Un texte publié sur ce blog le 31 octobre 2005 :
Il n’y a probablement pas de lieux plus révélateurs de la vie réelle que les cimetières. Paradoxes de notre société, ils portent, davantage que tout autre espace public, les stigmates d’une évolution profonde des mentalités, dont personne ne veut mesurer les conséquences. L’âme d’un peuple, d’une ville ou du plus reculé des villages, se reflète ainsi dans l’endroit qu’ils consacrent à leurs morts.
Une promenade solitaire dans les allées, avec un regard curieux, permet d’en apprendre beaucoup plus sur les changements ayant affecté le monde que toutes les études socio-historiques les plus sophistiquées.A l’ombre du clocher, blotti contre une église, à flanc de coteau, à l’écart du hameau ou au cœur du bourg et ce n’est plus le même cimetière.
Avec des herbes folles ou des allées goudronnées, il ne respire plus les mêmes vérités. Son ordonnancement rigoureux, ou la diversité poétique des implantations, traduisent la philosophie des vivants. Le nombre de grilles repeintes, de pierres tombales couvertes de mousse, de croix descellées, de pots de fleurs oubliés, de plaques brisées, varient nettement d’une région à l’autre.
Les cyprès, les chênes verts, les bouleaux ou les pins parasols ne portent pas la même vision du compagnonnage d’éternité. Globalement monumental, cossu, démonstratif, le cimetière transpire l’aisance économique, passée ou présente, de grandes familles locales ayant la volonté de continuer à paraître dans l’au-delà. Champêtre, dépouillé, caché, il illustre la sincérité des rapports entre les vivants et les morts et plus encore le souci collectif de ne pas verser dans le déraisonnable.
LA VERITE DES DOULEURS
Les noms et les commentaires portés sur les plaques m’émeuvent toujours, car parfois ils sortent des poncifs pour aller vers la vérité des douleurs. Les mêmes mots, gravés dans la douceur fragile de la pierre blanche, dans la dureté inaltérable du marbre ou dans le fil rustique du bois ne revêtent pas la même signification, ne témoignent pas de la même confiance dans la durée du souvenir. Ils portent, avec un pourcentage d’erreurs faible, la saga d’une famille, des parcours de chair et d’os, qui, j’en suis certain, peupleraient sans effort des chapitres de romans.
Je ne peux jamais m’empêcher, dans le silence, de chercher à dénicher, à travers des dates de naissance et de disparition, la fugacité d’une vie reliée à un prénom plus ou moins désuet, ou la durée exceptionnelle d’une autre, perdue dans un siècle passé.
J’ignore souvent tout de ces disparus, et je peux donc librement interpréter ces signes extérieurs de richesse posthume. Tous ont participé à l’histoire du village. Tous ont aimé ou haï. Tous ont souri ou pleuré. Tous ont espéré et perdu? Le cimetière constitue la plus fabuleuse des bibliothèques, si vous avez les clés de l’imagination.
J’ai toujours eu mal au coeur, en ces journées précédant la Toussaint, en constatant que l’oubli le plus froid côtoie le souvenir idolâtre. L’abandon forcé ou volontaire se remarque en effet davantage au moment où s’abat un déluge luxuriant de chrysanthèmes. Les ravages du temps sont encore plus redoutables pour les morts que pour les vivants. Ils les expédient dans un anonymat oublieux, dans le néant absolu. J’aime bien dans le cimetière de mon village natal retrouver des noms et des prénoms me peremettant de ressuciter des visages et des souvenirs partagés. Une preuve que je suis encore… vivant !
Les jardiniers des mémoires ne cultivent pas nécessairement les » bonnes » fleurs. Celles qui s’épanouissent à une date fixe accaparent tous leurs efforts alors que les plus précieuses sont celles qui poussent naturellement le long des chemins quotidiens du souvenir. Encore une fois, l’apparence supplante la sincérité, mais dans le fond, l’essentiel demeure.
LES CIMETIERES SONT PAVES DE BONNES INTENTIONS
La mort devient de plus en plus discrète. Les prêtres se raréfient. Les cérémonies se simplifient, et la crémation entre lentement mais sûrement dans les mentalités. Les familles explosent sous la pression du divorce, et de l’éloignement lié à la quête du travail. Le recul de l’âge des décès, avec son cortège d’invalidités, rend la disparition moins douloureuse.
Les cimetières sont, eux aussi, pavés de bonnes intentions. Ils se parent de leurs plus beaux atours quand le respect des conventions l’exigent, et sombrent ensuite dans la grisaille. On y retrouve cette peur planant sur notre société vis à vis d’un instant appartenant pourtant pleinement à l’essence même de la vie.
