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L’élection partielle qui met en cause la stratégie générale

Une élection législative partielle n’est pas une indication ferme de l’état de l’opinion publique mais elle constitue toujours un repère utile. Ce qui est intéressant, comme pour beaucoup d’autres observations politiques, c’est de savoir dans quelle tendance elle s’inscrit. François Ruffin pour lequel j’ai une sympathie particulière car il a le courage d’aller au bout de ses convictions a tenté de tirer une leçon du scrutin s’étant déroulé en Isère dimanche dernier. On n’a pas beaucoup entendu de prises de position sur ce résultat venant de la gauche. Et pourtant !

Un premier constat s’impose (même s’il est traditionnel en pareilles circonstances) la défiance persiste et s’aggrave vis à vis de la démocratie représentative. Un taux d’abstention de 38,3 %, contre 75,7 % le 7 juillet dernier dans la même circonscription constitue un record. Le territoire électoral pourtant urbain (ville de Grenoble) et périurbain (banlieue assez aisée) n’est pas socialement habitué à ce type de réaction.

Le phénomène de l’indifférence ne cesse de grimper et bien évidemment, personne ne s’en préoccupe alors que l’on arrive à un étiage catastrophique. Presque deux inscrits sur les listes électorales sur trois sont restés chez eux soit parce que l’opposition entre une candidate de centre-droit et un « parachuté » par LFI-NFP imposé par la national ne leur convenait pas ou parce qu’il ne trouvait pas celui qui correspondait à ses idées. Entre les deux tours la participation a augmenté seulement de 7 % ! Sa faiblesse a éliminé réglementairement le candidat du RN et empêché une triangulaire qui pouvait être favorable à LFI.

La stratégie insoumise a également montré ses limites lors qu’un duel de ce type. En effet en imposant un candidat NFP seul au premier tour au nom de l’unité, le parti de JLM avait condamné un candidat pourtant solide. Le scrutin majoritaire repose en effet sur un principe aussi vieux que le système électoral de la V° République : « au premier tour on choisit et au second on réunit ». Lyes Louffok avait quasiment fait le plein des voix et n’avait aucun espoir de récolter des désistements bénéfiques puisqu’il n’y avait pas de réserves. Il était donc battu dès le premier vote de dimanche. Il n’a en effet gagné que 2716 voix au second alors… que son opposante en a cumulé 12 205 supplémentaires ! Résultat : le candidat LFI a été balayé avec seulement 35,7 % des exprimés contre 28,33 % au premier !

François Ruffin a le courage d’affirmer que cette stratégie « des généraux dans leurs bureaux » est suicidaire. Dans cette circonscription la Gauche avait réalisé « 49 % aux élections européennes. Elle était tombée collectivement à 42 % en juin 2024 et se situe globalement à 36 %; Elle a perdu plus de 14 000 voix en six mois. Nous faisons jeu égal sur Grenoble où nous étions largement majoritaires. En dehors c’est la Bérézina. C’est même un vote repoussoir massif ! ». Ce que Ruffin met en cause c’est la vision de Mélenchon voulant qu’il faille travailler essentiellement sur l’électorat urbain et délaisser les zones rurales. Cette élection partielle démontre que cette option s’effondre quand l’abstention est à un niveau élevé. « Ne changeons rien. Fonçons droit dans le mur, » ajoute Ruffin.

Bien évidemment, il n’y a pas eu de remise en cause au niveau national. Les seules analyses qui ont été effectuées se résument dans une formule : «  si on a perdu c’est de la faute aux autres ». Et ont été égrenés les attaques habituelles comme si ce n’est pas ce climat délétère actuel qui provoque un désintérêt de l’électorat pour la Gauche. La diversité n’a jamais été incompatible avec l’unité. Il faut rappeler que la proposition de la candidature de Lucie Castets sur cette circonscription avait été faite. Elle a refusé le challenge car LFI la contraignait à siéger au sein de son groupe en cas d’élection. Le cas de ne se pose plus puisque la défaite le diminue d’une unité.

Dans mon parcours politique j’ai été durant trois décennies, accusé d’être un frondeur. Rocardien depuis 1975 j’ai été minoritaire. J’ai connu cette accusation permanente de « trahir » en défendant des positions différentes des Mitterrandistes mais j’ai toujours pensé que la victoire de 1981 était celle du rassemblement de ce que chaque « tendance » avait réussi, à sa manière, à apporter au pot commun de la présidentielle. L’exclusion, l’anathème, la menace et la pression ne donnent jamais des résultats positifs. L’unité reste un combat car elle nécessite de se détacher de son propre sort pour aller vers l’intérêt général. Et ça devient rare !

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Cet article a 3 commentaires

  1. J.J.

    « L’unité reste un combat car elle nécessite de se détacher de son propre sort pour aller vers_ l’intérêt général_. Et ça devient rare ! »
    L’intérêt général ? Ça existe ça ? Oui dans l’histoire ancienne, avec par exemple Cincinnatus. Historique ou légendaire ?

  2. christian grené

    Ouais! mais, Jean-Maire (de Créon), tu es largement majoritaire sous l’étiquette RL.
    PS: RL sont les initiales de Roue Libre, notre guide.

  3. faconjf

    Bonsoir,
    commentaire tardif sur le sujet du jour que je viens de consulter.  » Cette défaite n’a pourtant rien d’inattendue. Au soir du premier tour, il était difficile de croire à une victoire. Sûrement que l’abstention du groupe socialiste lors de la censure a désemparé une partie de l’électorat NFP… mais pas au point d’aller voter LFI. Bien que sympathique, la candidature d’un combattant pour le droit des enfants n’est pas parvenue à mobiliser et l’abstention fut forte -comme souvent lors des partielles. Pour finir, le NFP perd 6% en 6 mois. Dans l’affrontement sans retenue, la gauche désespère. Parce qu’elle est faible politiquement au double sens du terme : on ne sait pas trop ce qu’elle dit ni si elle peut gagner, surtout face à la marée montante de l’extrême droite. » Regards.fr
    Les socialistes ont justifié leur non-vote de la censure par une étrange formule de leur secrétaire national à la tribune de l’Assemblée « faire la politique du pire c’est faire la pire des politiques, celle qui conduit Marine le Pen au pouvoir ». Voila qui est clair Mollande se voit candidat en 2027 avec à sa gauche le  » conducator » Méluche, qu’il compte éliminer au premier tour en empochant ses voix. Donc pour les faucialistes l’objectif est de temporiser sur la censure. Faire durer le Béarniais est LA condition pour éviter la démission du méprisant. Le front commun pour dégommer le « conducator » tourne à fond et peu importe les conséquences pour la gauche.
    C’est comme disait un proche décédé, compter les œufs dans le c.l de la poule. La gauche est faible et minoritaire d’autant plus qu »elle s’acoquine avec la Mac-Ronnie, elle est faible en voix et en idées. Mollande a un long chemin a accomplir pour faire oublier tous ses reniements et toutes ses trahisons … ce sera sans moi!
    Bonne journée

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