On ne saura vraiment jamais quel est le niveau réel de citoyenneté dans le pays. L’arrivée intempestive d’un virus dévastateur a totalement mis sous l’éteignoir les effets éventuels d’un année 2019 marquée par des mouvements sociaux de diverses ampleurs. En fait celles et ceux qui ont pris la décision de voter ne sont pas nécessairement celles et ceux qui avaient occupé les ronds-points, défilé contre les retraites et témoigné d’un engouement réel en faveur de la lutte contre le réchauffement climatique. Sur ce sujet notamment le clivage entre monde rural et monde urbain est particulièrement révélateur des appréciations portées sur le sujet de l’écologie.
La participation nationale présentée comme catastrophique globalement souffre souvent de belles exceptions dans des villages ou même des villes à taille humaine où les enjeux étaient identifiés et où il y avait même parfois une seule liste en lice. Les habitant.e.s ont voulu témoigner de leur soutien à une stabilité qui leur convient ou faire payer leur éloignement à certains édiles trop calculateurs ! Ils se sont mobilisés dans ces cas-là au premier tour !
Les Françaises et les Français ayant été échaudés par les vertus supposées régénératrice du « dégagisme » se sont ravisés et ont préféré le « conservatisme » utile. C’est la leçon essentielle de ce scrutin. Il y a peu de cas dans lesquels les sortant.e.s qui ont fait le job se sont retrouvés en difficulté. Seuls les élu.e.s de 2014 qui avaient obtenu des scores basés sur le rejet de leurs prédécesseurs ou ceux qui prétendaient à une sucession ont été battus ou sont en difficulté.
Les convaincus, les électrices et les électeurs ont voté et n’ont pas nécessairement la mémoire courte. Ils ont opté pour la continuité des personnes pour peu que celles-ci aient adapté leur programme aux circonstances actuelles.
La France a besoin d’être rassurée, apaisée et n’aspire plus aux réformes bouleversant ses repères et les fondamentaux républicains. Pour reprendre une formule célèbre, elle aspire au « changement dans la continuité » et plus nécessairement à « la continuité du changement ».
Ce constat est général sur tous les territoires. Les villes détenues par les partis traditionnels dont les têtes de liste sont connues pour leur engagement, n’ont que très rarement basculé. Ainsi le PS a conservé et conservera ses bastions et il peut en gagner d’autres ; LR s’en tirera avec autant de réussite. Mais il faut aussi noter que cette règle est aussi valable pour le RN qui ne faiblit pas dans les villes qu’il dirige. Ce n’est pas un retour de la France vers les vieux clivages mais simplement une volonté de retrouver des ancrages que l’on avait pensé inutiles ou dépassés. Emergent aussi dans ce contexte des nouvelles têtes pas engagées de manière partisane mais porteuses de valeurs porches de celles de la Gauche.
Dans ce cadre et contrairement à ce que les madias ont tenté de vanter, les écologistes s’en tirent moins bien que pronostiqué. Ils réalisent des percées en pourcentages mais pas en voix. Il n’y a pas beaucoup d’exemples de victoires réelles, affichées dans le monde rural ou périurbain. Leurs seuls espoirs résident désomais dans quelques grandes métropoles mais quel que soit le cas ils ne peuvent asseoir leur victoire qu’avec le concours des forces de gauche. Le rêve de l’indépendance vis à vis des autres a disparu et le mépris affiché dans certains cas risque de se payer cher.
L’autre tendance du scrutin est décevante. Les listes dites « citoyennes » n’ont pas réussi une percée significative. Attention elles sont parties de pas grand chose et ont parfois atteint de scores leur permettant de rester au second tour. Par contre il faut noter que partout où elles ont su s’intégrer dans des collectifs organisés (milieu urbain) ou s’appuyer sur des opposants déjà installés et reconnus (milieu rural) elles ont réalisé de belles performances. Il y aura, c’est certain bien des « laboratoires » participatifs sur le territoire au cours de ce mandat qu’il faudra suivre et encourager. La citoyenneté va renaître et 2026 le démontrera !
Enfin il est patent que les résultats traduisent un désaveu réel de la politique gouvernementale. La vague n’est plus « en marche » et elle ressemble à celle de la marée basse. Malgré le fait qu’ils aient souvent tenté d’improbables camouflages les « néo-LREM » ont payé l’addition des réformes conduites au pas de charge. En effet leur électorat et même leurs militant.e.s se sont dilués dans l’abstention ou sont retournés à leur bercail politique d’origine.
Même en tenue de camouflage ils n’ont pas échappé au désamour présidentiel. Les « vassaux » adoubés en dernière minute ont souffert alors qu’ils auraient pu être plus à l’aise en affichant leur étiquette d’origine. LREM va donc être contrainte de revenir aux basiques alliances de l’ancien monde sauf à se préparer des lendemains qui déchantent. L’ancrage local tant espéré n’est pas pour demain et donc beaucoup de député.e.s vont ressembler à des plantes hors sol !
