Quand j’avais une dizaine d’années mes parents, après leur journée « normale » de travail, partaient sur les lopins de terre qu’ils possédaient à 2 ou 3 kilomètres de notre domicile pour cultiver leur jardin ou les quelques rangs de vigne qu’ils possédaient. Nous étions ainsi en autosuffisance essentielle sur le plan alimentaire grâce aux légumes et aux achats possibles avec la récolte.
Ce serait impensable en cette période de stress omniprésent mais ils nous laissaient, sans aucune crainte, à la maison jusqu’à la nuit tombée. Notre mission était on ne peut plus simple : préparer le repas du soir ! L’annonce de la fin de nos préparatifs étaien teffectuée grâce au clairon de mon frère dont le son traversait l’air doux printanier ou estival de Sadirac.
Par observation puis mimétisme des méthodes utilisées par les adultes, nous avions vite acquis un « talent » culinaire certes restreint mais solide. Dans la famille italienne paternelle la confection des repas était de la responsabilité de ma « nona ». Elle basait quasiment toutes ses fabrications sur les ingrédients de la maison (porc, légumes, oeuf, lait, poulets, lapins, pigeons..) allant des tagliatelles faites maison aux salades, aux sauces, au plats de résistance.
Le rôle de cuisinier était en revanche l’apanage de mon grand-père maternel qui laissait à son épouse que quelques plats du dimanche dont elle avait la maîtrise. A l’arrivée ma mère n’ayant pas une passion forte pour les fourneaux ce fut mon père tant qu’il en eut la force, qui régalait par ses « plats » de fêtes confectionnés avec une grande part d’ajustements personnels. Il était cuisinier instinctif !
J’ai hérité de cette lignée familiale, comme mon frère d’ailleurs, un goût prononcé pour la cuisine sans avoir toujours le temps de m’y consacrer. Pas de recettes sophistiquées mais des plats solides simples mais ô combien précieux car me rappelant sans cesse ces moments de jeunesse où notre fierté reposait simplement sur une salade de tomates parfaitement assaisonnée.
Je ne peux jamais me résoudre à suivre un processus établi et j’ai toujours la tentation d’ajouter ma touche personnelle ce qui me vaut des échecs retentissants que je masque en parlant « d’expérimentation » mais aussi quelques surprises agréables.
Le temps passé aux fourneaux me donne une jubilation particulière : celle de ne pas avoir à penser à autre chose qu’à l’objectif de construire pour les autres ! La pression, même si elle existe, est saine et motivante mais comme elle ne dépend que de ses propres choix je la supporte. Les erreurs ne peuvent être imputées qu’à des éléments ou des décisions personnelles et je n’aime pas que l’on tourne autour de moi. Quand je cuisine : je cuisine !
Suivre une recette dénichée sur internet ou une revue spécialisée m’exaspère car j’ai la certitude que ce que je produirai jamais l’équivalent de la photo ! Je suis donc le processus avec des adaptations héritées de mes expériences antérieures. La déception vient de l’ambition mal placée. Il faut savoir ne pas se prendre pour un disciple de Top Chef.
Cuisiner c’est s’extraire du monde. C’est avancer étape par étape vers une réalisation dont on espère tout. Malgré toutes les précautions que l’on puisse prendre la part d’incertitude reste en effet présente. Un temps de cuisson manqué… ou des produits qui trahissent, des doses mal ajustées conduisent à un fiasco qu’il faudra dissimuler ou admettre publiquement. Rare en politique !
J’ai toujours véréifié que le moment le plus délicat dans toutes les recettes réside dans les quantités de condiments à utiliser. Un soupçon, une pincée, une cuillère à soupe, une cuillère à café… Je ne fie qu’à mon instinct ! C’est comme dans un discours : jusqu’où peut-on aller sans paraitre outrancier ou caricatural. Trop de sel nuit au plat? pas assez de sel lui manque.
Saler l’eau des pâtes ou parfumer une pâte à crêpes relève du talent des alchimistes et surtout demande une solide confiance en soi. Tout le secret de la réussite culinaire se niche dans ces gestes à la fois primaires mais essentiels : le sel, le piment (à préférer au poivre), le sucre, les parfums…
J’ai tendance à mettre de l’oignon ou de l’échalote, des lardons ou du jambon, du parmesan ou de la mozzarella partout comme s’il fallait marquer d’une touche « italienne » tous les mets. Tout mets ne mérite pas la platitude ou la fadeur… Il lui faut une expression et du caractère.
Malheureusement la tendance s’installe de telle manière que le résultat soit acceptable par le plus grand nombre. Dans le fond il vaut mieux s’attabler devant deux sardines à l’huile avec des pommes de terre cuites à point que de goûter à des plats sans saveur, sans odeur et sans couleur.
