Qui définira précisément ce qu’est l’urgence ? Elle peut être dans tous ses états et avoir trait à la santé, à des catastrophes, à l’économie ou à la sécurité mais toujours elle concerne un nombre limité de personnes durant une période très réduite. Même si on attend toujours trop longtemps aux « urgences » de l’hôpital on espère en sortir avec une solution permettant de résorber une situation difficile passagère grâce à des spécialistes toujours attentifs et professionnels. En France il n’est pas inutile de rappeler que nous sommes concernés par des mesures spécifiques liées à la protection des biens et des personnes depuis…38 ans !
La première instruction interministérielle relative à la mise en œuvre des mesures de « vigilance » en cas de menaces d’agressions terroristes date en effet de 1978. Elle est prolongée en 1981 par le plan gouvernemental « Pirate » qui vise à faciliter la prise de décision du Premier ministre dans le cadre de la lutte contre les actes de terrorisme en général. En 1995, le plan gouvernemental « Vigipirate » définit la répartition des responsabilités centrales et territoriales, ainsi que les principes pour conduire l’action de l’État dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Il définit deux mesures générales de vigilance (Vigipirate simple et Vigipirate renforcé) et un certain nombre de mesures spécifiques de vigilance et de prévention en cas de menaces spécifiques (menaces sur les aéronefs, menaces d’actions de type nucléaire, menaces d’actions de types biologiques et chimiques, menaces d’actions sur les navires.
Il a été est actualisé en 2000, en 2002, en 2003 et en 2006. C’est en 2003 que sont définis les 4 niveaux d’alerte en vigueur jusqu’en février 2014 : jaune, orange, rouge et écarlate. La refonte de 2014 est bien plus importante que les précédentes. Elle élargit le périmètre des acteurs associés au plan (collectivités territoriales, opérateurs économique), elle rend public une partie du plan, elle rénove le mode de fonctionnement du plan. Il prend de l’ampleur et il est présenté comme « LA » protection collective contre les actions terroristes.
A plusieurs reprises il a cependant évolué avec des dates liées à des attentats ou à des guerres. le 5 janvier 1991 il est activé au stade renforcé et le 17 janvier 1991 à l’occasion de la guerre du Golfe. Il revient de nouveau au stade renforcé le 6 octobre 1995 (attentats du RER Saint-Michel le 25 juillet et du métro Maison blanche le 6 octobre), il est alors appliqué sans discontinuer, notamment en 1996 lors des attentats du RER Port Royal, en juin 1998 (coupe du monde de football), en avril 1999 (frappes aériennes au Kosovo), le 11 septembre 2001, en mars 2003 (intervention américaine en Irak), en mars 2004 (attentats de Madrid), en mai 2004 (commémoration du débarquement de Normandie), en juillet 2005 (attentats de Londres), date à partir de laquelle il est resté au niveau rouge jusqu’à l’abandon du code couleur le 20 février 2014 pour devenir d’application permanente. A chaque événement personne n’a remis en cause l’efficacité de ces dispositifs alors qu’ils se sont avérés inopérants face à des actes terroristes.
Le déploiement de l’Armée, la multiplication des barrières, les interdictions de manifestations ou de regroupements n’ont en rien modifié l’œuvre terrible des barbares. Il faudrait donc se poser une question simple : est-ce efficace ou est-ce simplement une application superficielle destinée à tenter d’ôter les effets de la peur collective ? Si c’est le premier point que l’on retient il faut bien convenir que le résultat en 2015 alors que nous étions sur une dispositif écarlate n’a pas été convaincant car tout simplement jamais le « risque zéro » dans tous les domaines ne sera garanti. Si c’est uniquement pour le décorum sécuritaire on peut considérer que la force de l’habitude a considérablement amoindri ses effets. Il a donc été décidé de franchir une étape exceptionnelle en proclamant « l’état d’urgence ». ! C’est rappelons le une situation spéciale, une forme d’état d’exception qui restreint les libertés. Il « confère aux autorités civiles, dans l’aire géographique à laquelle il s’applique, des pouvoirs de police exceptionnels portant sur la réglementation de la circulation et du séjour des personnes, sur la fermeture des lieux ouverts au public et sur la réquisition des armes ». Il dessaisit la justice de certaines de ses prérogatives.
