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La dédiabolisation des extrêmes constitue un poison mortel

« Voici le discours que j’ai prononcé pour le huitième rassemblement de Gironde citoyenne devant le monument de Mauriac (33) aux victimes de la barbarie nazie

« L’exercice de la citoyenneté exige parfois que nous sachions sacrifier notre confort personnel pour accomplir des actes témoignant de notre volonté de consacrer du temps à la mise en pratique de nos valeurs. Aucun effort n’est négligeable. Aucune action n’est inutile. Aucun geste symbolique n’a pas une portée essentielle.  En cette journée de commémoration de la déportation, nous tentons de démonter notre volonté de demeurer des citoyennes et des citoyens debout, solides, convaincus, fidèles à notre idéal, capables de résister en une période tellement propice au renoncement.

Nous avons souhaité, compte tenu du rendez-vous important du premier jour de mai pour justement la citoyenneté dans notre pays, avancer ce rendez-vous devant ce modeste mais tellement précieux monument aux victimes de la barbarie allemande et de ses complices de Vichy.  Pas question pour nous responsables de Gironde citoyenne de causer un accroc aussi minime soit-il dans une unité et un front populaire témoignant de la volonté du plus grand nombre de lutter pour que justement les engagements de justice et d’équité sociale portés par le Conseil national de la résistance qui devraient rester le fondement de notre solidarité républicaine.

Faute d’avoir su ou d’avoir pu entretenir ces principes clés de notre démocratie depuis trop longtemps nous nous sommes condamnés à d’autres formes d’oppression imposées par des pouvoirs agissant sans aucun respect réel de la dignité humaine. Le rouleau compresseur du profit sous toutes ses formes écrase inexorablement notre planète qu’il détruit sans vergogne avec la complicité d’un ultra-libéralisme ravageur. Et nous regardons notre nombril ! 

Les interdictions multiples, le bruit des bottes, le claquement des armes, l’usage de la force, les attaques contre les structures légitimes pour défendre l’intérêt collectif, le dédain pour l’humain, les menaces de guerre totale : jamais nous n’avons peut-être aussi proche d’un basculement vers des idées que nous pensions éloignées de notre quotidien. Elles sont à nos portes. Elles reviennent travesties dans notre quotidien. Le nier c’est se condamner à d’autres formes de fascisme, de nazisme, d’obscurantisme !  La dédiabolisation efface peu à peu comme une éponge sur un tableau noir, la réalité des extrémismes. Elle ruisselle dans les esprits. 

Le carnaval des idéaux a en effet débuté depuis pas mal de temps. Les extrémismes existent plus que jamais, mais ils ont revêtu le masque de la dignité et les oripeaux de la bien-pensance. Ils se délectent des crises sociales, économiques, ethniques, religieuses, culturelles et plus encore de la désespérance ou de la défiance croissante à l’égard du fonctionnement démocratique collectif. Tous les fascismes, absolument tous les régimes autocratiques ou autoritaires sont arrivés au pourvoir en s’appuyant sur ces situations de délitement de la conscience citoyenne et plus encore sur le sentiment cultivé d’insécurité de tous ordres. Ils prospèrent lentement mais inexorablement.

La notion du pourvoir qui doit sanctionner les autres, qui doit surveiller les autres, qui doit pourchasser les autres, qui doit refuser toute concession aux autres, qui ignore les autres, s’impose alors dans des choix électoraux ultra dangereux. L’enfer serait dit-on les autres. Or comme la fort bien dit le pasteur Martin Niemöller : « Quand les nazis sont venus chercher les communistes, je n’ai rien dit, je n’étais pas communiste. Quand ils ont enfermé les sociaux-démocrates, je n’ai rien dit, je n’étais pas social-démocrate. Quand ils sont venus chercher les syndicalistes, je n’ai rien dit, je n’étais pas syndicaliste. Quand ils sont venus me chercher, il ne restait plus personne pour protester. »

L’indifférence est en effet le pire poison de la démocratie. La dédiabolisation portée par les médias aux ordres constitue désormais le pire des fléaux. Il n’y a pas d’idées extrémistes sans danger pour la liberté, la fraternité et la solidarité. Même déguisées elles restent mortelles surtout quand elles sont confortées par des personnalités sans scrupules, sans foi ni loi pratiquant le mépris à tout va. 

Ces hommes massacrés dans la campagne d’Entre-Deux-Mers ont payé de leur vie l’ignominie des agissements d’une armée décérébrée et de ses collaborateurs supplétifs. Cette liste gravée dans la pierre blonde révèle la diversité de cette France qui avait été trahie par ses responsables politiques. Elle porte l’authenticité de ce que finit par toujours être le fascisme « soft ».

