Arrivé le 5 novembre 2011 en transit de Medellín (Colombie) sur l’aéroport Simon Bolivar de Caracas je restais bloqué par une panne de l’avion pour Paris. Suspecté de vouloir entrer clandestinement sans visa dans le Venezuela de Chavez je me retrouvais au milieu d’une fête militaire…
Les uniformes pullulent. Des femmes en tenue de soirée aussi. Dans les salons du grand hôtel de Caracas l’armée célèbre un événement dont j’ignore tout. Du « doré » partout. Des uniformes blancs impeccables et une foultitude d’hommes en civil patrouillent partout dans le hall. Les groupes des naufragés du vol Caracas-Paris attendent eux dans une longue file que leurs chambres leur soient attribuées. Il est plus de minuit. Nous sommes bien évidemment les derniers. Nous restons une dizaine à attendre notre attribution après une heure de patience quand la préposée aux clés annonce alors que l’hôtel est complet et que nous serons logés ailleurs. Du moins c’est que je comprends ! Deux agents de sécurité nous conduisent donc dans une pièce à l’écart de la fête qui bat son plein et nous demandent d’attendre. Pas un mot du Chinois, le Français a averti son garde du corps, l’Irlandais garde un moral à toute épreuve et moi, je tente de faire bonne figure encore marqué par mon « arrestation » pour absence de visa d’entrée au Venezuela.
Les flonflons résonnent dans l’hôtel. Les serveurs en tenu de gala passent et repassent avec bouteilles et pâtisseries. Le Vénézuélien qui est allé téléphoner réapparaît, prend son sac et disparaît. Nous ne sommes plus que quatre. Nous échangeons sur nos fonctions respectives et miracle je découvre que le Chinois parle un Français impeccable. Il m’append qu’il a effectué un stage de formation dans une usine de matière plastique installée dans le Jura où il a appris les techniques avant d’être envoyé au Venezuela pour monter une usine utilisant les dérivés d’un pétrole bien moins cher. Il est attendu par sa direction à Shanghai le mardi 8 novembre à 10 heures. Il flippe ! L’Irlandais rêve d’une bière et le Palois rassure son garde du corps.
Les vigiles surgissent accompagnés d’une sémillante personne qui nous appelle avec nos passeports qu’elle a gardé. Elle est très perturbée car son compatriote n’est plus là. Elle nous questionne. Nous ne partirons pas tant que nous ne l’avons pas retrouvé. Mes compagnons de galère expliquent en espagnol que nous n’y sommes pour rien et que nous ne sommes pas responsables de sa désertion (« Il est parti car il préfère toucher le défraiement en cas de vol décalé de 24 heures que d’aller à l’hôtel. Il est reparti chez lui ! « m’explique le mécano d’hélico). Les négociations se prolongent. Finalement un homme (probablement un policier) appelé en arbitre fais signe de nous libérer. Nous voici partis vers l’inconnu dans un nouveau « bus strip-tease » ! C’est voyage vers l’inconnu et l’incertitude.
Après une bonne quarantaine de minutes de trajet tous les rideaux baissés, nous parvenons dans un nouveau lieu d’hébergement. L’Irlandais passe le mot : « dépêchons nous. Venez, suivez moi on va manger ! Air France paiera». Nous nous installons au cœur de la nuit dans une salle de restaurant encore ouverte et illico nous commandons à boire et à manger sur ses conseils. Peine perdue. Notre accompagnatrice interrompt très notre festin potentiel. Elle annule nos plats et nous convie à un buffet préparé à notre intention avec carottes rappées, tacos et fruits… L’Irlandais emporte sa bière ! Vers 3 heures je me retrouve dans une chambre seul avec le sentiment que tout peut encore arriver. Je suis parti depuis quinze heures de Medellin.
Ma fille prévenue en France de ce qu’il m’arrive cherche à obtenir des renseignements sur le reprogrammé le dimanche 6 à l’heure du précédent. Son efficacité me rassure. On verra bien demain. Dans la matinée on nous annonce un départ de notre lieu de résidence forcée vers 17 heures. Je décide de sortir, malgré une consigne ferme de ne pas le faire, avec mon appareil photo pour découvrir l’environnement immédiat. L’hôtel est isolé dans un parc à quelques centaines de mètres d’un centre commercial. Le vrai Venezuela est là. Un arbre de Noël géant est installé mais faute de décoration il est couvert de lamelles de papier coloré découpées dans des magazines, des boites vides, des rubans rouges. Les rayons sont vides ou peu garnis. On est très éloigné de la réception de la veille au soir. Les achats se font davantage dans le rue, le long du trottoir où sur des toiles des vendeurs proposent tout en petite quantité. Je reste aussi discret que possible… Au moins j’aurai profité du Venezuela !
(à suivre)
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