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Un système inhumain et révélateur de notre époque

Même si c’est prétentieux, je pense que sur certains sujets des chroniques de Roue Libre tentent de constituer des références temporelles sur certains sujets. Il est difficile parfois de ne pas avoir envie de réagir à ce que déversent approximativement et sans aucune retenue des médias peu soucieux d’un rôle éducatif. Leur seul souci étant celui de l’audience ils se gavent de certitudes. Le système n’anticipe rien, tourne en rond, ressasse des analyses allant toujours dans le même sens n’apportant rien à la construction d’une citoyenneté lucide et constructive.

Il arrive que parfois j’ai la satisfaction en puisant dans les milliers d’articles publiés depuis 18 ans de découvrir des sujets sur lesquels je n’avais pas écrit que des bêtises. Le pire, c’est quand je découvre que ce que j e vous avais annoncé se produit. J’ai par exemple maintes fois tenté de sensibiliser au fonctionnement du système des urgences ordinaires de santé. Or hier j’ai pu vérifier que nous allions vers une situation encore plus ubuesque que je ne l’imaginais. Il faut le vivre pour le croire.

Depuis mardi dernier ma prostatectomie rendue nécessaire par la présence d’une « tumeur maligne », me cause quelques soucis. Rien de grave mais des aléas inquiétants. Sorti moins de 48 heures après l’intervention chirurgicale robotisée ayant été en définitive un plus compliquée que prévue, je me suis retrouvé avec soulagement à la maison heureusement bien entouré et heureux car ne souffrant d’aucune douleur.

J’avais été soulagé de ma prostate et de 2300 € de dépassements d’honoraires ce qui ne constituait pas une surprise puisque j’avais signé les devis correspondants. En soirée une fièvre dérangeante s’installa. Bien évidemment elle fut temporairement diminuée par la prise du fameux Doliprane. Rien d’exceptionnel ! 

Tout fut différent quand le phénomène se reproduisit le vendredi à un niveau supérieur. L’infirmier à domicile souhaita alerter mon médecin traitant sur le sujet d’autant que s’ouvrait le week-end. Il se mirent d’accord sur la nécessité d’effectuer des analyses susceptibles de trouver la racine du mal. Cacheton après cacheton je parvins à obtenir quelques périodes de baisse d’une température qui se mit à flirter avec 39° dans la nuit.

Hier quand l’infirmier est repassé il s’est lancé dans le pire des défis : obtenir le passage d’un médecin de garde un dimanche car il soupçonnait une infection urinaire. Fini le bon vieux temps où l’on prenait le journal Sud-Ouest pour dénicher le professionnel de garde. Il est obligatoire de passer par le 15 car ses coordonnées sont secrètes. Sauf si vous êtes mourant le défi ressemble à celui de chercher une aiguille dans une meule de foin.

Le professionnel de santé se lançait dans un marathon. D’abord pour l’échauffement il lui fallu quelques longues minutes pour bénéficier d’une réponse. La première personne à laquelle il explique la situation médicale fait le tri. J’imagine un instant que ce soit moi qui ai appelé…car je pense que ce serait vite terminé. Il n’y pas d’urgence vitale donc elle envoie à une seconde personne qui lui redemande une description complète de mon cas… Nous en sommes déjà à une bonne vingtaine de minutes agrémentés de musique lancinante. L’appel est transmis vers un nouvel interlocuteur auquel il faut à nouveau redonner un descriptif de mon état de santé. Toujours pas de décision.

Ce médecin échange avec son interlocuteurs qu’il prend un peu de haut (il n’est qu’infirmier) et conclut que vu mon âge et mes antécédents cardiaques il lui parait nécessaire… de m’envoyer aux urgences en ambulance. L’infirmier finit pas le persuader que la situation n’exige pas ce déploiement de moyens. Le dialogue est tendu. Il met en attente durant une bonne dizaine de minutes et une nouvelle interlocutrice arrive. Elle pose les questions que ses collègues ont probalement déjà inscrites sur la fiche médicale. Re-re-belote… Elle renonce à son tour à venir.