Entre ceux qui luttaient avec des moyens limités pour le retour de la liberté, de l’égalité, de la fraternité et ceux qui se contentaient d’espérer en un avenir moins sombre, les SS n’ont pas fait de différence. Ils ont éventré, exécuté, brûlé au nom du mépris pour le sort des plus faibles, portés par la haine pour les résistants, par le culte de la force conduisant tôt ou tard à la barbarie. Ce monument porte le nom de citoyens ordinaires jamais élevés au rang de héros mais simplement d’innocentes victimes pari tant d’autres persécutés pour leur religion, leurs origines ou leurs opinions politiques !

Vous les adhérentes et adhérents de Gironde citoyenne vous savez que notre tâche est immense et qu’en chaque occasion il nous faut apporter une pierre pour tenter d’endiguer par l’éducation populaire le tsunami de la propagande médiatique insidieuse qui dédiabolise tout et n’importe quoi et rend inoffensif ce qui recèle les plus graves dangers.

Nous sommes là pour rappeler que certaines idées mêmes aseptisées peuvent avilir, humilier, tuer plus ou moins lentement ou même justifier des massacres épouvantables de jeunes et de vieillards, d’enfants et de femmes, d’hommes aux origines différentes mais gommées par la mort. Le poison est incolore, inodore et sans saveur lorsqu’il est dilué dans l’eau de l’indifférence. La mémoire reste la sentinelle des peuples. Si elle ne veille pas sur eux, ils finissent par succomber sous le bombardement incessant des idées toutes faites, des affirmations approximatives, des tenants de toutes les intolérances, de toutes les propagandes massives.

La démocratie étant devenue en France une citadelle assiégée, Gironde citoyenne se félicite d’être du côté des défenseurs de ce qu’il en reste.  Soyons vigilants. Soyons combatifs. Soyons intransigeants sur les valeurs républicaines que sont la liberté, l’égalité, la fraternité, la laïcité et la solidarité active. »

 

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Cet article a 8 commentaires

  1. christian grené

    Ce sera mon slogan du 1er mai: « Les dédiabolos » mentent!

  2. Laure Garralaga Lataste

    Contrairement à ce qui dit Maurice Carême, le silence n’est pas toujours d’or !

  3. LAVIGNE Maria

    Merci pour ce billet ! Que chacun prenne conscience que « Liberté, Egalité, Fraternité » ne sont pas de vains mots, qu’il faut les défendre afin que nous puissions vivre en paix. Cependant, certains sont forts parce que nous sommes faibles et que comme la grenouille plongée dans l’eau froide ne se rend pas compte que dessous le feu chauffe doucement jusqu’à ce qu’elle s’endorme. Alors, réveillons nous avant qu’il ne soit trop tard. Levons nous pour dire STOP.
    Bon premier mai fraternel et unitaire

  4. J.J.

    « Vous, apprenez à voir, plutôt que de rester les yeux ronds. Le ventre est encore fécond, d’où a surgi la bête immonde. » Bertolt Brecht, « La Résistible Ascension d’Arturo Ui » – 1941,

  5. RENARD

    Ni la couleur des yeux, des cheveux ou de la peau, ni la religion ou la pensée en elles-mêmes, ne sont synonymes de douceur, de vérité ou de savoir. Ce sont la propagande et la publicité qui ont toujours essayées de nous en convaincre pour se substituer à la réflexion et l’intelligence.

  6. François

    Bonsoir à tous !
    Après ce 1er mai historique …et historiquement contestataire, calmes et rassérénés, vous êtes de retour devant vos ordinateurs.
    Comme je vous sens réceptifs, je vous propose à tous, parents, grands parents et surtout aux anciens instituteurs ces trois vidéos … sur l’Avenir Intellectuel de la Relève  : grand thème n’est-ce pas ?
    Surtout ne zappez pas et passez un bon moment (…enfin ?) jusqu’au mot « Fin ».
    https://youtu.be/H8p-7N_DNVk
    https://youtu.be/sOhK7SUySrQ
    https://youtu.be/3bCPbKf1xWA
    L’orateur est de notre génération … peut-être un lointain cousin d’Ézio ! ! !!!!!
    Comme nous le disaient Nounours et ses copains: « À demain… Bonne nuit les petits … Faites de beaux rêves ! ! ! »
    Amicalement.

  7. Jolivet

    Raconter, répéter inlassablement ce qu’il s’est passé, l’expliquer aux enfants, leur faire lire ou entendre des témoignages de rares déportés ou prisonniers qui peuvent encore le faire, pour qu’ils soient capables de lutter en connaissance de cause contre le retour de la « bête immonde », je crois que c’est tout ce que nous pouvons faire, alors faisons-le!
    Je salue l’initiative de l’école de ma petite-fille qui, pour le 8 mai, au monument aux morts, a décidé de faire chanter aux enfants (CM 1 et 2) »Nuit et brouillard ». Et renseignements pris, on leur a expliqué à l’occasion le sens de cette chanson. Elle a bien compris. J’espère que les autres aussi…

  8. Marie-Odile Beaupuy

    Jean-Marie, merci de tes mots !

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