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Confinavirus (40) : le culte illusoire du risque zéro

De ma fenêtre de confiné durable, j’ai cru apercevoir un nouveau mythe entretenu par les spécialistes parisiens des hauts plateaux télévisés : le risque zéro ! Il passe régulièrement sous mes yeux et surtout il ressort des discussions que j’ouïs quand j’entrebâille les deux parties de ma seule ouverture sur la vie. Depuis les trois dernières décennies l’opinion dominante s’est forgée une méthode de pensée particulièrement dangereuse car elle combine une tentation permanente d’aller au-delà de l’ordinaire en demandant à ce que rien de désastreux puisse survenir.

Dans tous les actes de la vie quotidienne, les risques naturels, téchnologiques, psychologiques, sanitaires, financiers, humains n’ont jamais été aussi présents. Pas une minute un individu peut se considérer comme à l’abri des conséquences de ses actes. Au nom de sa liberté individuelle il compromet grandement la quiétude potentielle des autres mais jamais il saurait considérer que le contraire puisse exister. La sécurité est un dû que la société doit à chacun.e quels que soient les actes qu’il.elle commet ou les erreurs qu’il.elle n’assume pas.

Nous traversons cette crise sanitaire avec ce sentiment que la société a le devoir de nous éviter la maladie. Les services médicaux à tous les niveaux ont en charge la réparation des dégâts commis par un virus inconnu qui provoque la mort sur son passage à travers le monde. Nul ne songe que, depuis l’origine de l’humanité, des pandémies gigantesques ont dévasté les sociétés provoquant immuablement les mêmes réflexes.

Le premier a été souvent de chercher des explications irrationnelles à des phénomènes inconnus. Des affirmations péremptoires, des hypothèses hasardeuses, des expérimentations multiples ont parfois conduit à des solutions pire que le mal. Souvent les croyances en tous genres ont suppléé les manques de la science. N’empêche que la revendication vis à vis des pouvoirs scientifiques, politiques ou religieux demeure : supprimer tous les risques en trouvant une parade à absolument toutes les maux dont souffre le monde. Au fil des siècles la « sécurisation » de la vie sociale a constitué une revendication puis est devenue une nécessité avant de constituer une obligation.

Le second a consisté à demander à la science de trouver les remèdes dans tous les sens de ce terme à ce qui est considéré, au moment où il se produit comme intolérable. Pas un geste ordinaire qui n’est pas sa parade ou sa recherche de parade. Pour éviter par exemple qu’une vitesse excessive en automobile cause des morts le système invente les glissières de sécurité, les revêtements de plus en plus sophistiqués, les radars imaginatifs et tant d’autres aménagements qui ont pour vocation de diminuer les accidents souvent liés à des imprudences individuelles. Il en est ainsi dans tant de secteurs que l’humanité passe son temps à générer les dangers pour ensuite le consacrer à les refréner ou à les éliminer.

Alors que nous sommes concentrés sur les histogrammes liés aux conséquences mortelles du coronavirus en France et plus largement en Europe, des désastres gigantesques se préparent. L’agité du bocal qui règne sur les Etats-Unis accumule les décisions épouvantablement dangereuse avec la bénédiction d’une fraction de son peuple détruite par l’irrationalité entretenue depuis des décennies par l’acculturation et le culte de l’égoïsme présenté comme un facteur de salut.

En Russie, ce n’est pas mieux, le COVID-19 traité avec supériorité par le tsar qui s’y est installé à vie, menace singulièrement les villes les plus nucléarisées de l’ouest de son empire. Après le site de Tchernobyl qui s’est retrouvé assiégé par un incendie la menace n’est guère prise en compte sur les télés perroquets. Là encore le risque zéro totalement absent malgré toutes les affirmations institutionnelles n’a vraiment aucun sens car la menace est infiniment supérieure à celle du virus.