Les 45 minutes d’attente entrecoupées d’un douzaine de dialogue sont atteintes. Mon porte-parole ne renonce pas : il attend. Une discussion animée que l’opératrice oublie d’occulter s’engage : qui doit intervenir? L’antenne de SOS médecins de Créon (elle refuse car elle ne fonctionne qu’après 20h) ou le médecin de garde déjà très occupé sur un secteur très peiuplé… Une chamaillerie édifiante. Nous en somme à 55 minutes de communication téléphonique. Une solution imposée par le 15 est imposée. Basculement vers un mèdecin de terrain. Ce denier correspondant annonce qu’il passera à mon domicile dans l’après-midi ! On en est à une heure moins quelques secondes d’échange avec le 15 !

En définitive vers 14 heures déboule un jeune praticien de l’antenne de Cenon de SOS Médecins. Un garçon clair, méthodique, concis qui en un quart d’huer dresse toutes les ordonnances nécessaires. Une heure après j’entame un traitement urgent pour éviter que l’infection (j’ai une sonde) se développe. Je n’en tire aucune conclusion. Je livre ce récit comme un témoignage et je m’interroge sur ce que j’aurais fait sans le secours de l’infirmier et sa pugnacité. Ah ! J’ai oublié partout ailleurs il n’y avait que des répondeurs. C’est tellement facile et inhumain. 

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Cet article a 11 commentaires

  1. François

    Bonjour J-M ! ! ! !
    Ces points d’exclamation ne viennent que ponctuer ma position hilare tant ta description correspond à ma rencontre frontale avec le vaisselier familial (lequel va toujours bien : merci !). Je constate que , depuis un an, « nous avons bien progressé» comme dirait l’auteur du blabla présidentiel d’hier soir. Tout dépend de savoir dans quel sens ? ? ?
    Rassure-toi car , d’après un pompier pro récemment rencontré, avec la mise en place de la fameuse dématérialisation , ton C-V médical sera rendu sur l’écran du dernier toubib AVANT … que la fièvre soit déclarée ! ! ! Bien sûr, si la fibre n’est pas coupée ! ! !
    Bonne guérison J-M
    Amicalement

  2. Darmian Marie-Christine

    L’énergie est une vertue bien essentielle dans le monde d’aujourd’hui, la pugnacité aussi. Je me dis que les personnes fragiles, seules, sans forcément les moyens d’appeler, d’argumenter ; qui ne savent pas, qui n’ont pas ou n’ont plus ….
    Tu auras fait économiser à la collectivité un déplacement en ambulance, la mise en œuvre des urgences de l’hôpital, de leurs personnels et tout ce qu’entraîne un transfert vers l’hôpital un dimanche … en fait tu vois tu es toujours solidaire et attentif des deniers publics on te changera pas

  3. christian grené

    Je reste prost… ré.

  4. Dabé

    Bonjour Monsieur Jean Marie. Le petit Médocain a eu la même mésaventure en 2016..
    Intervention, renvoyé dans mes foyers 24h après, retention urinaire, drain dans la vessie et 3 semaines après fièvre de cheval, mais heureusement medecin très énergique qui m a ordonné piqures matin et soir pendant 5 jours!
    Comme quoi les sondages ne sont jamais bons pour la santé.
    Fais attention à toi et reposes toi, c’est primordial. Adishazt. Alain DABE

