Buvons un coup à la santé des Chinois mais avec modération !

La Chine a enregistré en février son plus important déficit commercial en plus d’une décennie, de 31,48 milliards de dollars, à cause d’un bond des importations, notamment de pétrole, selon les chiffres diffusés par les douanes chinoises. Les importations ont bondi de 39,6% sur un an à 145,96 milliards de dollars, tandis que les exportations ont augmenté de 18,4% à 114,47 milliards de dollars. Le déficit attendu par ces économistes était de 8,5 milliards de dollars seulement.
Pour les deux premiers mois de l’année, la Chine affiche un déficit commercial de 4,25 milliards de dollars. En janvier, elle avait dégagé un excédent, mais le volume du commerce extérieur chinois s’était contracté à cause de l’impact des fêtes du Nouvel an chinois. Les vignerons bordelais ont grandement bénéficié depuis des semaines de cet engouement des Chinois pour les bouteilles venant de Gironde. C’est le silence qui s’est installé dans les chais, car désormais, les containers partent régulièrement vers le sud-est asiatique. Les ventes ont explosé dans le négoce.
En 2011, Bordeaux a exporté 2,16 millions d’hectolitres (+ 22% par rapport à 2010), soit 288 millions de bouteilles pour une valeur de 1,97 milliard d’euros (+30%). Depuis 2003, lorsque les ventes à l’export avaient atteint 2,02 millions d’hl, c’est la première fois que les vins de Bordeaux dépassent à nouveau la barre des 2 millions d’hl. Le dernier record historique en valeur à l’export remonte à l’année 2008 avec 1,7 milliards d’euros. Sur les pays tiers, les exportations de vins de Bordeaux franchissent le milliard d’euros et le million d’hectolitres pour la première fois, note le CIVB.
Les exportations les plus dynamiques restent sur la zone asiatique, Chine en tête, en volume avec 436.000 hl (+91%) pour un chiffre d’affaires de 334 millions d’euros (+103%). Les vins les plus prestigieux prenant sa direction, Hong-Kong est leader en valeur sur le marché asiatique, avec un chiffre d’affaires de 350 millions d’euros pour 100.000 hl en volume. Ce sont les données fournies par le CIVB… qui affirme même que le tonneau devrait enfin renouer avec les 1000 euros ! Certains affirment que, sur ce rythme, on risque de manquer de vin à vendre à la moitié de 2012, tant le marché chinois connaît une progression spectaculaire. C’est très rassurant, mais ce peut être en même temps un piège, qui risque de se refermer sur le milieu économique du vin, car ces importations sont liées à la croissance sans cesse plus forte de ce pays que Mao ne reconnaîtrait plus. En effet, un ralentissement dans la deuxième économie mondiale paraît inéluctable.
Il faut constater pour mettre un bémol sur l’euphorie ambiante, que le marché intérieur français draine 63% des ventes, dont 43% pour les grandes et moyennes surfaces, 46% pour les autres circuits de distribution (cavistes, vente directe, restauration, etc.) et 11% pour le hard-discount. Les Chinois semblent avoir anticipé ces tendances en augmentant leurs investissements dans le milieu bordelais où, comme pour la restauration, ils achètent tout ce qui peut permettre de s’installer au cœur de l’activité économique. Ainsi, le château du Grand Mouëys à Capian, à moins de 10 kilomètres de Créon, est passé à son tour aux mains des Chinois.
La propriété, qui dispose de 58 hectares de vignes d’appellation Côtes-de-Bordeaux, appartient désormais à Jinshan Zhong. Cet homme d’affaires dirige le groupe Ningxia Hong, le plus important fabricant d’alcool de gouqi (un alcool de fruits très populaire en Chine) avec 300.000 points de vente dans l’Empire du milieu. Le nouveau propriétaire envisage d’exporter 90% de la production du Grand Mouëys vers son pays… et dans ses points de vente. Le reste serait pour l’Europe et plus particulièrement la France.
L’achat de propriétés vinicoles par des entrepreneurs chinois est une tendance qui se fait de plus en plus précise. Plus d’une vingtaine de transactions de ce type ont déjà été finalisées.
Monsieur Jinshan Zhang a de grands projets pour son château girondin : planter une vingtaine d’hectares en plus et surtout développer un concept touristique autour du vin. Le château serait le point central avec tout le confort et les activités nécessaires (chambres d’hôtes, spa, restaurant, tennis et piscine). Le patron asiatique du château du Grand Mouëys espère attirer 10.000 touristes chinois par an sur son nouveau site. Les retombées sur le territoire seront pourtant très limitées, puisque le principe clé de l’économie chinoise « exportée » c’est de vivre en cercle fermé et de « s’autoalimenter ».
La nouvelle donne du marché chinois, avec des importations en forte hausse, ne devrait pas masquer les problèmes essentiels : le niveau de la monnaie chinoise qui fausse les rapports du commerce mondial, l’achat massif de matières premières qui restent les clés de la puissance économique (pétrole, minerais, céréales…), la capacité de récupération des technologies pour les retourner contre ceux qui les leur ont données. Même s’il ne faut absolument pas regretter l’embellie des achats de Pékin, il vaudrait mieux ne pas pavoiser trop vite, et fêter ça avec modération !

Cet article a 2 commentaires

  1. batistin

    Que voilà une bonne nouvelle ! Tout le système qui se casse la figure, il n’y a pas de raison que cela épargne quoi que ce soit.
    Nous devrons par contre surement attendre que chaque chinois puissent profiter de la joie sans pareille de posséder une automobile, pour ensuite, par conscience, comme nous, se remettre au vélo.
    Cela risque d’être un peu long

  2. Christian Coulais

    La marche est encore longue vers la sagesse confucéenne. La grande roue céleste tourne, tourne…Des vélos pour les occidentaux et des wouatures pour l’empire du milieu…Hi Hi Hi. Rire jaune !
    Mais le Président…enfin celui du Club des villes et territoires cyclables, ira les solliciter pour qu’ils reprennent le deux-roues « Flying Pigeon ». Marque chinoise que j’ai utilisée.

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