Depuis des mois si ce n’est des années je n’ai eu de cesse de dénoncer la mutation du financement de la vie collective de proximité par de taxes directes ou indirects sur la consommation ou l’économie. De ma fenêtre de confiné têtu je vois venir les difficultés provoquées par cette réforme libérale. Voici la position de l’assemblée des départements de France sur ce sujet. Elle corobore mes prévisions faites sur Roule Libre à maintes reprises. C’est encore et toujours le confinement des recettes et le déconfinement des dépenses…
Le rôle des Départements est déterminant dans la lutte contre la propagation du virus Covid-19 (achats de masques, mobilisation des laboratoires départementaux d’analyse pour la réalisation de tests…).
Les Départements sont également essentiels pour affronter efficacement les conséquences économiques et sociales de l’épidémie dans les territoires (mobilisation accrue dans le secteur de la protection de l’enfance, personnes âgées et personnes en situation de handicap, aides aux associations et aux entreprises locales…). En Gironde la coût avoisinera 10 millions d’Euros.
Ces deux dernières années, une conjoncture plutôt favorable et les efforts importants en gestion conduits par les Départements leur ont permis de retrouver un équilibre financier global. Toutefois, les élus départementaux girondins n’ont eu de cesse de rappeler que cette situation était précaire et l’avenir incertain.
La crise que nous traversons aujourd’hui fait ressurgir les difficultés financières structurelles sur lesquelles les Départements ont constamment alerté les gouvernements successifs.Même si la crise actuelle aura des conséquences économiques et sociales plus importantes que celle de 2008, un rappel des chiffres permet d’avoir un aperçu des perspectives auxquelles les Départements doivent s’attendre aux phénomènes suivants en matière de recettes:
▪La taxe foncière (près de 15 milliards d’€ en 2019), qui représente 20% des recettes des Départements, devrait connaître une relative stabilité. En 2009, cette recette n’avait pas connu de baisse. C’est d’ailleurs pour cette raison que les Départements sont fermement opposés à la réforme de la fiscalité locale qui doit s’appliquer dès 2021 et qui prévoit le remplacement de la part départementale de foncier bâti par de la TVA. Les Départements avaient souligné le danger de leur attribuer une recette aussi intrinsèquement liée à la conjoncture économique. En 2009, la TVA avait en effet chuté de -5,5%.
▪Concernant les droits de mutation à titre onéreux (DMTO), qui ont atteint environ 13 Md€ en 2019, les Départements anticipent une perte dès 2020 a minima de -30% (soit -4 milliards d’€ par rapport à 2019) en raison d’un quasi-gel des transactions immobilières durant le confinement et d’une reprise ralentie (tant sur le nombre de transactions opérées, que sur le montant de ces dernières). Lors de la crise de 2008, ceux-ci avaient enregistré une baisse de -11% en 2008 et -27% en 2009.
▪Une autre incertitude demeure sur la part de la Contribution à la valeur ajoutée des entreprises ( CVAE) que les Départements perçoivent (4,2 milliards d’€ en 2019). Si l’année 2020 ne sera pas impactée (le produit touché en 2020 correspond à l’activité économique des années précédentes), les collectivités devraient subir une baisse dès 2021 et encore davantage en 2022.
Concernant les dépenses,
la principale augmentation anticipée est relative au financement du RSA, qui ont représenté plus de 11,1 Milliard d’€ en 2019. Les Départements ont connu une hausse continue de ces dépenses de plus de 5 milliards d’€ entre 2008 et 2018, soit une évolution moyenne annuelle de +6,3% (avec les plus fortes augmentations en 2009 (+9,7%) et en 2010 (12,8%)).
Si l’on peut se féliciter que le Gouvernement ait décidé de suspendre dès le début de la crise le dispositif dit des «pactes de Cahors» limitant l’évolution des dépenses locales, les Départements souhaitent résolument que des marges de manœuvre supplémentaires leur soient accordées au regard des spécificités qui sont les leurs et dans le contexte particulier actuel. Ainsi les demandes suivantes ont été formulées auprès du Gouvernement:
-Un dispositif d’évaluation partagé avec l’État permettant d’objectiver ces dépenses exceptionnelles et les pertes de recettes en lien avec la crise sanitaire,préalable nécessaire à une indispensable compensation par l’État des conséquences financières de celle-ci,
-Un assouplissement des règles budgétaires et comptables afin de permettre l’identification, la comptabilisation distincte et une possibilité de financement par l’emprunt des dépenses liées à la crise,
–Des marges de manœuvre immédiates sur les recettes pour les Départements en difficulté, par des avances remboursables de fiscalité DMTO par exemple,
–La sécurisation des interventions économiques des Départements le temps de la crise sanitaire,qui leur permettent de freiner au maximum l’évolution des dépenses sociales futures (RSA en particulier),en complément des dispositifs pilotés par l’État et les Régions,
–L’abandon définitif de la remise en cause des impôts économiques locaux,
-La redéfinition dans la loi de finances pour 2021 des modalités de péréquation des DMTO afin de les adapter au nouveau contexte financier.
Dans le contexte actuel, il faut absolument demander toutes collectivités confondues demander un moratoire sur la réforme de la fiscalité locale afin que l’action des collectivités territoriales ne soit pas soumise à des incertitudes supplémentaires
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