Quel que aient été les effets du coronavirus sur la participation les tendances restent vraiment imprégnées dans les résultats. Une forme de néo-conservatisme de « sécurité préservatrice » a été préféré à un « aventurisme d »insécurité sociale ». Les votant.e.s ont opté majoritairement pour les certitudes acquises aux espoirs potentiellement décevants. bien évidemment toute analyse a ses exceptions… qui se confirmeront au second tour quand il aura lieu !
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Bonjour,
pour moi, il s’agit bien de l’effet 22 juin 1940 qui réapparaît lors de ce scrutin. C’était la débâcle. En quelques semaines, la France avait été submergée… Des millions de prisonniers, des millions de réfugiés sur les routes. Un effondrement des volontés. Une vaste démission civique qui va jeter une majorité de Français dans les bras du sauveur de Verdun. C’est bien ce ressort psychologique de la trouille qui a joué hier écrasant d’instinct le dégagisme précédent. La prime au sortant s’est trouvée majorée par la prime du trouillomètre.
Et pourtant, Régis de Castelnau spécialiste du droit des collectivités locales déclare sur son blog « vu du droit » :
« Alors on va rappeler que dans une démocratie représentative, la SINCÉRITÉ du scrutin est quelque chose de fondamental. Il est clair que celle-ci a été complètement altérée par la situation que traverse notre pays, et que la légitimité démocratique des listes élues le 15 mars est égale à zéro. Le deuxième tour est absolument impossible à tenir, avec le délai très court pour éventuellement fusionner les listes et les déposer en préfecture avant mardi soir ! « . Tous les constitutionnalistes admettent cet état de fait et le méprisant s’apprête à reporter le deuxième tour en juin.
Castelnau va plus loin et conteste par avance cette possibilité.
» En matière d’élection afin d’en assurer la sincérité, LA FORME EST INSÉPARABLE DU FOND.
Par conséquent :
• Campagne complètement faussée par la crise sanitaire.
• Scrutin marqué par une abstention énorme due à la crise sanitaire.
• Impossibilité d’organiser normalement le deuxième tour.
• Impossibilité du contrôle judiciaire INDISPENSABLE pour vérifier la régularité du scrutin.
Tout cela rend impossible non seulement la tenue du deuxième tour, mais, les deux tours étant inséparables, nécessite l’annulation de l’ENSEMBLE du scrutin. Jusqu’à ce que les conditions de déroulement régulier puissent être à nouveau réunies. Organiser le deuxième tour serait en l’état une folie. L’organiser plus tard en fonction du résultat du premier tour du 15 mars, par conséquent sans tenir compte de son illégitimité, serait simplement une forfaiture. »
Voila qui va faire couler beaucoup d’encre à la sortie de cette crise sanitaire et économique. Ajouter dans la barque une crise de légitimité constitutionnelle me semble difficile et la cote mal taillée proposée par Narine la Haine risque de l’emporter ( les élus du premier tour restent élus et rebelote les 2 tours pour les autres). Dans cette hypothèse les maires élus et ceux en attente géreraient la crise au plan local sans vacance du pouvoir municipal.
La situation est ambiguë, se chamailler sur des points de droit n’est pas une priorité, mais c’est un problème qui ne manquera pas d’altérer le mandat des élus avec le procès sous-jacent d’illégitimité.
Pour l’heure l’urgence est de faire accepter le confinement total à nos concitoyens, il faut donc faire monter la dramaturgie. Les fuites orchestrées via le (im)monde -journal de référence ou de révérence- parlant de 500 000 morts en France vont faciliter la chose et l’angoisse épaisse va se répandre à travers tout le pays. Le méprisant compte bien sur l’effet trouille pour redorer son blason bien terni par son immobilisme des jours passés et faire oublier cet épisode municipal calamiteux.
Salutations républicaines
Bien d’accord, J F. De l’avis de « spécialistes », peut être autoproclamés certes, ces élections , quelle que soit la raison invoquée auraient dû être reportées. Elles expliquent en partie ce raisonnement simpliste et potentiellement mortifère : « On nous « embobine » avec une histoire de contagion, s’il y avait un danger réel, les élections seraient reportées ». Les « vrais gens « ne comprennent pas .
Courageux mais pas téméraire, à mon grand regret, je ne suis pas allé voter, déplorant l’inanité de ce contestable scrutin qui devrait être annulé.
Depuis ma fenêtre, je « contemple » depuis hier les files d’attente devant la porte de l’Inter voisin, et les files de voitures à la pompe.
Souvenirs de 1940 (on me l’a raconté), de 1956 (Suez) , de 1968, de 1999/200 (denrées, bougies, piles en « rupture de stock »).