La vraie cuisine met tous le sens en éveil. Il faut sentir, goûter, regarder, toucher pour accomplir le miracle du plat que seul le partage familial ou amical rendra « parfait ». Les étoiles seront alors dans les yeux de la tablée et jamais sur un guide.
Demandez à des passionné·es de cuisine, et beaucoup vous parleront de l’effet quasi-thérapeutique de quelques heures passées derrière les fourneaux. Je suis de ces malades de l’action culinaire épisodique puisque quand je suis rendu fou par la vie je me plonge dans une recette de souvenir, celle qui est largement la plus belle et la plus précieuse pour soigner sa nostalgie.
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Bonjour,
la cuisine, quand elle n’est pas électorale, c’est se faire plaisir en faisant plaisir aux autres. Quoi de plus satisfaisant pour un grand père que de réaliser un modeste gâteau avec ses petits enfants? Occuper ses mains c’est aussi détourner nos pensées vers une réalisation rapide à destination de nos convives. Leur satisfaction se goûte au silence seulement perturbé par le bruit des couverts. Une expérience de vie où on mesure dans le moment qui suit nos réussites et nos ratés. La aussi, comme ailleurs, on ne peut pas progresser si l’on ne tire pas à chaud l’enseignement de nos erreurs. C’est le fameux retour d’expérience ( REX ) enseigné dans tous les manuels de bonnes pratiques. Un enseignement aussi vieux que la cuisine où seule l’expérimentation pouvait éclairer les essais plus ou moins réussis. Aujourd’hui nous en sommes à la cuisine moléculaire, la physique et la chimie ont pris le pas sur l’expérimentation de nos anciens qui ne savaient pas pourquoi mais savaient comment on réussissait. La cuisine c’est un laboratoire vivant où on expérimente, mais aussi où l’on peut illustrer auprès des plus jeunes quelques rudiments de physique ou de thermodynamique avec des mots simples où l’on montre aussi l’importance du calcul. C’est aussi là que s’exprime la machine à questions si chère à nos petits . C’est aussi là que remonte vers nous l’image de nos mères et grands mères affairées à pétrir les pâtes des tartes et gâteaux dont nos papilles et notre odorat ont gardé la mémoire.
Chez moi, avec mon épouse, nous pratiquons l’alternance une semaine sur deux en cuisine une méthode de partage des tâches mise au point lorsque nous avons quitté tous les 2 la vie dite active. La cuisine est aussi un lieu où la parité à toute sa place.
Salutations républicaines
PS: la petite recette que j’ai expérimentée hier midi, pour nous un véritable délice, mais comme en politique, chacun son goût.
https://www.pavillonfrance.fr/recettes-astuces-du-large/recettes-du-large/tajine-grondin-legumes-hiver
Intéressant de trouver des « hommes cuisiniers, « race bien plus répandue que l’on voudrait le faire croire.
Lorsque j’étais enfant, ma mère qui travaillait à domicile me disait : « Si tu veux manger, prépare le dîner. »
C’est comme ça que je m’y suis mis.
J’ai fait de nombreux essais, parfois sophistiqués, mais ça m’est passé. Je pratique maintenant une « philosophie » inspirée du Rasoir d’Ockam, et contraire aux principes shadok : pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple, et que c’est bon ?
Ce matin c’est risotto, le hasard fait bien les choses : un oignon revenu dans l’huile d’olive, en même temps qu’une tasse de riz rond ; ensuite quand le riz devient un peu transparent, de l’eau chaude ajoutée avec parcimonie, et dès que l’eau est évaporée, on en rajoute avec la même parcimonie. Il ne faut pas mesurer son temps ! Puis, quand les grains ont l’air à point, une bonne assiette de champignons, sel, poivre, une pointe de quat’zépices (variante : parfois une grosse cuillère à soupe de purée d’épinards ou d’oseille).
Tout à l’heure, je vais ajouter une part de fromage râpé. Zut, je n’ai plus de parmigiano ! Je vais mettre du comté et saupoudrer de persil haché !
C’est bon la cuisine italienne, même si l’on na pas d’ancêtres italiens(mais après tout, je n’en sais rien !)
Aujourd’hui crumble de courgettes et carottes pour accompagner bavette de bœuf sauce à l’échalote « bistrot ». Simple, facile rapide pas cher et pas si mal !
Un oubli : pour éviter que le riz « prenne » au fond de la casserole, il faut touiller tout le temps de la cuisson avec la spatule en bois.
C’est ça qui demande de la patience.
