You are currently viewing Nous paierons des erreurs cumulées d’urbanisme au prix fort

Nous paierons des erreurs cumulées d’urbanisme au prix fort

Les épisodes climatiques catastrophiques se succèdent désormais à une récurrence angoissante sur la planète mais particulièrement en France. Vents violents, chute cataclysmique de pluie ou de neige, montée des eaux de l’océan : il ne se passe plus une seule semaine sans que des secteurs soient exposés à des dégâts considérables.

Ainsi des pluies sont torrentielles sont tombées avec une violence inouïe sur les départements du Var et des Alpes-Maritimes. Il est tombé de manière durable de pluie de 5 à 30 mm d’eau sur Cannes, Antibes, et Fréjus où les cumuls depuis avaient atteint antérieurement de 80 à 200mm, ce qui correspond à un mois et demi de précipitations. On arrivera à plus deux mois de précipitations en quelques heures. En montagne, les chutes de neige sont toujours aussi abondantes sur le sud des Alpes. La couche de neige fraîche atteint 30 cm depuis la nuit de samedi à dimanche à isola 2000.

Bien entendu on trouvera encore des éminents spécialistes pour réfuter la thèse des effets manifestes du réchauffement climatique voulant que se créent des périodes inédites de « moussons » méditerranéennes. Et pourtant on ne peut que se référer à ces phénomènes tropicaux ou subtropicaux dont certaines zones d’Asie sont familières. La conjonction de l’augmentation de la température accroît l’évaporation de la mer constituant des masses nuageuses considérables qui en entrant en contact avec les cotes se transforment en trombes d’eau.

Les sols fragilisés par des épisodes similaires récents n’absorbent plus de telles quantités en des délais très courts. Des éboulements, glissements de terrain et inondations se produisent alors très fréquemment. Les cours d’eau malgré toutes les mesures prises ne peuvent plus résister à de tels afflux puisque les espaces artificialisés, les réseaux de collecte de plus en plus monstrueux conduisent vers des exutoires calculés sur des bases volumétriques très inférieures.

A ce constat se sont ajoutées des chutes de neige sur les Alpes du sud, avec jusqu’à 70 cm de neige supplémentaire à 2000 m d’altitude sur le Mercantour et le Queyras, notamment sur les versants sud-est à est. La limite pluie-neige placée vers 1400 m sur les Alpes du sud et 1000 m sur les Alpes du Nord complique singulièrement l’évacuation en aval des conséquences de ces événements répétés. C’est là que se constituent les torrents d’eaux boueuses dont la vitesse s’accroît avec les pentes.

L’an dernier, 60.000 hectares de terres agricoles ont été urbanisés. Depuis 2015, les surfaces transformées en logements, commerces ou structures de loisirs ne cessent d’augmenter. Les Alpes maritimes est nettement en tête de ce phénomène que l’on ne parvient guère à enrayer sauf à densifier les enveloppes urbaines existantes et à provoquer l’ire des populations installées. On continue donc à étaler, à construire dans des zones qui si elles ne sont pas identifiées comme dangereuses risquent bien de le devenir rapidement. Rien ne laisse présager un arrêt de cette folie dévastatrice.

Le paradoxe de l’artificialisation c’est que celle-ci va plus vite que l’élévation du Produit intérieur brut et celui de la démographie. Cette situation démontre que « l’espace » est consommé de manière inefficace et sans vraiment une réflexion cohérente. Par exemple, la présence de logements vacants sur un territoire n’empêche pas l’artificialisation par des constructions neuves. Les lotissements continuent de progresser et s’étendent toujours plus même à proximité de villes en décroissance démographique.

Dans la majorité des départements, l’aménagement suit encore le modèle de l’étalement urbain avec des conséquences non évaluées sur la mobilité, les réseaux, le pouvoir d’achat ou les ruptures du lien social . C’est un phénomène de fond qui n’est pas nécessairement synonyme d’une forte croissance urbaine, mais d’un étalement  »quotidien » généralisé en France, porté par des modèles d’urbanisation consommateurs d’espace, tels que les zones pavillonnaires et les zones d’activités, mais aussi par la déprise des bourgs ruraux aspirés vers les métropoles qui voient leurs marges s’étendre.

