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« Le Sport » fait son cinéma créonnais (6 et fin)

Le début du XX° siècle avait été vraiment compliqué pour les propriétaires du (grand) hôtel & café de la Prévôté (voir épisodes antérieurs). Les péripéties de la construction de la mairie « Bertal » ajoutée aux vicissitudes de la Grande guerre eurent bien du mal à s’estomper. Les Goettert partis l’établissement passa durant quelques années de mains en mains jusqu’à l’arrivée de celui qui allait lui donner une nouvelle dimension : Victor Mailhes!

Le nouveau venu abandonna progressivement l’hôtellerie de moins en moins rentable, garda seulement la restauration à midi mais se tourna vite vers le nouveau concept du « bar » qui remplaça peu à peu le « café » même si le titre resta sur l’enseigne. A l’origine de cette mutation : l’arrivée de la bière dans la consommation et la nécessité de s’adapter à l’espace réduit de ce qui n’avait été que le hall d’accueil de l’hôtel. Il installa un comptoir avec la fameuse barre pour y poser les pieds. Très entreprenant il détecta l’importance nouvelle du sport dans la vie sociale. A la fin des années 20, Créon se dota en effet du premier club omnisports de son histoire. Il allait tenir près de 40 ans !

Le football fit ainsi son apparition dans la bastide. Le stade situé sur un « pré » situé à la Banlègue sur la route de Libourne n’était pas doté d’autres équipements que les cages des buts. Pour le reste on se déshabillait dans un coin de la pelouse pu dans les premières voitures des dirigeants. Il proposa que son « bar » devienne le siège social du Club Athlétique Créonnais et que l’on puisse y tenir réunion. On s’y retrouva à l’approche d’une nouvelle guerre mondiale pour y boire un coup… après les rencontres ! C’est ainsi qu’un jour apparut sur la façade la dénomination « Le Sport ». La jeunesse créonnaise s’y retrouvait d’autant que le coup de génie de Monsieur Victor allait totalement faire basculer l’image de son établissement.

En association avec un émigré espagnol entreprenant, Guillermo Carrio et un photographe extravagant mais génial, Roland Monge, il convertit en janvier 1941 la salle de danse dominicale du « Splendid » ouverte dans les années 30 et les les garages situés sur l’arrière du Café, en salle de cinéma. Rapidement on y trouva une foule considérable venant voir les premiers films pralants et plus trad en technicolor. Il n’y avait avant leur initiative qu’un séance mensuelle de « lanterne magique » donnée au café concurrent de « La Paix » par un projectionniste itinérant nommé Dos Santos

La réussite fut telle que la nécessité de créer un lieu spécialisé devint évidente. Le « Café Le sports » ajouta donc à ses atouts celui de « Créon Ciné » qui constitua très longtemps le seul espace « culturel » du territoire. Une salle neuve avec ses fameux murs doublés avec des panneaux constitués de « spaghettis » de bois, son balcon pris d’assaut, ses fauteuils en bois rouge, son inénarrable « ouvrante », accueillit des milliers de spectatrices et spectateurs dont je fus avec d’autres objectis que ceux d’un cinéphile! 

Le « bar » toujours identifié comme un lieu de contestation locale et nationale rassemblait de son coté toutes les fortes têtes de la ville. Inutile de préciser que durant deux décennies couvrant la seconde guerre mondiale les élus ne fréquentèrent guère ce lieu réputé si ce n’est révolutionnaire du moins peu compatissant avec les notables ! Le « Café restaurant du sport », comme l’on disait couramment à Créon rassemblait tous les matins et tous les soirs les plus turbulents des habitants d’une cité un peu figée.

Les Italiens fiers d’avoir donné les couleurs « vert, blanc, rouge » au maillot porté par les cyclistes du CAC y tenaient le haut du comptoir. On y organisa des concours de belote mémorables et des quines dont toutes les volailles étaient installées sur une barre placée en travers de l’entrée dans un agencement à faire mourir d’effroi les services vétérinaires actuels ! Il y régnait une ambiance de fête permanente avec des moments épiques surtout dans les années 50 avec des complots en tous genres et le montage de nombreuses « blagues » dans lesquelles les célèbres Roche et Subrenat excellaient !

Engagé comme projectionniste le jeune Paul Célérier devint durant les années 50 le propriétaire de la totalité de ce qui était devenu une vraie entreprise en épousant la fille du propriétaire. Il gérera avec sa femme Créon Ciné jusqu’au 31 décembre 1981 avant de capituler face au système ! Le café repris en gérance par Mme et M. Cissan dès le début des sixties eut le privilège d’accueillir pour les fêtes de la Rosière les vedettes qui venaient s’y produire.

J’y ai rencontré le lundi septembre un certain jacques Brel. Mais grâce au fils du magasin voisin (comestibles et primeurs) Tonio Rotger d’autres y passèrent pour clôturer ces moments exceptionnels dans la vie créonnaise par d’authentiques soirées de gala.

On raconte même qu’un soir débarqua, pour une halte « utile » en une période de campagne électorale des années 70, un certain François Mitterrand… en route pour une réunion publique aux confins de l’Entre-Deux-Mers.. Le café « Le Sport » est mort en 2018 ! Vive désormais Le Bistrot des copains! 

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Cet article a 3 commentaires

  1. Puyo martine

    C’est toujours un plaisir de vous lire. Quelle culture de votre village, qui devient une petite ville, avec ses avantages et inconvénients. C’est incroyable comme elle a changé depuis 20 ans.

    1. Bernadette

      Oui c’est le changement du centre ville de Créon parce que cette commune s’est étirée sur une autre commune comme la Sauve Majeur avec son établissement de restauration rapide qui deplut aux altermondialistes.

      1. Bernadette

        Je lisais sur le site de la commune de Créon le contenu du plan local d’urbanisation. A cet effet il serait souhaitable de desserrer les liens pour éviter la casse de la division des « rats des villes » et des « rats des champs ». Tout ceci est grave.

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