Enfin une autre courbe que celle de l’évolution de la pandémie risque bel et bien de ramener bien de celles et de ceux que j’aperçois par ma fenêtre. Le drame d’un crise sociale sans précédent. « Partout à travers la planète, le confinement de plusieurs milliards de personnes est en train de provoquer un gigantesque choc social. La première répercussion visible se trouve dans les soupes populaires et les banques alimentaires. Des millions de personnes qui vivaient sans réserve financière ont basculé en même temps, soudain sans ressources. Mais la grande crainte est que ce ne soit qu’un début. » annonce un article du journal le Monde du 21 avril (1).

Nous continuons à ignorer que dans notre pays réputé développé les conséquences d’un déconfinement manqué prendrait des allures de tsunami de précarité, de misère et de déstructuration sociétale. De ma fenêtre je le vois et je l’entends… mais bien entendu le culte du risque zéro nous conduira à trouver une solution simple : faire après comme on faisait avant !

https://www.lemonde.fr/economie/article/2020/04/21/coronavirus-le-confinement-provoque-une-crise-sociale-mondiale_6037257_3234.html

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Cet article a 5 commentaires

  1. Philippe Labansat

    La question est de savoir si, à partir de maintenant, nous devons collectivement nous mobiliser pour :
    – option 1 : payer aux actionnaires de Carrefour, Sanofi, groupes pharmaceutiques et autres distributeurs de masques, payer donc, par notre dur labeur, les 4,95 € de profit qu’ils comptent se faire sur le dos de la collectivité (avec la complicité du pouvoir) ;
    – option 2 : payer les 5 centimes de prix de revient de masques de protection pour l’ensemble de la population.
    Mais aussi, faire les choix démocratiques cruciaux, pour donner à nos services de santé, d’éducation, d’une manière génerale à nos services publics, les moyens d’accorder à tout un chacun, les droits fondamentaux que notre République prétend lui octroyer.
    Mais aussi, faire les choix démocratiques cruciaux pour que notre pays s’engage résolument dans la voie de la coopération des peuples et plus dans  » la concurrence libre et non faussée « …

    1. J.J.

      Je tiens à faire remarquer que la chaîne Intermarché procure à ses clients habituels (sur réservation, pour éviter je pense le marché noir) des masques à 0,59€.
      Il faut aussi faire remarquer que les assurances du GEMA (Groupement des Établissements Mutualistes d’Assurances) remboursent à leurs sociétaires les trop perçus consécutifs à la baisse des accidents.
      « En même temps », les compagnies de la FSA (Fédération des sociétés d’Assurances …à gestion capitaliste) se font tirer l’oreille pour honorer leurs contrats de perte d’exploitation.
      D’ailleurs la concurrence libre et non faussée en a pris un coup dans l’aile, avec les autorisations d’ouverture des grandes surfaces et la fermeture des marchés !
      Au passage notre maire, dont je ne partage pas les idées politiques, mais dont je salue la bonne gestion, a réussi à faire rétablir les marchés de la ville, où l’on peut constater que clients comme commerçants respectent scrupuleusement les règles de « distanciation sociale » (quel bel oxymore !).

      1. Bernadette

        Bonjour Philippe,
        Le gros souci dans tout ça est la reproduction et les femmes sont en 1ere ligne en particulier les femmes en âge de reproduire.
        Quelles conditions de vie ont elles ?
        Il n’y a pas eu de transgenerationnel. C’est très dommageable psychologiquement tant pour elles que pour les enfants

