Sat, 03 Dec 2005 07:17:00 +0000
Faut-il que la Gauche se soit décrédibilisée pour que les sondages donnent le Roquet de Neuilly vainqueur dans toutes les configurations d'un second tour de l'élection présidentielle ? Faut-il que les repères démocratiques soient mal en point, pour que l'espoir de » sondés » passe par un tel agité du bocal ? Faut-il que notre société ait perdu son sens de l'orientation pour qu'elle pense confier son avenir à Sarkozy?
On est bien obligé de reconnaître la réalité : désormais, il suffit de prendre un cap simple : » toujours plus à droite? « , pour devenir un homme d'avenir. L'essentiel de cette dérive repose sur un désintérêt catastrophique des Françaises et des Français pour la politique, et plus encore pour leur statut de citoyen.
DISPARUS DE LA PARTCIPATION.-
Ainsi, cette période d'inscription ou de radiation des listes électorales offre une vision saisissante de ce phénomène. Des dizaines de cartes de » disparus » de la participation civique attendent en Mairie un signe de leur part. Certains ne se sont plus manifestés depuis deux ou trois ans, sans faire l'effort d'aller s'inscrire ailleurs. Ils sont radiés d'office après que l'on ait attendu un signe concret de leur part.
Le nombre des non-inscrits, jamais publié, car difficile à cerner, ne cesse donc de croître dans les villes et même depuis peu dans les villages. En effet, faute de campagne médiatique solide (il n'y a plus que cela qui marche !), bien des gens ignorent que leur inscription sur une liste électorale ne dépend que de leur volonté d'y figurer. Heureusement que les jeunes y sont » inscrits » d'office dans leur dix-huitième année, car la catastrophe serait encore plus grave. D'autres signes concrets traduisent aussi le malaise ambiant.
Lisez donc les forums sur Internet et vous serez édifiés : » à quoi ça sert d'aller voter ? « , » Je n'y suis jamais allé et je n'irai jamais? « , » La politique ne mène à rien? « , » Ils sont tous nuls et pourris? « , » Ils ne nous écoutent jamais? « . Parfois, je suis atterré par ce que je lis, car les messages portent les germes d'une crise profonde, d'un cancer qui ronge lentement mais inexorablement le tissu social.
En posant naïvement sur le forum d'over-blog, samedi dernier, une interrogation sur le fait avéré qu'un site, ouvertement proche du Front National, avait pris la tête des 1300 blogs de la rubrique politique, j'ai soulevé une tempête? Over blog a donc décidé de supprimer ce » fil » ravageur, tournant au pugilat, sous l'impulsion de Fanatiques Nationaux ! Eux sont présents, réactifs, agressifs. Et ils envahissent tous les interstices d'uns société fissurée, morcelée par son égoïsme. Les autres se sont mis aux abonnés absents.
GENERATION GRANDES GUEULES.-
Le Roquet de Neuilly l'a compris. Il a abandonné la force tranquille aux gentils organisateurs de la vie publique soft, pour aller vers la génération grandes gueules. Il a décidé qu'il lui suffisait de la ramener souvent pour tenir des propos simplistes, allant dans le sens du poil, qui reposent prioritairement sur l'événement et jamais sur l'avenir. Sus, par exemple, aux Zones d'Education Prioritaires !
Il s'appuie sur l'absence de citoyenneté pour opposer son » réalisme « , son » efficacité « , à la » théorie « , à la » mollesse » de ses adversaires, tétanisés par leurs rivalités. Il attaque son propre camp, sans se soucier des dégâts. Il se positionne en porte-parole du Peuple muet. Il taille des croupières à ses collègues. Il sait que l'on n’existe que dans l'adversité, et jamais dans le consensus. Il a inventé la sensation quotidienne !
Le secret de la réussite en politique ne repose que sur la capacité que l'on a d'imposer d'abord un rapport de forces pour exister. Et ensuite d'amener ses adversaires sur son terrain. Il faut que l'on débatte de vos propos, car l'impact médiatique acquis ne se rattrape jamais. Et comme tout pouvoir ne se conforte que par les médias, il en use et en abuse. On ne se fait plus sacrer en République dans le cathédrale de Reims mais sur le plateau du 2O heures de TF1 !
Le citoyen ne se pose plus, en effet, de questions d'idéal. Il ne veut entendre que ce qu'il pense sans pouvoir ou savoir le formuler. Il considère le militant comme un suspect potentiel. Il ne veut croire en rien, pour éviter d’avoir à choisir sur des idées. Son réveil n'en sera que plus dur, comme il l'a été au lendemain du 21 avril 2002.
LA DELECTABLE SENSATION DU REVOLTE.-
Le soir où, sur son écran de télévision, il verra apparaître les visages de Sarkozy et Le Pen comme adversaires au second tour, il décidera d'aller illico défiler dans les rues des villes, pancartes humoristiques à bout de bras, drapeaux multicolores déployés, mégaphones en bandoulière ; il s'éclatera au milieu de la » racaille « , accourue en renfort?Il éprouvera la délectable sensation de devenir un » révolté » ou, mieux encore, un » révolutionnaire « . Il sera heureux de se redonner une virginité citoyenne en battant de la semelle comme si, depuis des mois, il avait tout fait pour que rien de ce genre ne puisse arriver.
Il cherchera fébrilement sa carte d'électeur dans le tiroir du bureau ou du vaisselier de la salle à manger. Celui qui ne s'est jamais préoccupé de sa carte se renseignera soudainement à la Mairie. Trop tard ! S'il a son » carton citoyen » il votera pour le » moins pire » au nom de la défense des principes républicains? et il en prendra pour un quinquennat de plus, en accusant la classe politique d'être responsable de son malheur.
Le Roquet s'installera à l'Elysée et proposera de fonder une sixième République » présidentielle » : plus de Premier Ministre, plus de gouvernement mais de
s Ministres aux ordres, formant une sorte de » cabinet « . Il aura, lors de son passage utilitaire au Ministère de l'Intérieur, installé son réseau de hauts fonctionnaires. Il s'installera pour quelques temps !
2 décembre 1805 : victoire d'Austerlitz. Mais aussi, on en parle moins, 2 décembre 1851. Ne pouvant faire modifier la Constitution qui le brime (mandat de 4 ans), Louis Napoléon Bonaparte décide de faire un coup d'Etat, aidé dans son projet par Charles de Morny (son demi-frère), Persigny, Maupas et Saint-Arnaud. Au matin du 2 décembre 1851, date anniversaire du sacre de Napoléon Ier et de la victoire d'Austerlitz , une proclamation est affichée dans les rues de Paris. Elle annonce la dissolution de l'Assemblée, le rétablissement du suffrage universel, et un plébiscite qui l'autorisera à donner à la France des institutions renouvelées de l'Empire?
Mais je déblogue?
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