains de 700 g., pain au chocolat avec un morceau de baguette ou dans un petit pain à la taille de la tablette de chololat Tobler.
    Par contre lorsque j’allais en Vendée (Pays de Monts) chez une cousine (nièce de ma mère), elle nous faisait à ses enfants et à moi des tartines beurrées avec du chocolat râpé, mais le beurre était salé et pas doux ou demi-sel. non non salé avec le gros sel venant des marais salant du coin ou de Noirmoutier. J’enlevais tous les grains de sel……………mes cousins se moquaient de moi.
    Quant au lycée où j’étais scolarisé il y avait un concierge qui contrôlait toutes les entrée s sauf à 8 h ou à 14 h, et il fallait justifier pourquoi 9 h ou 15 h, de même pour les sorties en dehors de 12 ou 17 ou 18 h. c’était une autre époque. je ne connaissais pas les oeufs de Pâques, sauf les friandises pour les rameaux.
    bon weekend

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