Le Congrès des Maires constitue toujours un moment clé de l’année politique. Celui de cette année sera un peu plus important que les autres puisque environ un tiers des présents vient faire ses adieux au mandat le plus estimé des Français. Certains le font pas lassitude personnelle, d’autres font ce choix par pression excessive d’un système social en panne et une infime minorité pour se mettre en conformité avec le non cumul des mandats. En fait c’est la génération Mitterrand qui met les voiles, celle qui avait été élue en 83 ou qui avait fait cette année là ses débuts municipaux avant d’accéder à des responsabilités de gestion. Elle avait, selon le vœu même du Président d’alors, tissé en France un réseau de militantisme progressiste engagé qui a, jusqu’à présent ,constitué un foyer de résistance jamais réduit par l’UMP dans les villes moyennes ou qui a permis de gagner des conseils régionaux et de conseils généraux.
Ces élus ayant eu souvent une longue appartenance à l’engagement syndical, social ou politique vont disparaître du paysage sans avoir toujours une relève autant engagée dans la durée. Bon nombre d’entre eux ont été des bâtisseurs au sens idéologiques du terme, c’est-à-dire des gens préoccupés par la qualité des réalisations dans les domaines de l’enseignement, de la culture, du sport, du social. Il est vrai qu’ils ont bénéficié d’une conjoncture favorable et ils sentent bien que cette période est terminée. Les marges de manœuvre sont réduites voire inexistantes et la pure gestion financière a pris largement le dessus sur toutes les autres considérations. Or tous se retrouvent dans une seringue où les idéaux entrent en masse pour ne ressortir que par le trou de l’aiguille des moyens.
Le gouvernement viendra chercher au Congrès une improbable solidarité des élus de proximité. Il ne l’aura pas car les maires ne sont globalement, dans bien des cas, que la courroie de transmission des récriminations de la base. Ceux qui tirent leur révérence ne s’engageront guère car ils ont le sentiment de ne plus être d’une grande utilité. On louera leurs mérites avant de les piétiner car forcément leurs décisions seront considérées comme mauvaises. Ceux qui repartent ont tout intérêt en revanche à ne pas froisser leur électorat et à prendre le vent de la contestation les poussant vers l’opinion dominante. Ils vont donc inévitablement, durant cette semaine, taper sur les réformes dont celle, considérée comme la plus porteuse pour une élection municipale, celle des rythmes de la vie scolaire des enfants. Un sujet magnifique et une aubaine pour un Congrès toujours placé sous le signe pervers de l’apolitisme de droite ! Soutenir, quand on est UMP les revendications des enseignants supposés de gauche : un vrai bonheur! Flatter les parents ne voyant pas l’intérêt d’offrir à tous les élèves une chance d’ouverture sur la culture, les sports, la citoyenneté dans la mesure où ils ont les moyens de le faire eux-mêmes c’est aussi un atout supplémentaire. Et penser que les familles les plus déshéritées ne vont pas manifester pour réclamer une école plus éducative et ouverte. Donc « politiciennement » c’est un véritable cadeau avant une échéance où encore une fois les « anti-tout » pourront fédérer des intérêts particuliers contradictoires mais réunis par la tendance générale qui traverse le pays. Il faut s’attendre à l’union sacrée entre une partie de la gauche et l’UMP afin de mener la bataille sur un rythme soutenu !
Il sera également question de la fiscalité…Tout le monde oubliera bien évidemment que le gouvernement actuel paye au prix fort la réforme des ressources locales de 2011 qui a vu un transfert massive de la participation du milieu économique vers les ménages. On est rendu dans le financement par l’impôt local à un rapport de 30-70 % sans que personne ne s’affole à part les élus UMP qui clament au matraquage fiscal dès que les socialistes touchent aux taux d’imposition. Si on ajoute la baisse inévitable dans le contexte actuel des dotations de base de l’Etat les raisons de contester existent et le Congrès ne sera qu’une caisse de résonance pour des médias avides de Hollande bashing. Ce sera d’autant plus aisé que le Président de la République sera absent… et que son Premier des Ministres ne sera porteur que de craintes mais surtout pas d’espoir. En 20 ans de Congrès je n’ai jamais vu de Maires heureux. Il y a cette année encore moins de chances qu’à l’habitude que ce soit différent…
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