En été il existe une chasse ouverte en permanence sur tous les terrains où évoluent des célébrités : celle des autographes. S’il ne faut pas un permis particulier pour traquer le « gibier » il est parfois indispensable d’avoir parfois un sésame payant comme un billet d’entrée dans la « réserve » ou une « invitation » privilégiée. Muni du précieux sésame il devient alors possible d’approcher des lieux où viennent les « proies » attendues. Comme il n’y a aucune exclusivité en la matière la concurrence s’annonce rude (sauf effet de surprise) car les chasseurs abondent lorsque les vacances sont venues.
Toutes les générations participent à cette lutte impitoyable pour obtenir la signature d’une personne réputée célèbre grâce à l’onction sacrée donnée par la télévision. Que ce soit dans le domaine du cinéma, du sport ou des variétés les « vedettes » sortent davantage en période estivale et se prêtent plus volontiers qu’en d’autres saisons à cette traque menée par des meutes affamées prêtes à voler une miette de célébrité. Elles évoluent sur tous les terrains témoignant parfois d’une patience exceptionnelle. A la sortie d’un entraînement des grands clubs sportifs, au départ d’une étape du Tour ou d’un critérium cycliste, à la sortie des artistes d’un concert, à la porte d’un restaurant ou d’un hôtel ces amateurs de preuves de leur familiarité avec l’exceptionnel se massent sur le passage avec l’espoir d’intercepter celle ou celui qu’ils envient. Il arrive qu’ils rentrent bredouilles et déçus par le manque de considération de celle ou celui qui sera passé sans le moindre regard ou tellement vite qu’il aura été impossible de l’intercepter.
Jeunes, moins jeunes, hommes, femmes, passionnés, curieux, avisés, ignorants, indifférents habituels : la chasse aux autographes concerne absolument toutes les catégories sociales. Impressionnant de regarder ces foules diversifiées qui se pressent un stylo à la main ou depuis quelques années un téléphone mobile brandi comme une arme permettant de réaliser le hold-up parfait que devient le fameux selfie ! Prêts à tout pour l’arracher ils s’accaparent souvent violemment « l’objet de leur désir » et le coller contre leur face hilare pour ramener le cliché qui fera leur fierté. Le selfie remplace pour les plus costauds et les plus audacieux la fameuse signature moins identifiable et surtout moins révélatrice de l’exploit accompli pour l’obtenir. Tenir par l’épaule une vedette devient en effet la marque d’une proximité exceptionnelle avec les gens qui comptent ! Cette nouveauté complexifie la situation et rend encore plus âpre la bataille pour la « griffe » de luxe.
Les parents ou les grands-parents emmènent par exemple les enfants ou les petits-enfants émerveillés ou intimidés chercher la signature leur permettant d’épater les copains. Ils tentent de les glisser au plus près de celle ou celui qui, stylo en mains, est englué(e) dans une foule oppressante. Impossible de savoir si le jeu ne les passionne pas davantage que le quémandeur parfois très intimidé et s’il n’abuse pas du statut enfantin pour obtenir plus aisément leur butin. La bataille fait toujours rage ! Elle se renforce avec le niveau de notoriété de l’arrivant. Les gamins ne sont alors guère épargnés par des adultes « autographophages » prêts à tout pour arracher ce qu’ils considèrent comme un dû de la part de leur idole. Ils osent tout, jouent des coudes, bousculent sans vergogne, affrontent la concurrence, agrippent le signataire, effraient les plus faibles pour parvenir à leur fin. Le timide ou l’hésitant n’a que peu de chances d’obtenir satisfaction. Il se contentera des seconds rôles et même parfois d’usurpateurs n’ayant absolument aucun intérêt réel.
Le spécialiste lui a soigneusement préparé « son ouverture » en se procurant les magazines idoines, les photos appropriées, le tee-shirt fraîchement sorti, le maillot de l’exploit ou d la saison, le livre complet ou le CD en lien avec le « gibier ». Il est armé d’un feutre parfaitement adapté au support choisi et il connaît déjà les habitudes de sa « cible ». Souvent d’ailleurs il pratique la demande en rafales pour distribuer autour de lui avec un sourire satisfait les autographes récupérés. Il témoigne d’un sans-gêne désarmant vis à vis de celle ou celui auquel il s’adresse. Ce collectionneur se niche souvent parmi les fanfarons, les VIP, les proches du milieu dans lequel évolue la « vedette » qu’il oubliera bien vite dès que sa notoriété baissera. Il y a pourtant des exceptions avec des valeurs sûres de l’autographe, des « signataires » inusables comme Raymond Poulidor ou Zinédine Zidane. Par contre beaucoup « d’anciens » baissent les yeux devant le déchaînement de passion que génère l’appartenance au monde médiatique. On y voit de la nostalgie et des regrets : on ne leur demande plus aucun autographe ! Toute gloire a son revers.
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