Il est là ! Gigantesque ! Il glisse lentement vers le bleu de la Méditerranée alors que le plus souvent il a la tête dans celui du ciel sicilien. Il s’étire sur l’horizon qu’il barre de sa silhouette massive. Un léger panache de fumée où se mêlent le blanc le plus rassurant et le noir inquiétant descend lentement mais continuellement de ses entrailles comme une vapeur s’échappant d’une casserole à spaghettis. L’Etna reste le maître de cette île où il a élu domicile depuis des millénaires. En fait il impose une force tranquille plus angoissante que rassurante. Son sommeil ressemble à celui de Raminagrobis attendant son heure pour décocher un coup de griffes mortel vers ceux qui lui ferait trop confiance. Et d’ailleurs chaque jour qui passe de petites pustules appelées « maisons » n’hésitent pas à le défier en s’installant le long de ses flancs. Il suffirait qu’il se bouge légèrement pour s’en débarrasser avec les imprudents qui les habitent. Impossible d’avoir des certitudes. La seule c’est qu’un jour ou une nuit… le réveil interviendra.
Derrière l’image du pépère qui fume tranquillement se dissimule un dangereux récidiviste.Éternellement paré de neige en guise de moustaches entourant sa gueule très légèrement entrouverte l’Etna méprise ses microbes curieux venant le défier. Il suffit qu’il ronronne un ton au-dessus de son habitude pour que les observateurs s’interrogent sur son humeur. Le mardi 28 février dernier, pour la première fois de l’année, des coulées de lave incandescente ont pu être observées sur ses pentes. Le volcan, qui est l’un des plus actifs du monde, était resté dans l’ensemble assoupi ces deux dernières années et après cette agitation angoissante il est lentement revenu dans son sommeil.
De loin sa « nueva bucca » comme on dit à Naxos ne bave plus le feu. La dernière bavure majeure de l’Etna a plus de 3 300 mètres d’altitude remonte à moins d’un an sans faire de victimes mais en ayant bien ébranlé le moral des milliers de personnes installées à ses pieds. Le fourneau à l’instar d’une locomotive avait lâché dans l’air ambiant un panache d’une hauteur de sept kilomètres provoquant un phénomène exceptionnel baptisé d’orage volcanique.
Très prisé des touristes il affiche des visages différents selon la période de la journée. Le soleil levant montant de la mer l’éveille lentement et réchauffe les hectares de mandariniers, de citronniers ou d’orangers qui prospèrent sur ses cendres fertiles. Le lever du « roi » a un coté spectaculaire même si parfois ce dernier met du temps à sortir de l’ombre ou à mettre le nez hors des ses draps de nuages. Du village de Castelmola juché sur le pointe des pieds d’un piton, dans l’air frais du matin qui chasse le voile pudique de la brume de chaleur, les plus assidus des « courtisans » de passage profitent de cette scène sans cesse renouvelée.
En soirée le rite est différent puisque l’Etna finit par éclipser le soleil laissant seulement quelques rayons traverser son panache blanc auquel il est agréable de se rallier. Il entre dans la nuit avec pudeur laissant sa silhouette massive se peupler progressivement des lucioles intermittentes ou stables des villages alors que le bord de la mer éclabousse de lumières de fêtes comme pour faire oublier que là-haut dans l’obscurité Raminagrobis ne dort jamais. Que sera demain ? Les prévisionnistes le savent un tant soit peu. Les autres ont leurs recettes maisons pour connaître l’humeur de leur volcan. Si les fumées sont très sombres et fournies l’éruption menace mais c’est extrêmement difficile de le savoir de nuit. Alors on fait semblant d’être rassuré !
De multiples chapelles ou oratoires constituent une ceinture réputée protectrice face à ce qui reste une vraie énigme sur son comportement. Depuis des siècles l’imagination a largement compensé la peur normale de ce « géant » aux redoutables crises. Selon certains conteurs qui osent se livrer le Roi Arthur résiderait, selon la légende, dans un château sur le mont Etna, dont l’entrée cachée serait l’une des nombreuses grottes mystérieuses qui parsèment. Le roi des Saxons (que vient-il faire en Sicile?) apparaît également dans une légende, l’un du cheval de l’évêque, racontée par Gervais de Tilbury. Selon les dires des Anglais l’âme de la reine Elizabeth II d’Angleterre réside maintenant nell’Etna, en raison d’un pacte qu’elle a fait avec le diable en échange de son aide pour gouverner le royaume… Autant dire que les vulcanologues de Catane, cette ville qui a appris à vivre avec « son » volcan préfèrent se référer à leurs instruments qui auscultent le ventre de cette bête loin d’être immonde mais qui renaît pourtant régulièrement pour le malheur des Siciliens et le bonheur des touristes.
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Cher Jean-Marie et tous les lecteurs de ton blog, je tiens à présenter mes excuses pour mon erreur faite dans le précédent blog sur la Sicile. Il ne s’agissait pas du Vésuve mais de l’Etna. Ce volcan encore très actif est bien celui de la Sicile, situé au pied de Catane. Pour ceux qui peuvent aller en Sicile, je leur conseille de déguster les vins de l’Alcantara, produit dans de magnifiques vignobles situés à l’est de la Sicile.
Bonjour !
Passionné de mots croisés, mais aussi avec Google Earth et une encyclopédie vivement feuilletée, le Goncourt de géographie a été attribué à Jean-Marie, impliquant l’erreur aux vapeurs soufrées de l’Etna à moins que certaines effluves des derniers « écoulages » du Créonnais ….. ! ! !
En souriant,
Cordialement.