Les sénateurs se lâchent théoriquement sur l'évasion fiscale

Dans quelques mois on va s’apercevoir que le Sénat que l’on considérait comme la maison de retraire de la vie politique française a désormais une audace bien supérieure à celle de l’Assemblée nationale. D’ailleurs depuis l’arrivée au pouvoir de François Hollande le Palais du Luxembourg est devenu plus rebelle, plus constructif, plus contestataire, plus audacieux que le Palais Bourbon. On semble même beaucoup plus bosser dans bien des domaines dans la docte assemblée que dans les rangs d’une majorité et d’une opposition engluées dans leurs engueulades télévisuelles hebdomadaires. Les sénateurs sont devenus tellement suspects de contestation permanente que quelques Ministres ne s’y présentent plus et que l’Élysée aurait tiré un trait sur son rôle dans l’élaboration des lois ! Sacré revirement des habitudes. Chaque jour une commission, un groupe de travail, un rapport arrivent de chez les « sages » et décoiffent singulièrement tant ils sont hors des chemins battus. Est-ce l’approche ds élections qui donnent de l’imagination, de l’esprit critique, de l’audace à la Haute Assemblée ? On peut le penser mais plus simplement ce serait un rajeunissement et plus encore une plus grande indépendance par rapport à l’opinion dominante support du suffrage universel qui donnent des ailes à ces «rapporteurs », ces sénateurs ou sénatrices qui tiennent tête au gouvernement sur bien des sujets, laissant les députés courber l’échine grâce au jeu des institutions.

Publié ce matin, le rapport du Sénat sur « le rôle des banques et des acteurs financiers dans l’évasion des ressources financières » ne va bouleverser le monde de l’évasion fiscale mais il contient des propositions « honnêtes ».

Les sénateurs ont en effet surtout identifié de nombreuses questions, parlant du « trou noir » des statistiques financières internationales, de « l’ombre » du blanchiment ou encore des « zones d’ombre » de « l’affaire HSBC » (au cours de laquelle un listing de clients Français détenant un compte en Suisse avait été exfiltré). Aucune grande découverte sauf que finalement les fuites et les carences sont au moins citées et donc « officialisées »

Pour en apprendre davantage, on attendra que les sénateurs se lancent dans un nouveau document d’enquête consacré aux « activités des entreprises financières dans les territoires du offshore ». En attendant, ce sont précisément ces nombreuses inconnues qui nourrissent les recommandations des sénateurs. L’un de leurs objectifs étant justement d’améliorer l’information qui selon eux est insuffisante. Ils proposent notamment d’« assurer une protection adaptée des lanceurs d’alerte » et de « doter les personnels dédiés au contrôle interne de conformité d’un statut de salarié protégé ». On sit par exemple que la BNP posséderait plus de 150 filiales à l’étranger dont la bagatelle d’une cinquantaine dans des pays pour le moins suspects ! Comment contrôler un tel réseau ?

Un deuxième volet de proposition se montre nettement plus offensif, cherchant à responsabiliser « toute la chaîne des acteurs » de l’évasion fiscale, depuis les sociétés qui font de la publicité pour des montages répréhensibles, jusqu’aux « repentis » qui pourraient dans certains cas bénéficier de « remises pénalités fiscales » s’ils investissent dans « l’économie réelle ». Excluant « toute idée d’amnistie », cette proposition relève « d’un champ purement pragmatique », visant seulement « à ouvrir le débat  » .

Pour les autres acteurs, c’est tout un panel d’actions qui est proposé mais sans qu’aucune date ou support législatif précis. Du côté des prescripteurs, un délit spécifique « d’incitation à la fraude fiscale » pourrait être créé. Cela comprendrait notamment la répression du démarchage et de la publicité pour des dispositifs d’évasion fiscale. Les auteurs du rapport appellent aussi à la constitution d’un « registre international des trusts », à l’extension de l’obligation des comptes bancaires « aux entreprises au minimum lorsque ces comptes sont tenus dans des Etats non coopératifs », ainsi qu’à une obligation, pour les intermédiaires d’une « déclaration préalable des schémas d’optimisation fiscale ». De bonnes intentions dont on ne sait aps comment elels seront accueillies par les Députés !

Enfin, ce sont les chasseurs de fraudeurs qui pourraient encore monter augmenter, estiment les sénateurs. Ainsi le statut de Tracfin- l’organisme chargé de recueillir et de traiter les déclarations de soupçon – pourrait évoluer selon le rapport. Actuellement placé sous l’autorité de Bercy, son statut « devra évoluer » afin d’apporter « des garanties » d’indépendance aux 90 fonctionnaires qui traquent la fraude. Autre exemple, les sénateurs appellent à un assouplissement du « verrou de Bercy » qui subordonne tout engagement de poursuites pénales en matière de fraudes fiscales à une plainte de l’administration. Bref le Sénat passe à l’offensive avec un rapport qui a le mérité d’exister quand ailleurs on se contente d’invectives ou du chant de poule !

 

Cette publication a un commentaire

  1. Alain

    nos sénateurs rebelles ce serait une révolution!!!
    mais il n est jamais trop tard pour qu’ils découvrent ce que tout le monde sait.
    gardons l’espoir qu’ils fassent bouger les lignes et que l’on arrete de laisser les financiers piloter la France.

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