La provocation sous toutes ses formes devient une arme sociale et notamment politique. Bien entendu chaque camp reproche à l’autre d’employer cette technique uniquement destinée à capter l’intérêt médiatique ou simplement à démontrer que l’on existe. Peu importe les raisons qui justifient ces actes volontaires puisqu’elles n’ont aucun intérêt dans ce monde où il faut dénoncer, choquer, détourner, insinuer pour satisfaire un public souvent extrémistes dans ses pensées. On admire de plus en plus celui qui démontre une pseudo-résistance à l’ordre réputé établi. Le Front National de Le Pen père et fille n’a vécu et ne vivra que sur ces bases mais il est à craindre que son exemple soit désormais souvent suivi par d’autres apprentis sorciers. Le Maire de Béziers appartient à cette caste des provocateurs professionnels construisant leur notoriété sur des excès et se servant de la réaction légitime des personnes choquées pour se construire une image de rebelle. Le pire c’est que ça marche : il sort toujours de l’anonymat dans lequel il devrait rester par des coups d’éclat volontaires et ostentatoires. Ainsi en deux semaines il s’est réinstallé sur le devant de la scène.
D’abord avec une affiche allègrement placardée dans sa ville sur laquelle un montage présentait une femme ligotée et couchée sur des rails menacée par l’arrivée d’un train de Far-West. Elle hurle à l’approche d’une locomotive en arrière-plan, assortie du commentaire en lettres capitales : « Avec le TGV, elle aurait moins souffert ! ». D’autres affiches sur le même thème ont été placardées dans la ville, dont l’une avec le slogan : « Alors t’accouches ! ». On y voit un obstétricien qui tient dans ses mains une motrice de TGV avec en premier plan les jambes écartées d’une femme qui accouche.En septembre, Robert Ménard avait déjà suscité la polémique avec une affiche utilisant la rhétorique des violences conjugales sur laquelle on pouvait lire : « L’État étrangle nos communes ». Ces tristes réalités ont été attaquées en justice par les autorités mais pendant ce temps le buzz permet au premier magistrat de parader et de se couvrir de gloire auprès de ses partisans. Il assurera sa défense avec les deniers publics après avoir financé son opération avec cette même filière. Il ne risque qu’une belle campagne de pub personnelle gratuite !
Ensuite il installe une crèche dans l’hôtel de ville ! Inutile de préciser qu’il connaît fort bien la jurisprudence en la matière. La provocation fonctionne ! La crèche de la mairie de Béziers va déménager. C’est le maire qui l’annonce après la décision du tribunal administratif de Montpellier qui oblige la Ville à la retirer. Les santons vont donc migrer vers le hall d’un bâtiment tout proche et l’initiateur de cette installation se réjouit presque d’avoir été condamné. Dans un communiqué, la municipalité condamne « une décision aberrante contre laquelle la Ville de Béziers se réserve le droit de faire appel. Mais ce qui frappe le plus, c’est que cette décision de justice vient à la suite d’une plainte… du préfet de l’Hérault. Il ne s’agit plus là de quelques associations “laïcardes” bien décidées à faire la peau à nos santons, comme ce fut le cas en 2014 ou 2016. Non, cette fois c’est bien l’État qui, seul, via son représentant dans l’Hérault, fait retirer la crèche. C’est une “première”, dont la portée symbolique – et historique – n’a pas fini de nous abasourdir. » explique la municipalité biterroise. La Ville n’oublie pas de dénoncer le jugement administratif, qualifié d' »ahurissant », ajoutant, « ainsi, on apprend que le juge des référés est désormais compétent pour juger de l’aspect culturel – ou non – d’une manifestation dans le cadre des animations de Noël.
Bien évidemment les fans de ce type de présentation vont inonder les réseaux sociaux de leur hargne à l’égard des adversaires de la culture « traditionnelle » française oubliant sciemment que les églises ont accueilli et peuvent encore accueillir cette scène religieuse. Ils vont y aller de la dénonciation de la laïcité dans l’espace public considéré comme une agression à l’égard de ce qui relèverait de l’ancrage culturel applicable à tout le monde ! L’agresseur se transforme en martyr comme c’est le cas pour tous les exploitants des réflexes identitaires. En définitive c’est une bien belle opération pour un Maire habitué dans un passé récent à défendre les journalistes menacés par des régimes définis comme dictatoriaux !
Dans toutes les enceintes politiques même les plus modestes cette technique fait école. Il n’y a plus de vrais débats mais des prétendus arguments ou des faits balancés comme des brûlots destinés à mettre le feu aux poudres. Leurs auteurs savent que ne pas leur répondre constitue une approbation tacite de ces excès intentionnels alors que dans le cas contraire on donne une importance démesurée à des incidents sans intérêt. La marge est faible pour celles et ceux qui préfèrent l’important au dérisoire mais qui ne peuvent pas céder sur les valeurs qui fondent leur action.
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Le provocateur a toujours raison :
Si aucune action n’est intentée contre lui, il a gagné ; il peut en toute impunité imposer ses déclarations rances et moisies à une majorité amorphe.
Si l’on réagit en condamnant et en réprimant son action, il a beau jeu de crier au martyre, en employant bien sûr des arguments parfaitement subjectifs, car c’est là son « fond de commerce ».
Dans tous les cas il aura réussi son « spot publicitaire ».
J’ai établi comme principe de ne plus jamais m’arrêter dans les villes gouvernées par des abrutis notoires ou par des FN ce qui revient au même; c’est dommage car Béziers est un belle ville…
Il serait difficile de me trouver en quoi que ce soit complaisant avec l’ extrême-droite ou Ménard mais là quand même… plus personne n’ est Charlie! Tout le monde la main sur le cœur jurant qu’ il n’ aime pas la presse de Charlie, qu’il soutient la liberté d’ expression mais là la au pied du mur ce n’ est plus pareil! Pas de pédagogie, de la cabale. Il y a longtemps que je réprouve les agissements de Ménard, même quand tout le monde rampait derrière lui à l’assaut de la Chine et pour le Dalaï-lama. A cette époque il ne semblait pas qu’ il y ait eu grand monde qui soit allé voir sur le site du Dalaï-lama voir ce qu’ il voulait comme constitution pour le Tibet. C’ était invraisemblable de voir ce « tous avec Ménard ». Je suis content de voir la prise de conscience qui a suivi mais de là à sombrer dans le tout répressif… Doit-on revenir au slogan de 1968: « Pas de liberté pour les ennemis de la liberté »? Je crois que l’ on a fait du chemin depuis. Pour contrer les idées qui sont contraires aux nôtres il vaut mieux attaquer positivement au lieu de réprimer par la censure et les tribunaux et donner des billes à l’ adversaire. Même si parfois ça me donne des boutons! Une autre leçon de 1968: « Répression piège à cons ». Ne tombons pas dedans.