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« Le courage de la nuance » a fondu lentement

Il faut que soit organisée une réunion institutionnelle pour que des étudiants censés préparer le devenir de la démocratie française puissent dialoguer entre eux autrement que par des slogans et des invectives avec ou sans mégaphone. L’administrateur intérimaire de l’institution de Sciences Po’ Paris a été contraint de mettre ne place un échange spécifique pour que les points de vue sur les tragiques événements objets des contestations puissent s’exprimer. C’est révélateur du système éducatif en France dans lequel il n’y pas de place à l’autonomie et à la responsabilité. Le fait que ce soit dans l’enceinte de l’établissement chargé de former l’élite républicaine dans tous les secteurs a valeur de mauvais symbole.

Après qu’un peu plus de 2 % des élèves masqués aient entrepris des actions se voulant spectaculaires en faveur de la situation terrible de Gaza, la direction a souhaité permettre une expression publique. «Ça a été un débat dur, avec des prises de position assez claires, beaucoup d’émotion et donc j’aspire maintenant à ce que chacun retrouve le calme» avant les examens prévus lundi, a indiqué le patron de Sciences Po, à l’issue de l’événement, qui a rassemblé environ 300 personnes, et au cours duquel une douzaine de personnes ont pris la parole. Il a admis rester «extrêmement prudent sur la suite des événements», alors que la mobilisation se diffuse en France, en écho à la mobilisation croissante des campus aux États-Unis, marquée par le déploiement de la police sur plusieurs sites.

Il est prévisible en effet que ce type d’initiative qui ne mobilise pas davantage de monde que celui qui a été constaté ne stoppe pas une contestation qui paraît insufflée de l’extérieur. Des incidents ont émaillé la fin de la réunion à cause de propos antisémites qui ont choqué le public pourtant très revendicatif. Une preuve que l’on a toujours à gagner en provoquant le rencontre et l’échange même s’il est difficile de désormais laisser l’outrance hors du champ des arguments. J’ai bien aimé les propos de Jérôme Guedj interrogé dans l’émission Quotidien : ‘j’espère que tout le monde aura le courage de la nuance ! ». Il n’a pas été entendu. C’est normal.

L’absence de caméras dans cette initiative d’expression collective a probablement facilité son déroulement à peu près correct selon les témoignages. Ce n’est pas un habitude puisque tout ce qui est contestation, manifestation ou revendication n’a de l’importance que si les médias les relaient. Tout est préparé et organisé pour plaire à ce que l’on appelle à tort des chaînes d’information. Là elles n’ont pu commenter que des déclarations lapidaires ayant fait suite à l’événement et pas extraire les petites phrases qui attisent les affrontements. Surtout en période électorale où certains se débattent avec l’énergie du désespoir pour remonter dans les sondages.

Le vrai problème c’est que l’anonymat devient une règle de la vie démocratique. Comme sur les réseaux sociaux où l’on se planque derrière un pseudo pour déverser de la haine, de l’exagération ou des infos pourries, les manifestants se dissimulent derrière des masques. Dans une société démocratique cette attitude a de quoi inquiéter. Elle traduit soit une peur de ne pas assumer ses prises de position, soit elle permet de se contenter de suivre sans pour autant partager.

Jamais dans le passé (en dehors de ceux qui commettent des actes répréhensibles) on a constaté que pour exprimer des prises de position il faille dissimuler son visage. Paradoxalement le porte-parole des pro-palestiniens étudiant en master des droits humains et projets humanitaires à l’école des affaires internationales a demandé « « la tenue d’un vote officiel non anonyme (sic) au conseil de l’institut pour l’investigation des partenariats avec les universités israéliennes ». Dans quel but ? Une chasse aux sorcières ?

L’essaimage de cette contestation dans les universités en… mai rappelle des souvenirs à ceux qui avaient moins de vingt ans en 1968 d’autant qu’ils étaient souvent mineurs (la majorité était à 21 ans). En élargissant leur contestation au milieu ouvrier les étudiants étaient parvenus à ouvrir les portes de l’action collective. Ils en sont loin, très loin. La France profonde est tellement angoissée et recroquevillée sur ses propres difficultés qu’elle devient imperméable au malheur des autres. Les défilés du 1er mai en ont été la preuve. 

La haine me fait peur. Elle ruisselle pour tout et partout dans tous les cerveaux. L’écoute de l’autre, le dialogue, la tolérance se trouvent dans le tonneau des Danaïdes où l’on verse les valeurs républicaines. Alors ce qui se passe dans les Universités traduit le malaise d’un monde dans lequel l’humain n’a plus aucune place si ce n’est celui de l’exploité idéologiquement et moralement. 

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Cet article a 3 commentaires

  1. J.J.

    Le plus lamentable dans cette affaire est la confusion VOLONTAIRE(et préparée de longue date) par certains des notions d’antisionisme et d’anti sémitisme. Et ça marche !
    Des personnes sont antisionistes déclarées et sont très loin d’être antisémites. Et cette attitude est même partagée par les membres de certaines organisations juives, exemple l’ UJPF ( Union Juive Française pour la Paix) pour la France, mais aussi au plan international.
    Apologie du terrorisme ? Il suffit de rester silencieux sur le sujet pour en être accusé. Où est la liberté d’expression dans tout ça ?
    Il fut une époque, pourtant où nos « terroristes français » étaient considérés comme des héros, mais je vous parle d’un temps ….

  2. baillet gilles

    La nuance de Gérôme Gedj n’est pas une nuance. C’est une acceptation de l’Etat colonial d’Israël. Point. Quand on conteste le sionisme on est antisémite… Les discours racistes sont vomis par BFMerde, Cnase, Sud blaireaux etc. Les élèves de science po ne refusent pas le débat ou les débats au contraire… Ils en organisent depuis des mois. Des élèves de toutes confessions s’y expriment. Mais ils ne veulent pas être filmés pour ne pas subir de harcèlement sur les réseaux sociaux. Quant à la  » France profonde « , elle peut très bien se réveiller en écoutant autre chose que la bêtise débitée à longueur de journée. Pour cela il faut une prise de conscience qui peut venir par les prises de position courageuses d’étudiants.

  3. J.J.

    Une autre déclaration « nuancé », de David Ben Gourion, premier ministre de l’entité sioniste, de 1948 à 1954, puis de 1955 à 1963.
    _ Pourquoi les Palestiniens feraient-ils la paix ? Si j’étais, moi, un leader palestinien, jamais je ne signerai avec Israël. C’est normal, nous avons pris leur pays. Certes, Dieu nous l’a promis, mais en quoi cela peut-il les intéresser ? Notre Dieu n’est pas le leur. Nous sommes originaires d’Israël, c’est vrai, mais il y a de cela deux mille ans : en quoi cela les concerne-t-il ? Il y a eu l’antisémitisme, les nazis, Hitler, Auschwitz, mais est-ce leur faute ? Ils ne voient qu’une chose : nous sommes venus et nous avons volé leur pays.

    Pourquoi l’accepteraient-ils..? » _

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