L'assemblée nationale d'en-haut et celle d'en-bas

 Je commence à connaître par le menu le système des « commissions d’enquête parlementaire » puisque pour la quatrième fois en seulement deux ans j’ai été invité à représenter successivement l’Association des Maires de France sur le sport en général, le sport professionnel, les déchets et la vie associative. Au Sénat ou à l’Assemblée nationale le principe reste le même : les parlementaires tentent de faire le point sur un problème d’actualité et surtout de dégager les idées forces de réformes éventuelles après avoir auditionné et questionné tous les partis concernés. Un travail obscur qui mobilise souvent les volontaires durant les sessions publiques et expliquent souvent l’absence des plus curieux ou des plus motivés sur un autre sujet dans l’hémicycle. En fait l’Assemblée nationale ou le sénat est un iceberg que l’on ne juge que sus la partie visible. Malheureusement l’anti-parlementarisme primaire se nourrit de cette méconnaissance totale du travail des élus ! Comme le veut un système social déliquescent on tape d’autant plus facilement sur celles et ceux que l’on a majoritairement choisi que l’on ignore les obligations de leur travail et que seules les apparences comptent. Avant de plancher devant la « Commission d’enquête chargée d’étudier les difficultés du monde associatif dans la période de crise actuelle » je suis allé assister au lancement de la discussion sur la « loi relative à l’adaptation de la société au vieillissement ». Dans la première situation pas une seule caméra ou un seul micro et pas un seul appareil photo alors que dans le second la presse se tenait en embuscade avec l’œil égrillard en attente de ces apostrophes se voulant assassines descendant des travées. Un travail de fond au sous sol et une pièce de théâtre politique dans l’arène qu’est de plus en plus l’hémicycle de l’Assemblée nationale. En commission d’enquête on écoute, on doute, on échange entre collègues avec le monde réel venu de l’extérieur pour enrichir une réflexion. En séance publique on parle à soi-même avec le sentiment que ce que l’on lit de manière plus ou moins convaincante est la vérité, on joue un rôle de soldat, on se soucie peu de savoir si c’est conforme à l’intérêt général… Pas moins de six interventions successives de la Ministre, de la Secrétaire d’état, d’une rapporteure de la commission des affaires sociales puis de la rapporteure de la commission des affaires économiques, de la présidente de la commission des affaires sociales avant la déléguée de l’Assemblée nationale aux droits des femmes et à l’égalité entre les hommes et les femmes… avec seulement des citations différentes dans chaque discours pour un traitement du sujet identique. Inévitablement on en vient à penser que défilé protocolaire et réglementaire n’offre pas grand intérêt. D’autant que durant une demi-heure la première représentante de l’opposition vient accentuer le caractère procédurier en demandant le renvoi du texte en.. .commission d’où il sort après des mois de débats constructifs. Vu de loin et avec des commentaires appropriés il est aisé de détruire la démocratie représentative dont personne ne comprend les us et coutumes. Dès qu’il y a une médiatisation potentielle la femme ou l’homme politique est bien différent de ce qu’il ailleurs. Plus de confrontation des idées, plus aucune valeur mais simplement une boursouflure des ego qui incite à devenir hostile ou obligatoirement favorable à toute proposition pour gagner l’estime de son propre camp. Stérile et surtout piteux au point de vue de l’image donnée… et une désolante impression de gâchis et de temps perdu ! « Levez la main droite et dites je le jure » me demande Alain Bocquet président de la commission d’enquête dans une salle du 2° sous-sol. Il m’accorde dix minutes de présentation générale du contexte actuel de la vie associative me permettant ainsi de m’exprimer librement sur un sujet essentiel dans l’actualité mais beaucoup moins médiatisé que tous les autres . On entre immédiatement dans la réalité et dans le quotidien : les députés présents sont motivés, solidaires et attentifs. Le jeu de rôle avec els bons et les méchants n’existe plus !