  5. Jouvet Fabienne

    J’ai de la chance, mon médecin (de Tabanac) me suis encore aujourd’hui, alors que j’habite depuis 12 (13?) ans Mérignac.
    C’est vrai que nous avons, lui et moi une belle amitié developpée au fil des oreillons, varicelle et autres réjouissances de mes enfants…ma maladie « évolutive et handicapante » à été un élément de rapprochement, et d’engagements, jamais mentir, dire les choses de façon à ce que je les comprennent, me donner des alternatives de choix (quand c’est possible..) être présent…. aussi j’ai son tel portable dont je n’abuse jamais, et il « anticipe » j’ai des prescriptions que je n’utilise pas, juste établies « au cas ou » , il me fait confiance, et je lui fait confiance. Je suis confrontée au délais de RDV pour des examens pourtant importants, au tarifs prohibitifs de certains examens, au soins déremboursés (séjours climatique, aucune prise en charge, aucune aide, médicaments dit de « confort » sans lequel mon état ne pourrait être « stable », une BONNE mutuelle, toutes options, une ALD ne suffisent pas à la gratuité de ce dont j’ai besoin, ma prescription mensuelle c’est 50€ parfois plus… non pris en charge. A la retraite depuis 2 ans, j’ai une toute petite pension, et il m’arrive de me poser la question….. « est-ce bien la peine? » … « et si je me passais de ceci, de celà »…. pour l’instant je n’ai fait aucun renoncement, mais demain?…..La gestion de la santé faite par ce gouvernement, réduit espérance de vie des plus faibles économiquement, mais aussi et peut être plus préoccupant éloigne des soins une partie de la population, et est responsable de mort prématurée. Le pire?….c’est que (souvent)la faute n’en revient pas aux soignants….
    Être malade, c’est comme entrer dans un autre monde.
    Les inégalités sont fortes et multiples, économiques et géographiques.
    Un rdv avec un spécialiste dans le public c’est 6 mois d’attente, mais il vous est parfois proposé un rdv plus proche (quelques semaines..voir moins), (avec le même quidam) mais hors convention, et là…. les tarifs frôlent l’indécence.
    Idem pour les examens…. les opérations… la priorité ce n’est pas votre état de santé, et les conséquences d’une intervention tardive… non…mais votre portefeuille.

    1. Laure Garralaga Lataste

      à mon amie Jouvet Fabienne
      Comment avons-nous pu en arriver là… !
      Courage ! Ne lâche rien! Et à bientôt pour de meilleures nouvelles…

  6. J.J.

    Tout cela est bien inquiétant, stressant, angoissant, pour un quidam qui attend des résultats de prélèvements (très douloureux) d’analyse depuis 20 jours et qui ne les voit pas arriver.
    Il faut se décontracter, mais c’est pas facile !
    Repose toi bien et surtout porte toi mieux. Je te souhaite bon courage et la patience du patient ( du latin patere: supporter) qui n’a jamais si bien porté son nom.

  7. Gilles Jeanneau

    Je ne rajouterai rien à tous ces propos fort judicieux mais s’il y a bien un secteur fort malade, c’est celui de la santé!
    Mais la condamnation de tous les services publics a été prononcée il y a déjà fort longtemps…on en est au stade des soins palliatifs.
    Qu’y a -t-il à espérer pour l’avenir?
    Rien de bon et je plains nos petits-enfants.
    Allez, portez-vous bien, c’est la seule chose à faire.

    1. Laure Garralaga Lataste

      @ à mon ami Gilles…
      Un constat malheureusement fort juste… et terriblement inquiétant !

  8. Denise Greslard Nédélec DGN

    Confrontée il y un mois au problème récurrent du besoin d’un médecin en week-end, j’ai eu droit au même parcours qui a abouti à la réponse du 15: « Attendez 20h et téléphonez à SOS médecin, ils ne viennent pas en journée ». Ce que je savais, ayant eu la réponse de SOS médecin 1h avant: « on ne se déplace plus en journée, il faut venir à la consultation » « Oui mais le patient ne pouvait pas mettre un pied à terre » 3 Alors appelez les pompiers! ».
    Nous avons attendu et 20h et à 21h, le toubib SOS était là et faisait soin et ordonnance…
    Ah oui, au fait: le nouveau toubib qui était à son cabinet en face de ma maison n’a pas voulu se déranger pour un non-patient. Si, si…. Quoi, quel serment ?????
    Prends soin de temps JMD, et repos!

  9. Laure Garralaga Lataste

    @ à mon amie Denise;
    Une réponse à ta question : le serment d’Hypocrite… !

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