Historiquement voté pour faire face aux événements liés à la guerre d’Algérie, l’état d’urgence a été appliqué cinq fois entre 1955 et 2015, et une sixième fois depuis le 14 novembre 2015 sur tout le territoire en raison des attentats du 13 novembre 2015. Ce n’est donc que très exceptionnel et hors des règles du droit.
En fait il ne s’agit plus de dispositions matérielles comme pour Vigipirate qui reste en vigueur mais de dérogations fortes aux règles ordinaires de la vie collective. Or le premier Ministre a déclaré tout de go que cette situation devait se prolonger durant encore 6 à 7 mois minimum ou jusqu’à l’élimination de Daech soit plusieurs années. C’est insensé car le même jour le Conseil d’Etat vient de casser l’une de ses applications consistant à assigner à résidence des personne suspectées d’être dangereuses comme des militants écologistes. Du coup l’Elysée a laissé à Nicolas Sarkozy le soin d’annoncer qu’il serait « probablement prolongé » ce qui est désastreux avant d’expliquer qu’il serait seulement maintenu durant 3 mois contre l’avis de milliers de militants des Droits de l’Homme inquiets que l’exception devienne la règle commune ! Encore une fois on expliquera que la situation exige que l’on abandonne les valeurs démocratiques… C’est un raisonnement qui peut mener vers des horizons très sombres !
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L’année prochaine les présidentielles et un pays nommé France foutu
Chère Bernadette,
Vous me faites doucement sourire, tant de personnes se sont battues pour s’exprimer à travers d’un bulletin de vote.
J’ai beaucoup d’espoir de voir, pour cette nouvelle échéance, une nouvelle génération de dirigeants politiques bousculer nos « grisonnants » cumulards et de nous apporter une France nouvelle et non « foutue ».
Bonjour Joël,
L’espoir fait vivre, tout simplement.
La division est en marche. C’est contraire se la démocratie. Mais en fait c’est quoi la démocratie ?
Bien à vous
Bernadette
Est ce que l’État d’urgence est dû à la reconquête de la biodiversité. Je connais une commune qui a gelé ses terres pour la protection des chauves-souris. Donc à cause des chauves souris impossible mettre des terrains en construction.
Il y a tant d’humains qui vivent dans leur automobile.
C’est la loi.
Il y a les sciences sociales, il y avait les hautes études en sciences urbaines. Maintenant il y a la connivence, aucun contrôle de ces plans d’aménagement qui servent l’image du plus fort.
Au cours de la décennie passée, grand changement des lieux dits. Les champs sont bordés par des rues. Changement de rues oblige etc….Diminution de la surface habitable puisque un terrain comportant une habitation a été partagé en 3
Ces formes d’aménagement créent des conflits, personne ne se soucie du bien être des habitants dans ces zones coupées à la hache.
Je partage le pessimisme de JC DARMIAN.
Par un machiavelisme poussé « pépère HOLLANDE » cherche à maintenir la France en état de guerre de façon à siphonner des voix à Droite en faisant preuve d’autoritarisme (et non d’autorité……) .
NON nous ne sommes pas en guerre , mais tout simplement en lutte pour éradiquer la gangrène de l’obscurantisme religieux que nos politiques nourrissent avec leurs débats polémiques et populistes du type déchéance de Nationalité.
Profondément à gauche , je suis désabusé et consterné et je vois une fuite vers l’extrême droite et les risques sous-jacents qui se cachent derrière.
Regardez ce qui se passe en Pologne et Hongrie .
Merci Mr DARMIAN de maintenir cette lucidité morale et sens critique au travers de vos chroniques .
Bien cordialement à chacun