Chacun d’entre nous est, en effet, persuadé qu’il découvrira l’élixir de jouvence. Les produits miracles avec Oméga 3 ou DHEA se vendent comme jamais. Les magazines traitant de la santé s’arrachent comme des petits pains. Les médecins sont sensés faire des miracles. Les campagnes de communication tentent de nous persuader qu’en renonçant à quasiment tout nous pouvons éviter le pire.Alors, les cimetières apparaissent désormais comme les lieux des échecs suprêmes : ceux où l’on ne trouve que des gens qui n’ont pas su ou pas pu éviter la mort.
Si vous y allez, prenez donc bien soin de regarder les autres, de leur donner une seconde d’éternité supplémentaire en lisant leur nom, en regardant leur photo éventuelle, en vous intéressant, en définitive, à leur triste sort. Ca remplacera tous les chrysanthèmes du monde !
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Jadis, c’était l’église qui avait pour mission de tenir les registres paroissiaux à jour. La paroisse était représentait par la religion catholique. Bien des guerres de religion ont eu lieu entre les catholiques et les protestants mais la religion catholique est la plus forte et ceci est toujours d’actualité. Même la commune décore les murs du cimetière. Le chrysanthème est une belle fleur vendu selon sa grosseur. Il est toujours possible d’en faire des boutures pour l’apporter au cimetière. C’est moins cher. La Toussaint est une fête religieuse catholique ce n’est pas la fête des morts
Bernadette@ « La Toussaint est une fête religieuse catholique ce n’est pas la fête des morts »
La Toussaint est la récupération par l’église catholique (comme de beaucoup d’autres fêtes) de l’antique fête celte de Samain, qui correspond, dans le cycle de la nature, à l’entrée en sommeil progressive des végétaux et de certains animaux. Avec la fin des récoltes et la diminution sensible de la durée du jour, le rythme de vie ralentit, pour certains il cesse, d’où l’évocation de la mort
Les étasuniens, à partir de la fête initiale importée par les irlandais, si mes souvenirs sont exacts, en ont fait une ridicule affaire commerciale d’un goût douteux, qu’ils ont réussi à exporter en France.
Il est tellement important d’honorer nos disparus. Moi l’athée j’aime flâner dans les cimetières qu’ils soient prés des églises ou non. Chacun, chacune est parti avec ses croyances , ses valeurs rigoureuses ou plus légères liées à l’éducation ou a son caractère. Les tombes ne sont souvent que le reflet du « rang à tenir » ou hélas du « mieux possible « . Les caveaux les plus riches tout comme les sépultures les plus modestes ont en leur sein, les uns auprès des autres des personnes au passé laborieux, généreux, aimable, attentionné ou incroyablement égoïste. Certains sous le joug du qu’en-dira-ton , d’autres pour l’amour des autres (familles ou pas). A nous, en décryptant ce que nous offre la vue de ces tombes de ne pas en tirer de fausses conclusions. Mais après tout pourquoi pas,puisque c’est juste pour nous, le temps d’une balade.
Bonjour depuis Pertuis, Porte du Luberon
Pour notre part, nous avons choisi ce vendredi 1ernovembre pour nous rendre dans l’Hérault à Capestang, puis à St Pons de Thomières, après avoir consulté la météo pour la route principalement. Le culte des morts reste massivement célébré au 1er novembre; C’est un constat !
Cordialement à tous, Gilbert
La visite des cimetières m’est toujours apparu comme une morne corvée. Je n’ai pas besoin de m’y rendre pour évoquer le souvenir des disparus. Un objet, le rappel d’un souvenir d’un être cher, me semblent plus puissant pour rendre un hommage muet à un disparu qu’une visite un peu convenue ; mais ça se fait et ne pas sacrifier à la tradition n’est pas forcement bien vu !
« Mais les brav’ gens n’aiment pas que…
il m’est quand même arrivé de visiter des cimetières « historiques » : celui de Montparnasse, le Père Lachaise, où, c’est vrai , j’ai ressenti beaucoup d’émotion devant les monuments aux victimes d’accidents aériens ou devant le Mur des Fédérés.
Je ne veux pas occuper de place dans un cimetière, je pense aux générations futures qui auront besoin de terres agricoles à cultiver, inutile de gaspiller de la place. Que mes cendres retournent à la nature.
Poussière, tu es poussière et tu retourneras poussière…(Genèse 3-19)