Il a installa son vélo chargé comme aucune mule accepterait de l’être à quelques mètres de l’Hôtel de ville de Créon. Tout est parfaitement agencé avec deux sacoches étanches de part et d’autre des roues et un ballot parfaitement emballé sur le porte-bagage le bien nommé. Tout respire la rigueur et l’expérience. Philippe est un habitué du passage au cœur de la bastide. Il rentre d’un week-end campagnard et a effectué sa halte technique habituelle au Bistrot des Copains » pour un petit café réconfortant. Pour lui il s’agit d’un acte rituel. Ou presque.
« Pour moi le vélo c’est l’avenir. Dans quelques années il sera l’un des moyens de déplacement essentiels dans la proximité explique celui qui semble passionné par le sujet. Les énergies fossiles ne baisseront plus et il faudra donc réserver leur utilisation aux déplacements les plus longs et essentiels.» Il déguste à petites gorgées le contenu de la tasse alors qu’un fin crachin enveloppe la place de la Prévôté. Quand on lui objecte que cette bruine n’incite pas à se déplacer en pédalant il rétorque que « justement ce temps convient aux efforts à vélo et que la température est parfaite ! Moi j’aime bien ! » Il est le seul ce matin-là!
Pour lui le vélo reste un véhicule « tous temps ». On ne renonce pas selon Philippe en raison de quelques gouttes de pluie. « J’habite dans une commune résidentielle de la métropole sur la rive-droite et je vais chaque fois que je le peux, à tous moments et systématiquement dans le centre ville de Bordeau à bicyclettex. Toujours de la même manière. La seule concession que j’ai faite réside dans l’utilisation d’un vélo électrique pour ces déplacements. » Philippe vante les mérites de ce nouvel engin. « Je mets entre vingt et vingt-cinq minutes et je n’ai aucun souci. Le pédalage facile, les efforts plus ou moins modérés et surtout aucun problème de stationnement même s’il manque de plus en plus d’arceaux ! »
Il explique qu’il a donc deux bicyclettes. L’une utilitaire avec une aide électrique et une comme celle qui est garé à ses cotés pour le plaisir de l’entretien du sport et pour les « trajets ludiques ». Le passager de la pluie pense que dans un avenir très proche il en sera de même. « J’ai calculé que j’utilise à une vingtaine de reprises le premier. Il se recharge totalement en deux heures mais c’est rare que je vide les batteries. Le coût de cette opération est d’environ un euro par mois et je n’ai aucun autre frais. » Son investissement initial dans un engin haut de gamme a été aux alentours de 2 500 €. « Je pense qu’en deux ans j’ai amorti cet achat si j’avais utilisé une automobile pour aller en ville »
Philippe avoue une seule crainte : le vol de son vélo. « J’ai acheté deux anti-vols. En ville je les utilise tous les deux en même temps/ il faudrait un sacré outillage pour se débarrasser de ces deux protections. Il manque aussi pas mal d’équipements de sécurisation comme des espaces réservés. Le pire ce sont les éventuelles bornes de recharge. Il n’y a pas de prise en compte des usages grandissants et la croissance des utilisateurs accentue le différentiel entre les installations et les besoins s’aggravent. Ce n’est pas trop grave pour les vélos puisqu’une simple prise suffit pour le branchement »
Son constat c’est cependant qu’il y a encore bien des efforts de promotion et de prise en compte de la mutation en cours à accomplir. Selon celui qui est un utilisateur assidu mais paisible de ce type de mobilité active le retard dans la prise en compte des déplacements en pédalant varie d’une commune à l’autre. « Bien des élus locaux sont indifférents ou peu réceptifs car ils n’ont pas conscience de ce que l’avenir nous réserve. Ils attendront que la situation soit intenable pour réagir ». Son café s’épuise. La discussion aussi. Il va déverrouiller son vélo. L’enfourche. Sa silhouette fragile contraste avec le volume de sa monture. Il descend la rue à contre sens Pour regagner la piste. Philippe pense et vit vélo.
Je ne peux de me remémorer que durant quatre ans j’ai effectué matin et soir des jours scolaires le trajet entre Sadirac et le collège de Créon avec la lourde bicyclette que mon père avait rachetée à son prédécesseur au poste de garde-champêtre. Dès la sixième, quel que soit le temps, je n’avais pas le choix. J’aime pourtant toujours autant « la bicyclette (qui) me rend ma jeunesse où elle fut pour moi la première expression de la liberté. » selon le constat que je partage de Gérard Bauër. Quelques dizaines de collégien.ne.s sur un millier se déplaceront à la force du mollet lors de la rentrée qui approche. Philippe aura-t-il raison ? J’en doute à moins que la fée électricité ne fasse des miracles.
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Il n’y a pas de prise en compte des usages grandissants… ni de prise de courant…
Oui, je sais c’est facile !
J’ai connu une époque que les etc…où tous les dimanches, devant les cinémas de la ville les hangars à vélo qui avaient été aménagés n’offraient plus une place de libre. Les spectateurs cinéphiles regardaient tranquillement leur film avant de reprendre leur précieuse monture, alors sous l’œil protecteur d’un gardien.
À cette époque, les utilisateurs du vélo, seul moyen de locomotion abordable n’étaient pas trop rebutés par les forts dénivelés à affronter pour se déplacer.
La pénurie de carburant possible ou son accès à des prix prohibitifs provoqueront peut être la promotion de l’huile de mollet (comparable à l’huile de coude).
Mais il est vrai que l’on n’évalue plus les distance de la même façon. Le trajet quotidien que je faisais à pied sans peine d’environ huit kilomètres pour aller en classe me paraît maintenant bien long.
Si 8 km te paraissent bien long… aujourd’hui, c’est la faute à cette ingrate jeunesse qui se permet de t’abandonner… !
Mes excuses pour le retard à répondre à ce Roue Libre du 24… des rendez-vous à ne pas manqués en sont la cause !
OUPS ! ! ! à ne pas manquer !…