Le constat est toujours le même : notre société vit sur les apparences et les grands médias nationaux se complaisent à diffuser ce qui n’est qu’un miroir déformant de la réalité. Il n’existe pas un seul domaine dans lequel on peut être certain de ne pas se faire prendre comme les alouettes. Bien évidemment, comme personne n’est en mesure d’aller chercher lui-même sa propre information ou effectuer ses propres investigations, nous devenons otages de « rapporteurs » sommaires, et spécialistes de la généralisation systématique.
Souvent, très souvent, j’aimerais briser cette dépendance en offrant d’autres visions plus correctes d’un monde qui échappe à tous les regards. C’est même parfois une souffrance d’entendre des conversations ou de regarder de pseudos reportages schématiques qui ne montrent que la part visible d’un iceberg superbe ou en déliquescence. La fossilisation des positions et des analyses constitue la pire des menaces démocratiques.
Par exemple, dès que l’on parle du pouvoir politique on reçoit une rafale mortelle de poncifs. Les munitions sont toujours les mêmes et finissent par tuer la démocratie, présentée comme dispendieuse et ostentatoire. Elle l’est. Le cœur en France de la République demeure l’Élysée dont le blason a été sérieusement terni par le passage dans ses murs d’un certain Nicolas Sarkozy et qui semble déraper depuis quelques temps. Et bien évidemment, comme le veut la construction de l’opinion dominante, ce Palais serait le creuset de tous les abus financiers ou matériels. C’est moins simple que ça.
Combien de personnes peuvent pourtant mesurer la réalité de ce lieu d’où partent et arrivent les mesures essentielles de la vie sociale collective du pays ? Grâce à une invitation « personnelle » j’ai pu durant plus de trois heures entrer dans cet Élysée sur lequel ne bave pas que les escargots du parc ! Une découverte libre, qui n’avait aucun cadre officiel, et donc qui permettait vraiment d’aller presque partout sans rencontrer des discours « officiels ». Un privilège, dans un contexte où souvent on tente par tous les moyens de masquer les vérités qui dérangent.
D’abord, ce soir-là pour la première fois de son quinquennat, François Hollande recevait en visite d’État son homologue italien. Un événement pour lui, mais pas pour le personnel de l’Élysée pourtant stressé, comme le commandant militaire qui faisait ses débuts en la matière. Vu de près et de l’intérieur la machinerie protocolaire reste d’une extraordinaire complexité, en raison de règles immuables. Ballet millimétré des voitures officielles, timing angoissant et surtout, contrairement à tout ce que j’avais entendu, aucun faste particulier en dehors du tapis rouge sur les marches du fameux perron où surgira au dernier moment pour accueillir son hôte le Président.
Le repas ne durera que 90 minutes (« Sarkozy n’aimait pas ces soirées, alors il mettait la pression pour que le souper ne dure qu’une heure, et il renvoyait les invités ! » m’avait expliqué très librement un habitué des lieu). Matériel de location (« nous n’avons pas de lieu de stockage » ajoute le responsable) vaisselle élyséenne (« je dois tout compter après ces repas ! » confie une dame triant par douzaine les serviettes « car les invités les emporte facilement en souvenir ! ») et de superbes bouquets de roses sur le trajet à travers les salons des invités : pas grand chose de « fabuleux » ou de « spectaculaire » mais une mise en scène plus ou moins (« chacun à une tâche très précise » ajoute un salarié, affairé à empiler les tables pliées en quelques minutes ) artificielle et surannée.
Toutes ces fourmis élyséennes sont mis à disposition par des ministères divers. Beaucoup appartiennent à celui des Armées pour des raisons de sécurité. Hier un employé en charge de l’entretien de l’argenterie en vermeil et de la vaisselle a tenté de suicider après avoir appris qu’il était remis à disposition de son ministère. Trop vieux apparemment. « La pression est constante confiait l’un de ses collègues. Je suis là depuis plus de 25 ans et j’avoue que les plus exigeantes ont été depuis Chirac les épouses du Président. Madame Chirac ne supportait pas de croiser une personne dans un couloir. Quand elle arrivait tout le monde disparaissait devant elle. » Cette
Le seul syndiqué présent au « château » déclare dans Marianne : « En ce moment, l’ambiance de travail est exécrable. Ils virent les ‘vieux’ en les remettant brutalement à disposition de leur corps d’origine ». Selon lui, il ne fait aucun doute que la tentative de suicide de son ancien collègue, qui aurait porté son badge professionnel au moment de son acte désespéré dénote a un lien direct avec la perte de son emploi.
Bien entendu il sera difficile d’en avoir confirmation et d’en connaitre les causes réelles. L’Élysée ressemble à une ruche avec une case centrale (le bureau présidentiel séparé de celui du secrétaire général par une salle de réunion) où, dans le fond, le seul risque que court l’occupant, c’est celui de l’isolement absolu du monde réel.
« Je pense que c’est la raison pour laquelle Monsieur rentre souvent chez lui »… Étonnant d’entendre les gens parler entre eux de « Monsieur » et « Madame » et jamais du « Président ». Un signe de l’époque présente. « Chaque Président a son style, sa façon d’être et de se comporter. Il passe et nous on reste… Nous sommes les seuls à bien les connaître car nous les voyons hors du champ médiatique. » m’avait confié un employé plus disert que les autres ! Enfin c’était globalement le cas jusqu’à présent mais il semble que la retraite à 64 ans ne donne pas l’image dynamique de ce Palais d’une autre époque.
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Je crains que les choses n’aient beaucoup changé depuis le passage de « mon général » mais surtout de ses successeurs qui se sont sans doute crus revenus au temps de fastes royaux ou impériaux.
Dans les années 50 (Vincent Auriol, René Cotty ) il semble que c’était encore bon enfant. Je citais il y a quelques jours la photo où le président posait entouré de chansonniers parisiens reçus à un repas.
À cette époque j’allais en vacances chez des amis qui recevaient leur cousin, alors directeur du Génie Rural, et qui était souvent convié à l’Élysée et qui nous contait les réceptions. Les menus étaient recherchés (c’est la première fois que j’entendis parler de Tournedos Rossini) mais l’atmosphère décrite semblait plutôt simple.
Ce qui me met en colère quand je vois un reportage sur une arrivée de personnages dans la cour de l’Élysée, ce sont ces serviteurs en livrée ouvrant la porte aux notables.
Ça me donne envie de chanter la Carmagnole.
Les images que l’on a pu voir dans le passé de reportages pseudo familiaux à l’Elysee, Pompidou et bibiche, Chirac et son cerbère, Sarkozy et pimprenelle, en passant par Giscard, Anémone, Mitterand et Danièle ont toujours laissé entrevoir la rigueur quasi militaire du lieu.
On doit se battre pour y rentrer et y rester, la proximité du pouvoir est une drogue.
qu’ il y ait un lieu prestigieux pour recevoir les présidents du monde entier c ‘est normal
que Mr et Mme y vivent comme des reines et roi c est lamentable et surement couteux !
que font les 835 personnes à longueur d ‘années ?