Chaque jour dans la presse quotidienne les cérémonies des vœux organisées par les élus locaux se succèdent. Certaines ont un caractère un peu particulier puisqu’elles sont l’occasion pour les Maires d’annoncer leur démission de cette fonction. Les annonces se succèdent à quatorze mois de la fin d’un mandat qui pour la plupart des élus locaux a été exigeant, ingrat et délicat. A Abzac et Créon (33), à Narosse (64) c’est déjà le cas mais il est certain que d’autres suivront. En effet même si l’arrivée approche de plus en plus de premiers magistrats sont à la peine pour poursuivre le parcours. Il suffit de lire les commentaires laissés anonymement par quelques lecteurs zélés sous les articles expliquant ces départs pour comprendre le mal profond qui frappe la démocratie locale. Des critiques sommaires ou des affirmations péremptoires qui traduisent un mépris débile pour les fonctions électives.
Toutes les réformes en cours ou menées sur le statut des responsables de collectivités ne résoudront pas la destruction du respect qu’ont les « consommateurs électeurs » pour l’action publique. Il n’y a plus aucun projet qui ne soit pas contesté, pas une action concrète qui ne devienne par une objet de polémique, pas une explication objective qui ne soit pas décriée. Moralement et même physiquement ces comportements ou ces situations renforcent la désillusion. La peur et même l’angoisse face à la prise de décision est alors une réalité. Quelle qu’elle soit elle ne résiste pas à l’épreuve de la rumeur ou de la vindicte collective. La pression est énorme.
En France la fonction de Maire s’est transformée en palliatif des carences de l’État. Depuis pas mal de temps ce dernier se vante d’économiser, de réduire les impôts, de faire de la solidarité sans contribution juste, de faciliter l’accès aux services publics en les diminuant ou en les étranglant. En fait inexorablement on a renvoyé la réponse à tous les problèmes concrets du quotidien vers les communes ou les départements. Ce n’a jamais été de la décentralisation mais d’une veste partie de « patate chaude » mettant le dernier en bout de ligne dans l’obligation d’agir. Le pouvoir centralisé ne cesse de se délester. Exactement comme le « pilote » d’une montgolfière le fait avec les sacs de sable pour prendre de la hauteur, l’État s’allège pour donner l’illusion d’un efficacité qu’il n’a plus du touts.
Les exemples foisonnent : établissement des dossiers de cartes nationales d’identité et des passeports, mise en place de police municipale aux missions élargies et des caméras de vidéo surveillance, transferts des routes, gestion de la solidarité de proximité ou institutionnelle, construction de logements à Loyers modérés avec obligation de pourcentages sous peine de sanction, application de lois, de textes, de normes nécessitant des moyens qu’ils n’ont pas : la liste est beaucoup plus longue ! Mieux les sacs expédiés vers la base ne sont que remplis de sable… On a même entendu que les collectivités territoriales et à travers elles les Maire ou les Présidents étaient responsables de… la dette d’un État totalement incapable de gérer convenablement son budget. Je me suis senti et je me sens encore (j’en cauchemarde) un suspect potentiel ! Je crois que c’est incurable.
Pire on a asséché leur liberté de gestion (article 64 de la constitution) en les rendant dépendante de dotations ou de compensations sans aucune perspectives fiables. Plus aucune perspective n’existe. En 2025, il n’y a à l’heure actuelle aucune information certaine sur les éléments indispensables pour préparer leur budget. Il y a un peu plus d’une décennie un Conseil départemental votait 47 % de ses ressources alors qu’actuellement il peine à dépasser les 5 % ! Une commune modulait la taxe d’habitation, les taxes foncières et feue la taxe professionnelle pour atteindre 60 % de ces mêmes recettes budgétaires. Il ne lui reste que la taxation des propriétaires et des résidences secondaires pour moduler ses capacités de financement. Le garrot se serre chaque année un peu plus. Les Maires sont devenus de gestionnaires délégués de fonds attribués par la loi des finances sauf ceux qui ont une taille suffisante pour continuer à vivre sans soucis.
Il devient de plus en plus ardu d’inventer, d’innover, de proposer ou de créer. Les moyens disponibles ne permettent même plus de maintenir en état ce qui existe. Lors d’un entretien sur Europe N° 1 avec Thomas Sotto le 26 novembre 2013 je déclarais : « Je raccroche car un sentiment d’impuissance pèse sur la fonction de maire. Nous sommes le dernier rempart de la proximité. Je connais d’autres mandats où la pression est totalement différente. Député, c’est lever la main, se montrer le mercredi à la télévision. Conseiller général, c’est gérer un département avec une distance très longue des administrés, Sénateur c’est veiller à ne pas mécontenter les élus. Le maire est en première ligne, 24h/24, sans forcément les moyens pour répondre aux demandes des administrés. Avant, le maire construisait, bâtissait. Aujourd’hui, il répare. On est tout le temps dans la solution immédiate à un problème individuel, des guérisseurs sociaux. Quand l’administré a tout tenté, il va voir le maire : logement, place en maison de retraite… On essaie tout le temps de réparer une société cabossée de tous les côtés. » C’est encore pire maintenant !