Aujourd’hui 8 février c’est le triste anniversaire du métro Charonne 9 morts et 250 blessés dus à la répression policière du fameux préfet de Paris maurice PAPON, également impliqué dans la répression sanglante de la manifestation du 17 octobre 1961. Les lignes suivantes sont empruntées à la note de synthèse de l’enquête préliminaire de l’information criminelle, rédigée par le procureur de la République, datée du 27 juin 1962 et adressée au procureur général. « Il convient de faire état ici du fait rapporté par certains témoins, entendus à l’enquête, qui ont indiqué avoir assisté à des actes de violence commis par quelques membres des forces de l’ordre et qui apparaissent hautement répréhensibles. Il s’agit notamment du jet d’éléments de grilles de fer, qui normalement sont fixées au pourtour des arbres de l’avenue, et de grilles d’aération du métro, qui régulièrement se trouvent au niveau des trottoirs de la chaussée. Ces pièces métalliques sont très pesantes (40 kg pour les premières, 26 kg pour les secondes). Certains témoins ont déclaré avoir vu des agents lancer des grilles sur les manifestants à l’intérieur de la bouche de métro. Ce fait paraît établi, et il est constant que trois de ces grilles au moins ont été retrouvées après la manifestation au bas des escaliers de la bouche de métro et récupérées là par des employés de la station. »
Ainsi, ce sont bien des « grilles » lancées par des policiers qui sont à l’origine de certains décès, mais c’est par une singulière métonymie qu’on a cru voir dans ces grilles celles de la station de métro. En réalité, la station de métro n’a été fermée qu’à 20 h 15, en raison de la persistance des gaz lacrymogènes, consécutive à l’intervention de la police dans la station. Dans l’immédiat, on dénombre huit victimes. Certaines sont mortes étouffées ; dans d’autres cas, le décès semble dû à des fractures du crâne sous l’effet de coups de matraque reçus (appelée bidule bâton en bois dur de 85 cm de long et 4 cm de diamètre) . Telle sera encore la cause d’un neuvième décès, intervenu, plusieurs mois plus tard, à l’hôpital, des suites de ces blessures. Toutes les victimes étaient syndiquées à la CGT et, à une exception près, membres du Parti communiste.
La communication du gouvernement de l’époque (Michel Debré) nous rappelle celle du gouvernement d’aujourd’hui et celles des années qui ont suivi le 6 février 1934.
Le 12 février 1962, le Premier ministre Michel Debré se rend dans les locaux de la police parisienne, pour « apporter le témoignage de sa confiance et de son admiration » ; puis, le 13 avril de la même année, il écrit une lettre à Maurice Papon, rendant « un particulier hommage à [ses] qualités de chef et d’organisateur, ainsi qu’à la façon dont [il a] su exécuter une mission souvent délicate et difficile »
Face à cette répression meurtrière, le ministre de l’Intérieur de l’époque, Roger Frey, accusa « des groupes organisés de véritables émeutiers, armés de manche de pioche, de boulons, de morceaux de grille, de pavés, d’outils divers ont attaqué le service d’ordre». Par la suite, l’Union pour la nouvelle République (UNR) accusa des éléments de l’OAS de s’être déguisés en policiers pour charger les manifestants.
On ne peut que constater la tentative de réécriture des événements à des fins politiques.
Bonjour à tous et merci Jean-Marie de nous faire partager tes talents, tous tes talents; Mais dans ceux culinaires tu as oublié l’Aïoli !
Tu sais celle du vendredi , avec la morue ou le cabillaud, avec l’huile d’olive …et l’ail à volonté, de manière à chasser les moustiques toute la journée.
Mon amitié
Gilbert de Pertuis
Savez vous que les enfants scolarisés dans les écoles régionales ont des poux et il est très difficile de s’en débarrasser. Les préduits vendus dans les commerces sont sans produit chimique et très chers et de plus inefficaces. Dans les produits naturels de lutte contre ces invasions de poux, il est conseillé l’usage de la mayonnaise, du vinaigre blanc chauffé, de l’ail etc., voire de l’huile essentielle de lavande et j’en passe. En 2020 les parents en ont plein les bottes alors que faire ?
Très inquiète par l’éradication des poux, j’ai compris que la fabrication de produits insecticides avait vendu la marque très ancienne à d’autres dirigeants d’entreprises pour mettre sur le marché commercial des produits de même marque mais « sans insecticides ». Le marché des sans insecticides est juteux et rapporte des sommes rondelettes aux financiers.
Quant aux têtes de nos chers petits enfants, ces financiers n’en n’ont rien à faire.
Pardonnez moi pour mes commentaires intempestifs