Dans la période qui va précéder les fêtes de fin d’année il va falloir nous habituer à ce que la « sobriété » fasse son entrée fracassante dans le vocabulaire quotidien. Officiellement nous n’entrons pas dans les « restrictions », les « rationnements », les « insuffisances » , les « pénuries » car ces mots connectés à de vraies difficultés matérielles réglementées risquant de peser sur le moral du Peuple. Alors nous devrons afin de soutenir l’effort de guerre qui pèse sur nos modes de vie, devenir des citoyens sobres dans tous les domaines.
La sobriété vertu essentielle, pour contrer un vice majeur, la démesure appartient à toutes les religions. C’est la vertu de la mesure, de la modération, du bien user sans abuser, avec un rapport direct à la santé. La sobriété concerne d’abord l’usage des nourritures et des boissons, avant de prendre le sens figuré que nous lui connaissons. Allons y mon Kiki (sic), nous entrons dans un nouvel ordre moral qui devient selon les déclarations essentielles « l’affaire de tous ». La mode de la punition librement consentie, celle de la frustration acceptée, celle des économies volontaires, celle de la frugalité bienfaisante va envahir le système médiatique.
Désormais il devient indispensable de ne pas se croire à Versailles ! Le patriote éteint toutes ses velléités lumineuses et oublie ses ambitions chaleureuses. La France redevient comme on l’apprenait en usant nos culottes courtes toutes saisons sur les bancs des écoles chauffées au poêle à bois, un pays « tempéré » si ce n’est bientôt de la tempérance. En effet la sobriété est accolée depuis belle lurette aux excès d’alcool. L’homme sain devait être un homme sobre. L’homme saint atteint l’ascèse, sommet de la privation dans tous les domaines.
Cette incitation à ne plus être consommateur outrancier de ce qui constitue le confort que n’ont pas les autres a quelque chose d’indécent. Elle nie le fait qu’il existe en France des gens qui ne mangent pas à leur faim, qui ne possèdent pas les revenus nécessaires pour se vêtir, se chauffer, se déplacer. Des millions d’oubliés qui ces tristes couillons qui pratiquent parfois toute leur vie la sobriété sans le savoir.
A l’insu de leur plein gré parfois depuis des années, ils se privent de l’essentiel pour découvrir qu’ils étaient des héros car ils permettaient aux autres de ne pas se soucier un instant des conséquences de leur gabegie dans tous les secteurs. La fracture sociale s’élargit et s’officialise avec des chiffres totalement surréalistes.
Le flot de recommandations présentées comme des exploits du quotidien que nous devons atteindre ont été souvent réclamés par des adeptes de la décroissance. Vilipendés, snobés, décriés, critiqués ils prônaient un autre système social. La théorie du colibri chère à Pierre Rabhi semble tout à coup d’une « brûlante » actualité mais bien entendu la référence n’effleure pas un esprit d’énarque forgé à la croissance bienheureuse. Le catalogue à la Prévert de consignes ne sera parcouru que par celles et ceux qui en connaissent déjà l’utilité et par ceux qui n’auront d’autre choix que de les appliquer.
Va-t-on installer une police de la sobriété confiée à Lallement de service déjà de retour de son périple sur les mers du globe ? Déjà fliqué pour un excès chiffré d’ivresse putatif contraire à un comportement sobre ; déjà flashé si vous franchissez d’un chouilla une limite à géométrie variable en raison d’un manque de mesure de votre vitesse ; soupçonné de fainéantise lorsque l’énergie vous manquera à plus de 60 ans pour bosser vous risquez le goudron (énergies fossiles à économiser) et les plumes (gaspillage en période de froid) si vous en êtes réduit aux extrémités glacées à réchauffer.
« Crier dans le désert n’a jamais fait avancer que les dromadaires » selon Denis Langlois. Le coq n’a plus qu’ à bien se tenir car le « vaisseau du désert » symbole s’il en est de la sobriété risque bel et bien en cette période de réchauffement climatique de lui damer le pion. Les tickets de rationnement s’imposent. D’ailleurs dans les faits ils sont en place car la pénurie de carburant constitue un acte Total de privation énergétique. Bannissez les expressions » on a eu chaud! » ou « il faut juger à froid et agir à chaud » ou « mains froides cœur chaud!’
De gré ou de force vous serez sobres ou vous ne serez pas dans ce monde et n’oubliez pas que « c’est le jeûne qui fait le saint, et la sobriété, l’homme de bon sens » Jules Renard avait une vision prémonitoire de la situation actuelle : la France va donc devenir le pays du bon sens ! Ça s’arrose ! Donnez moi un rosé bien frais (pas question de la laisser se réchauffer) pour élever ma température corporelle… J’entre énergiquement dans l’association des sobres anonymes ! Et n’oubliez pas que ce n’est certainement pas en cassant le thermomètre que l’on éradique la fièvre !
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« Allons y mon Kiki »!… Hum! Je n’aime pas le mot « sobriété » dans son acception la plus populaire mais, puisque le gouvernement veut y mettre son nez, je le renvoie à la lecture de Paul Morand quand il écrivait: « L’ogre fisc à l’appétit du lion envers les uns, mais la sobriété du chameau à l’égard des autres ».
Qu’en pensez-vous M. Pineau? Les Charentes sont l’écoute.
@ à mon ami christian…
Tu es bien matinal ce matin… Plus rapide que l’éclair ! Quant à cette phrase de Paul Morand… rien de bien nouveau sous le soleil !
Pour moi, ce sera une liqueur de pineau. Autrement dit un pineau avec des bulles, méthode champenoise!
@ à Pierre LASCOURREGES
Merci pour cette recette qui m’était inconnue…
Quand l’Histoire bégaye…
« … qu’il existe en France des gens qui ne mangent pas à leur faim, qui ne possèdent pas les revenus nécessaires pour se vêtir, se chauffer, se déplacer. » Cette phrase au présent à grandi et grossi dans mon passé ! Elle m’a ouvert les yeux, comme on disait autrefois, et la suite de ce « Roue Libre » me ramène à cette leçon d’Histoire qu’est mon passé.
Cette pseudo campagne de sobriété atteint des sommets de ridicule bien dignes des nantis qui les claironnent et pour qui cela reste une notion particulièrement abstraite et chimérique.
De même que le curieux se demandait : – « Comment peut-on être persan ? », le technocrate s’interroge : « Comment peut-on être économe ? ». Ce personnage n’a pas conscience que déjà bien des individus sont économes par nécessité et même obligation et beaucoup d’autres par simple sagesse.
La sagesse, une notion qui semble t-il n’est pas au programme des Grandes Écoles.
@ à mon ami J.J.
La sagesse… ! Mot qui n’est plus de ce monde, et pas seulement au programme des grandes écoles (expression que je déteste et que je ramène au même rang que les petites…). Hélas ! ! !
« … une police de la sobriété confiée à Lallement… » Bien connu en Gironde, et je m’en tiendrai là.
à mon ami Jean-Marie
« … Ça s’arrose ! » Avec plaisir, mais pas le matin, pas avant les douze coups de midi.