  2. faconjf

    Bonjour,
    des conséquences incalculables vont s’abattre sur l’économie mondiale comme les nuées de criquets sur les récoltes. L’impact de 8 semaines de confinement sur le monde d’après est très largement minoré par les officines officielles. L’analyse de J. Sapir commence ainsi : « les estimations qui avaient été faites par l’OCDE au début du mois de mars étaient bien trop optimistes. Ces estimations supposaient que le choc serait de l’ordre de -1,1% pour l’Allemagne (passant d’une croissance attendue à +0,8% à une croissance révisée à -0,3%), de – 1,2% pour la France et de -0,4% pour l’Italie. Une estimation publiée le 14 avril, soit près de 6 semaines après, donne quant à elle une estimation de perte de production entre 20% et 25% pour la période de confinement. Quoique plus réaliste, cette estimation pêche encore par optimisme. Près de 50% de la main d’œuvre est au chômage partiel en France, ce qui indique un choc bien plus important.
    Pour ceux qui aiment les chiffres J. Sapir a fait son analyse ici https://www.les-crises.fr/russeurope-en-exil-quels-seront-les-chiffres-de-la-crise-economique-provoquee-par-le-coronavirus-par-jacques-sapir/
    Pour ne prendre qu’un seul exemple je choisis celui de l’aéronautique, à ce jour ce sont des milliers d’avions qui sont parqués et les équipages au chômage même pour les « heureux  » accompagnés socialement par les amortisseurs sociaux on imagine leur manque à gagner. Pour le géant Airbus, le groupe a accumulé près de 500 millions d’euros de pertes pour le premier trimestre 2020, et ça ne fait que commencer. La faute au transport aérien, réduit à néant et au refus des compagnies aériennes de prendre livraison des avions commandés. Elles ont en effet des clauses leur permettant de sortir des engagements pris. Sur le 1er trimestre, les commandes de 40 avions ont été annulées ce qui représente une baisse de 15% du chiffre d’affaires. C’est un retournement de situation inattendu, quand on sait qu’Airbus croulait sous les commandes en janvier dernier, et ne pouvait même pas toutes les honorer. La filière aéronautique représente 200.000 emplois en France, avec 15.000 recrutements par an. Je vous laisse imaginer le résultat sur l’agglomération Toulousaine de la simple mise au ralenti de cette locomotive. Et que peut augurer une restructuration de l’entreprise avec tous les ricochets sur les emplois induits.
    Je ne fais que prendre cet exemple pour illustrer les difficultés, j’aurais pu prendre l’agriculture au niveau mondial qui va s’enliser dans les pénuries débouchant sur des disettes ou pire des famines. Où alors parler des services qui représentent 56% du PIB France.
    Combien d’entreprises mortes et enterrées fin 2020 ? Combien de chômeurs en plus ? Combien de suicides? Combien de parcours scolaires saccagés ?
    Les éventuels bienfaits du confinement seront ils enfoncés par les effets négatifs de la crise sociale qui nous pend au nez ? à savoir : suicides, baisse des soins, effondrement des niveaux d’éducation , pénurie, famines…
    Mais, mais tout n’est pas négatif si j’en crois cet article du Gardian la fortune de Jef Bezos patron d’AMAZON se serait accrue de 25 % entre le 12 mars et le 15 avril 2020 . https://www.theguardian.com/world/2020/apr/26/heads-we-win-tails-you-lose-how-americas-rich-have-turned-pandemic-into-profit?f
    Dans le même article on apprend que: « Alors que 26 millions d’Américains perdent leur emploi, la classe milliardaire a ajouté 308 milliards de dollars à sa richesse ».
    Tout espoir n’est pas perdu, les ultra-ultra-riches vont pouvoir profiter des plages de rêve sans les voir encombrées par les demi-gueux échappés de leurs ghettos au moyen des compagnies aériennes à bas prix.
    Plus de croisières cage à lapins non plus, les bateaux de croisière Carnival sont plombés, avec une dette de… 6 milliards et des obligations à payer de 12% (source https://www.ft.com/content/11f05d9c-1c81-41ce-b385-a49376575b6f) . On pourra toujours transformer ces navires devenus immobiles en refuges pour SDF dont les loyers seront versés par l’état providence.
    Rien n’est perdu, pour les riches, pour les autres c’est comme pour les masques démerdez vous !!!
    Salutations républicaines

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