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Bonjour,
des dizaines d’études sur le malaise des maires calent les armoires des ministères et des associations d’élus. Toutes ces études pointent le dévouement des équipes municipales ancrées dans le quotidien des français et surtout de la France « périphérique » de Christophe Guilluy. Dans son ouvrage de 2014 il fait l’analyse des deux France qui s’ignorent et se font face : la France des métropoles, brillante vitrine de la mondialisation heureuse, où cohabitent cadres et immigrés, et la France périphérique des petites et moyennes villes, des zones rurales éloignées des bassins d’emplois les plus dynamiques. De cette dernière, qui concentre 60 % de la population française, personne ne parle jamais. Laissée pour compte, volontiers méprisée, cette France-là est désormais associée à la précarité sociale et au vote Front national.
L’arrivée en 2017 du méprisant n’a en rien résolu l’équation, tout au contraire !!!
Une nouvelle enquête du Cevipof et de l’AMF, parue en novembre dernier, interroge la relation des maires avec l’État ces dernières années. Sous pression budgétaire de l’exécutif, ils y expriment notamment un manque de reconnaissance accru de la part du pouvoir central depuis 2020 et des difficultés liées au « mille-feuille » administratif. Tout un volet de l’enquête du Cevipof et de l’AMF est consacré au désagrègement de la confiance entre les services de l’État et les maires. Depuis 2020 et la pandémie de Covid-19, ces derniers ressentent un manque de considération accru de la part du pouvoir central et de ses structures, d’après les nouveaux chiffres fournis par cette étude. Aujourd’hui, seuls 27 % des maires interrogés disent obtenir « la reconnaissance de l’État » et de ses services, contre 39 % en 2020. Soit une diminution de 12 points en l’espace d’à peine quatre ans. Une tendance qui ne concerne pas uniquement les primo élus : les maires plus expérimentés, plus habitués à devoir dialoguer avec l’État, dressent le même constat d’un manque de reconnaissance étatique. Comme au niveau global, ils ne sont que 27 % à estimer en bénéficier c’est sans doute le dernier carré des Mac-ronds-patibles.
Selon Martial Foucault, il s’agit là des conséquences d’une stratégie politique au plus haut niveau de l’État. « La présidence d’Emmanuel Macron a été marquée par une volonté d’établir une relation plus directe entre l’exécutif et le peuple, quitte à contourner les corps intermédiaires, dont les collectivités locales », précise ainsi le chercheur dans l’analyse détaillée de cette étude. La décision du méprisant de la suppression de la taxe d’habitation sur les résidences principales a renforcé le contrôle financier exercé par l’État sur les municipalités, dont les ressources dépendent désormais principalement de la dotation globale de fonctionnement (DGF) ou de la fiscalité transférée (en produits de TVA) , détaille Martial Foucault. Autrement dit : la possibilité pour les maires d’obtenir des ressources directement prélevées au niveau local n’est plus aussi aisée qu’auparavant.
« Certes, les compétences exercées n’ont pas été retirées par l’État mais les moyens financiers de les exercer relèvent de moins en moins des acteurs locaux. La France a inventé un modèle de centralisation dans la décentralisation », poursuit l’universitaire. Comme un mirage, la part d’autonomie financière accordée aux collectivités, dont « les compétences étendues » en la matière sont inscrites dans la Constitution, semble se dissiper année après année. « Il faut arrêter de punir ceux qui dégagent de la capacité d’autofinancement, déplorait d’ailleurs de manière plus générale David Lisnard, en novembre dernier sur Public Sénat. […] À chaque fois, l’Etat vient piocher pour alimenter son déficit. »
Une autre étude menée par des chercheurs au Centre de sociologie des organisations au printemps dernier en partenariat avec l’Association des maires de France livre des conclusions alarmantes sur l’impact de la fonction sur la santé des élus de proximité. Les risques psycho-sociaux sont mis en évidence dans l’étude, risques découlant de la charge de travail et des horaires atypiques privant les élus et leurs proches de temps de ressourcement familial. Les maires estiment, de manière massive (83 %), que leur mandat est usant pour la santé. Cette usure se traduit par la déclaration de troubles du sommeil, de coups de fatigue ou de moments de lassitude, auxquels très peu de maires échappent, et qui sont des états permanents pour un quart à un tiers des maires. Les maires sont en première ligne, Cela traduit la forte personnalisation de la fonction, surtout dans les petites communes dont les maires sont plus nombreux à déclarer des moments de lassitude.
Plus la pression est importante et plus la solution de la démission est choisie.Plus la taille de la commune diminue, plus la démission est envisagée. C’est le cas aussi pour les maires qui ont des charges familiales ou qui ont un emploi parallèle à leur mandat.
Le maire est le paratonnerre idéal pour les « zélites », qu’importe les difficultés dans la France périphériques eux vivent confortablement et c’est ça qui compte.
« Pourvu que cela doure ! » disait en 1812 Laetitia Bonaparte, née Ramolino et maman de son Nabulio (surnom de Napoléon).