Les moyens réglementaires ne manquent pourtant pas pour limiter l’artificialisation mais ils sont trop peu contraignants pour les aménageurs, les financiers qui spéculent sur des créations de fausses surfaces commerciales. Comme désormais la seule ressource des communes reposera sur la  fiscalité sur le foncier et le bâti en France on n’a pas fini de construire pour améliorer les budgets.

Dans les Alpes-Maritimes, les surfaces consacrées au maraîchage et à la culture florale ont diminué respectivement de 80 % et de 74 % entre 1970 et 2010. Les terres labourables ont été divisées par plus de trois et les surfaces plantées en vigne ont quasiment disparu. La part du territoire artificialisée, qui représentait 30 % de la superficie du littoral en 1970, en représente 58 % aujourd’hui. Dans le moyen pays, la progression est encore plus rapide puisqu’on passe de 10 % à 30 % du territoire artificialisé pendant la même période.

Rien ne peut plus arrêter les catastrophes du genre de celle de ce week-end avec des rues des villes d’aval transformées en cours d’eau violente et dévastatrice. La réponse ne sera pas trouvé en quelques jours mais par une vraie remise en cause fondamentale des règles d’urbanisme et des modes de vie.

Ce champ est nécessaire.

En savoir plus sur Roue Libre - Le blog de Jean-Marie Darmian

Subscribe to get the latest posts sent to your email.

Cet article a 3 commentaires

  1. J.J.

    Sur le même sujet, mais plus près de chez nous : je regardais hier sur un site d’archives, de vielles cartes postales qui, avant l’apparition des médias immédiats contribuaient à diffuser les nouvelles.
    Certaines datant de 1904 montraient les inondations désastreuses dans la vallée de la Charente où l’on ne voyait guère que des champs et des près. Et je pensais que ce qui a l’époque avait été un phénomène grave, mais gérable, avec l’urbanisation inconsidérée de toutes ces zones, serait maintenant un catastrophe de grande ampleur.
    Et le cours de la molle Charente n’a pas l’impétuosité des torrents dévalant de la montagne.

  2. Daniel Bauche

    Les maires de la région PACA sont très sollicités par les administrés, qui sont aussi des électeurs, et ils modifient les PLU pour leur faire plaisir. Résultat, du béton partout, dans l’indifférence générale. Au final les habitants subissent des traumatismes récurrents, sans que soit remise en cause la responsabilité des élus de tout bord, et des préfets qui ont laissé faire. Et ces mêmes élus demandent, et obtiennent, que soient reconnus ces drames comme des catastrophes naturelles. Et devinez qui paie ? Nous les contribuables !

  3. Puyo Martine

    Bonjour,
    Faisant tous les ans le voyage Gironde Provence, je me suis bien rendue compte de cette urbanisation galopante notamment sur la partie Languedoc. Je me souviens de collines vides de toute habitation (en bordure de l’autoroute aux alentours de Narbonne et Béziers) et qui maintenant sont urbanisées jusqu’en haut. Cela m’a interpellée vu la pente. je pensais en moi même que loirs des épisodes cévenols que l’eau devait dévaler dans toutes les rues. heureusement les concepteurs ont prévus des bassins de rétention pour éviter, certainement, l’inondation de l’autoroute ! Toute la bande le long de la Méditerranée s’urbanise dangereusement. Il y a 4 ans, j’ai vu ce que donnait un gros (très gros) orage sur Roquebrune sur Argens. j’étais dans le vieux village, la rue était transformée en torrent. Aucune maison n’est de plein pieds. mais dans les récentes constructions au bas du village, de l’eau partout. Alors maintenant, ce que l’on a vu à la télé, avec les quantités de pluie tombées depuis plusieurs jours……….c’est catastrophique. Tout ce qui arrive actuellement, malgré tous les plans de prévention (qui ne sont pas respectés) trop d’argent en jeu, ne fera que perdurer. Je plains les habitants de ces régions méditerranéennes car ces phénomènes vont se multiplier. Sécheresse – inondations. Et nous côté Atlantique, les c ôtes s’errodent, donc recul des constructions envisagées.
    Tout ça c’est bien triste, les élus ont laissé faire n’importe quoi. quand j’écris « élus », je ratisse large. Il y avait, il y a des années, des plans d’aménagements régionaux (miaca) ils ont été abandonnés, pourquoi ?

Laisser un commentaire