Autant en profiter en rappelant d’abord à ces élus de tous bords que les méfaits du traité constitutionnel européen sur « la concurrence libre et non faussée » poussent les associations « à la française » vers l’entrée dans le secteur « marchand » avec à terme une disparition des valeurs qui le portent. Ensuite expliquer les conséquences terribles de la baisse des dotations de l’Etat (preuves à l’appui!) aux collectivités locales engendrant des suppressions d’emplois associatifs, du découragement des bénévoles et la fin d’une formidable réseau d’activités accessibles au plus grand nombre. Enfin ouvrir une autre piste d’inquiétude relative à l’évaporation des conseils généraux ou leur métropolisation alors qu’ils financent 12 % de la totalité de la vie associative via des subventions. Le bloc communal aura-t-il les moyens de compenser ? Étonnant qu’au sous sol de l’assemblée on s’en préoccupe alors que là-haut dans le pourpre et l’or on fait comme si de rien n’était en leur confiant toujours plus de missions en matière de solidarité (APA, EHPAD)  alors qu’ils paraissent condamnés !  C’est vraiment l’ambiguïté totale, le foutoir complet, la contradiction absolue entre la réalité sans parti pris du sous-sol et celles de l’amphithéâtre où il faut tenir son rôle. C’est toute l’ambiguïté de la onction parlementaire moderne : être un soutier ou une vedette de télévision !

Il serait trop simple de faire un constat et de se contenter ensuite de critiquer : je me décide à leur faire sept propositions concrètes pour permettre au lien social associatif de tenir dans la tempête afin de travailler dans le sens de la commission. A eux saisir si elles sont à la hauteur des besoins de là-haut dans l’hémicycle : Diffuser et faire signer dès que possible régionalement, départementalement, localement la charte sur les engagements réciproques entre Etat, collectivités territoriales et associations qui a été votée mais qui attend d’être mise en application. Instituer le principe du conventionnement obligatoire pour le soutien au milieu associatif quand le soutien dépasse 15 000 euros annuels avec une définition des objectifs et donc des projets. Bien cerner par la loi les secteurs ne relevant pas de la concurrence Définir un statut du bénévole clair et objectif après avoir enfin publié celui des élus locaux. Mettre en complément des relais des services publics prévus par les futurs schémas départementaux  « des maisons associatives » sur les territoires Favoriser la mutualisation des emplois par l’encouragement aux groupements d’employeurs Relancer d’urgence dans le secteur éducatif la coopération à l’école et les foyers socio-éducatifs en définissant leurs financements actuellement à l’abandon Ajouter dans les compétences partagées incluses dans les textes en cours de discussion entre région, département, bloc communal « la vie associative »

On verra… ce qu’ils en feront là haut sous les projecteurs et devant le caméras dans un hémicycle qui  s’éloigne chaque mercredi après-midi  davantage des réalités

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Cette publication a un commentaire

  1. vinz

    Bravo Jean-marie pour ton audition dans les sous-sols du Parlement…
    Je partage tes propositions et notamment celle sur le statut du bénévole.
    Il y a en France 12,7 millions de bénévoles associatifs aujourd’hui… Dans une période de fort chômage, on confond malheureusement emploi et activité. Dans son rapport sur l’état du bénévolat, l’Observatoire France Bénévolat montre que le taux d’engagement bénévole des demandeurs d’emploi est passé de 27% en 2010 à 40% en 2013 (quand celui des retraités passaient de 51% à 48%!). De plus en plus de chômeurs s’engagent donc aujourd’hui dans la vie associative. Ces personnes n’ont certes pas d’emploi au sens de Pôle Emploi, mais ils ont bien une activité qui, en plus, est porteuse de sens et de valeurs dans un objectif de bien-être collectif.
    Je rêverai d’une société ou chacun aurait une revenu minimum d’existence et ceux qui voudraient avoir un emploi en plus le ferait, et ceux qui voudrait avoir une activité sociale pourrait également le faire sans souci de se demander comment ils vont remplir leur gamelle! Utopie? Je ne suis pas sûr. Quand on réalise que le plein-emploi est un leurre qui ne viendra jamais, on se dit que le peu de travail qui reste doit être partagé et l’activité dominante doit être la recherche du bien-vivre ensemble, et les associations ont toute leur place dans cette action.
    Alors, un statut certes, mais celui-ci doit, je le crois, s’inscrire dans un changement plus global de la société. Mais là, c’est du ressort de ceux-du-dessus, et pour l’instant, je n’en ai encore entendu aucun proposer cette société là…
    Amitiés,

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