Bon repos de fin de semaine
Bonjour,
des dizaines d’études sur le malaise des maires calent les armoires des ministères et des associations d’élus. Toutes ces études pointent le dévouement des équipes municipales ancrées dans le quotidien des français et surtout de la France « périphérique » de Christophe Guilluy. Dans son ouvrage de 2014 il fait l’analyse des deux France qui s’ignorent et se font face : la France des métropoles, brillante vitrine de la mondialisation heureuse, où cohabitent cadres et immigrés, et la France périphérique des petites et moyennes villes, des zones rurales éloignées des bassins d’emplois les plus dynamiques. De cette dernière, qui concentre 60 % de la population française, personne ne parle jamais. Laissée pour compte, volontiers méprisée, cette France-là est désormais associée à la précarité sociale et au vote Front national.
L’arrivée en 2017 du méprisant n’a en rien résolu l’équation, tout au contraire !!!
Une nouvelle enquête du Cevipof et de l’AMF, parue en novembre dernier, interroge la relation des maires avec l’État ces dernières années. Sous pression budgétaire de l’exécutif, ils y expriment notamment un manque de reconnaissance accru de la part du pouvoir central depuis 2020 et des difficultés liées au « mille-feuille » administratif. Tout un volet de l’enquête du Cevipof et de l’AMF est consacré au désagrègement de la confiance entre les services de l’État et les maires. Depuis 2020 et la pandémie de Covid-19, ces derniers ressentent un manque de considération accru de la part du pouvoir central et de ses structures, d’après les nouveaux chiffres fournis par cette étude. Aujourd’hui, seuls 27 % des maires interrogés disent obtenir « la reconnaissance de l’État » et de ses services, contre 39 % en 2020. Soit une diminution de 12 points en l’espace d’à peine quatre ans. Une tendance qui ne concerne pas uniquement les primo élus : les maires plus expérimentés, plus habitués à devoir dialoguer avec l’État, dressent le même constat d’un manque de reconnaissance étatique. Comme au niveau global, ils ne sont que 27 % à estimer en bénéficier c’est sans doute le dernier carré des Mac-ronds-patibles.
Selon Martial Foucault, il s’agit là des conséquences d’une stratégie politique au plus haut niveau de l’État. « La présidence d’Emmanuel Macron a été marquée par une volonté d’établir une relation plus directe entre l’exécutif et le peuple, quitte à contourner les corps intermédiaires, dont les collectivités locales », précise ainsi le chercheur dans l’analyse détaillée de cette étude. La décision du méprisant de la suppression de la taxe d’habitation sur les résidences principales a renforcé le contrôle financier exercé par l’État sur les municipalités, dont les ressources dépendent désormais principalement de la dotation globale de fonctionnement (DGF) ou de la fiscalité transférée (en produits de TVA) , détaille Martial Foucault. Autrement dit : la possibilité pour les maires d’obtenir des ressources directement prélevées au niveau local n’est plus aussi aisée qu’auparavant.
« Certes, les compétences exercées n’ont pas été retirées par l’État mais les moyens financiers de les exercer relèvent de moins en moins des acteurs locaux. La France a inventé un modèle de centralisation dans la décentralisation », poursuit l’universitaire. Comme un mirage, la part d’autonomie financière accordée aux collectivités, dont « les compétences étendues » en la matière sont inscrites dans la Constitution, semble se dissiper année après année. « Il faut arrêter de punir ceux qui dégagent de la capacité d’autofinancement, déplorait d’ailleurs de manière plus générale David Lisnard, en novembre dernier sur Public Sénat. […] À chaque fois, l’Etat vient piocher pour alimenter son déficit. »
Une autre étude menée par des chercheurs au Centre de sociologie des organisations au printemps dernier en partenariat avec l’Association des maires de France livre des conclusions alarmantes sur l’impact de la fonction sur la santé des élus de proximité. Les risques psycho-sociaux sont mis en évidence dans l’étude, risques découlant de la charge de travail et des horaires atypiques privant les élus et leurs proches de temps de ressourcement familial. Les maires estiment, de manière massive (83 %), que leur mandat est usant pour la santé. Cette usure se traduit par la déclaration de troubles du sommeil, de coups de fatigue ou de moments de lassitude, auxquels très peu de maires échappent, et qui sont des états permanents pour un quart à un tiers des maires. Les maires sont en première ligne, Cela traduit la forte personnalisation de la fonction, surtout dans les petites communes dont les maires sont plus nombreux à déclarer des moments de lassitude.
Plus la pression est importante et plus la solution de la démission est choisie.Plus la taille de la commune diminue, plus la démission est envisagée. C’est le cas aussi pour les maires qui ont des charges familiales ou qui ont un emploi parallèle à leur mandat.
Le maire est le paratonnerre idéal pour les « zélites », qu’importe les difficultés dans la France périphériques eux vivent confortablement et c’est ça qui compte.
« Pourvu que cela doure ! » disait en 1812 Laetitia Bonaparte, née Ramolino et maman de son Nabulio (surnom de Napoléon).
Bon repos de fin de semaine