La pédagogie Freinet éduquait les enfants aux prémices de la solidarité de gestion, via les principes de la… coopérative. Il existe même encore un Office Central de la Coopération à l’École (OCCE) qui rassemblait tous les « instituteurs » (espèce disparue) pour des rassemblements d’élèves responsables et pour des échanges entre enseignants. Bien des militants actuels ou passés du syndicalisme, de la mutualité, et de la politique sont passés par ces structures d’apprentissage de la démocratie réelle et de l’autonomie. Ils avaient ensuite participé aux Foyers socio-éducatifs de certains collèges ou lycées, avant de basculer dans d’autres organismes s’ils avaient la chance d’aller fréquenter l’université. Cette éducation s’est étiolée au fil des ans, avec la disparition de la formation professionnelle et le repli sur l’instruction. Et pourtant, il serait vraiment temps de relancer cette formation réelle à la citoyenneté et à la notion essentielle de mise en oeuvre collective de projets concrets. L’actualité démontre que dans le monde du profit, il peut en effet être important d’avoir des alternatives inspirées de la coopération !
Benoît Hamon a en effet promis, en clôture du 35e congrès des Scop à Marseille, un « choc coopératif » à travers « sept leviers », avec l’ambition de doubler le nombre de ces sociétés coopératives et participatives d’ici cinq ans. Une authentique promesse de gauche qui redonne un sens à la lutte contre les licenciements économiques et le rachat d’entreprises par les salariés, lorsque les actionnaires sont préférés aux employés, ouvriers ou cadres. Un vrai réveil idéologique qui me rajeunit ! « Dans cette crise, le modèle des Scop est apparu robuste (…). C’est un des exemples que nous devons promouvoir pour sortir de la crise », a déclaré le ministre devant les 1.200 acteurs réunis en congrès. « Il faut faire en sorte de créer un vrai choc coopératif. L’objectif pour nous est de parvenir à doubler le nombre de Scop dans le quinquennat » (aujourd’hui, on compte en France 1.910 Scop pour 40.734 salariés), a-t-il ajouté, saluant un « modèle durable et prudent ».
Un véritable bonheur pour celles et ceux qui défendent, comme moi, l’idée d’une nouvelle voie en cette période de crise. Pour y parvenir, le ministre a annoncé sept mesures qui seront intégrées pour certaines dans la loi Économie sociale et solidaire (ESS), programmée au premier semestre 2013, pour d’autres dans des politiques publiques. Parmi les principaux chantiers, figure « le droit de préférence pour le rachat d’entreprises par les salariés sous forme de Scop ». « Ce droit consisterait à obliger le cédant à faire une proposition de cession aux salariés et à leur donner les conditions de temps et de réflexion nécessaires à la formulation d’une offre », a expliqué Benoît Hamon. Autre levier, « la création d’un nouveau statut pour les Scop naissantes, afin de réduire la prise de risque initiale pour les salariés ». Ce statut transitoire leur permettrait de ne pas être majoritaires en capital pendant une période donnée, tout en possédant plus de 65% des droits de vote et « ainsi conserver les avantages inhérents à ce statut ».
C’est un constat, dans le domaine agricole, par exemple, les coopératives ont su tenir la route en période difficile. Les vraies banques mutualistes n’ont pas eu besoin du soutien des contribuables, car ils n’ont pas les mêmes gouvernances et les mêmes objectifs. Les assurances qui se revendiquent du militantisme ou les mutuelles autogérées ont survécu aux aléas des marchés. Il existe encore bien des domaines considérés comme « historiques » ayant su rester solidaires sans pour autant s’effondrer économiquement. Le seul vrai problème, c’est que la fameuse « concurrence libre et non faussée » des traités européens a plongé ce système français original et utile en période de crise, a justement joué contre les principes essentiels de la « coopération ». Benoit Hamon aura beaucoup de mal, dans le contexte actuel, à convaincre les autres pays européens arc-boutés sur le capitalisme libéral d’accepter l’ouverture d’une nouvelle voie, soutenue par la puissance publique. Le ministre souhaite en effet développer les capacités d’investissement des Scop, en mobilisant notamment la Banque publique d’investissement qui réservera 500 millions d’euros aux entreprises de l’ESS et a aussi évoqué la possibilité de « constituer des groupes de Scop pour pouvoir atteindre une taille critique », plus de moyens pour l’accompagnement et un encouragement à l’export. Chiche ! Je connais bien de vieux comparses du PSU qui vont rêver en entendant pareille annonce ! Mais je maintiens mon avis : rien ne se fera sans formation à la citoyenneté active de gestion autonome et responsable.
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A propos d’Economie Sociale et Solidaire
Les complémentaires santé, comme les assurances en général se divisent en deux catégories bien distinctes : les entreprises de type capitaliste et celles qui relèvent de l’Economie sociale et solidaire : les Mutuelles.
Or nous assistons actuellement dans les médias à une dérive de langage, volontaire ou non, qui consiste à baptiser « mutuelle » toute complémentaire santé.
Bien sûr, c’est rendre hommage au mouvement mutualiste, puisqu’il est à l’initiative de cette activité, que d’attribuer le terme de mutuelle à tout organisme oeuvrant dans ce sens.
Mais c’est évidemment un abus qui dévalorise le mouvement mutualiste car Axa, Allianz, par exemple, et autres sociétés d’assurance privées n’ont absolument pas le caractère d’une mutuelle : leurs adhérents sont des CLIENTS et non des SOCIETAIRES.
Et je ne parle pas de sociétés qui se nomment Mutuelle d’ici ou d’ailleurs et qui usurpent purement et simplement ce titre.
J’y étais ! J’ai participé à la naissance d’une mutuelle comme membre fondateur ! 40 000 passionné(e)s, de 1981 à 1983, se sont mobilisés pour créer un fonds de garantie indispensable à la création d’une société d’assurance. Nous avons réussi à mettre « de côté » 10 000 000 de Francs ! Et pourtant ce n’était pas gagné, vu le public…des motards ! (à lire Chronique d’une Mutuelle en marche, Manuel Marsetti, les éditions de la Fédération Française des Motards en Colère)
Aujourd’hui, la Mutuelle des Motards, c’est 220 165 sociétaires, 299 340 contrats (08/2012), un C.A. de 85 200 K€ (2011), 427 salariés et 98 délégués bénévoles.
Alors oui, l’union fait la force, et 1 + 1 = 3 avec l’esprit mutualiste.
C’est peut-être aussi pour cela que 30 ans plus tard, je suis Entrepreneur salarié à Coop’Alpha, comme vidéo-photographe. Il y a des utopies qui se réalisent en partageant ces valeurs pleines d’avenir avec et pour nos jeunes.