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Bilan 2023 : une rupture aux lourdes conséquences

L’année 2023 aura été marquée, selon mes observations qui ne sont pas sans failles, par l’aggravation de la fracture entre le spectre de la société française allant du rural profond au rurbain de proximité et celui des grandes agglomérations urbaines. Cette situation qui n’est certes pas nouvelle prend des allures de plus en plus dangereuses. Dans bien des patelins a été entamé la lutte pour la survie quand dans les villes la bataille repose sur la préservation d’une vie jugée de plus en plus corrompue par l’urbanisme passé. Cette confrontation d’intérêts divergents se traduit par des positions électorales qui ne cessent de s’éloigner.

Le secteur urbain cherche à corriger les erreurs antérieures ayant privilégié l’individualisme sous toutes ses formes par des mesures restrictives dirigées contre celles et ceux qui souhaitent justement profiter de ses atouts collectifs. Dépensant des sommes folles pour réguler les déplacements inter-urbains les collectivités responsables creusent en définitivement la séparation avec le reste des territoires. Métro, tram, bus à haut niveau de service, circulation modulée, voire interdite : la mobilité devient la préoccupation de tous les jours. Tous les aménagements ne dépassant que rarement les limites des espaces contrôlés par ceux qui les financent ils ne résolvent pas l’isolement des habitants ruraux.

Le système de financement des collectivités (ex-taxe professionnelle puis celles qui l’ont remplacée) a d’autre part incité (et continue de le faire) ont attiré toutes les activités économiques sur le périurbain. Les activités polluantes ou dangereuses ont été lentement éliminées ou diminuées pour être remplacées par des structures orientées vers les technologies de pointe. Ce constat a maintenu la « richesse » des intercommunalités gérant les agglomérations et la répartition des compétences des lois NOTRe a accentué ce décalage avec les zones où ceux qui la crée chaque jour vivent sans produire

Jamais les écarts ont été aussi marqués. En 2023 à la suite des deux années de crise COVID le tissu économique de proximité s’est déchiré. Les petites villes ou moyennes souffrent, car elles ne cessent de perdre de leur dynamisme. Le malaise s’étend et au cours du dernier mois les chiffres liés aux manifestations sociales ont considérablement augmenté dans des cités où elles n’avaient jamais connu de telles affluences. On ne veut plus subir la loi des élites « parisiennes » et la révolte touche toutes les catégories confrontées à des réalités différentes de celle des « capitales ».

Quand Paris servait de baromètre au mécontentement, il faut bien constater que désormais le ruissellement du mécontentement atteint de plus en plus les villes moyennes, voire les petites villes. Si ce phénomène se confirme, elle prélude à des mouvements profonds dans les prochains mois. D’ailleurs les émeutes de l’été dernier n’ont plus touché que les grands ensembles « historiques » mais elles sont « descendus » sur des secteurs jusque-là totalement absents de ce type d’événements. Les effets sur la « société » rurale ou rurbaine » ont été considérables. Les destructions d’équipements collectifs souvent financés avec des sommes considérables de l’État a mis en évidence la vanité de certaines politiques.

Le sentiment d’inégalité de traitement entre ceux qui ont tout et ceux qui perdent chaque jour un peu plus du peu qu’ils ont,  a renforcé une vision manichéenne de l’aménagement territorial. Le monde agricole vacille, car attaqué de toutes parts. L’isolement gagne chaque jour du terrain, car les crises sanitaires ont décimé le bénévolat indispensable au lien social. Certaines et certains citoyens innovent et mènent des combats (cercles, associations nouvelles…) mais la nouvelle donne sur les contraintes financières pesant sur les ménages altèrent ces efforts.

Le secteur rural ou rurbain va massivement basculer dans le mode le plus facile de contestation : le vote protestataire porté par le RN ! Scrutin après scrutin les « campagnes » échappent à la logique des partis traditionnels. En 2023 la méfiance à l’égard du pouvoir étatique sous toutes ses formes a considérablement progressé. Pour de raisons différentes les classes sociales sont imprégnées de la sensation d’être ignorées par la « ville », d’être sous la menace d’ennemis divers, de se retrouver dans les paroles de la Marseillaise (…entendez-vous dans nos campagnes mugir ses féroces soldats…) avec des peurs amplifiées par le seul vecteur de « lien » avec le reste le société, la télé.

Toutes les oppositions au pouvoir en place se trouvent concentrées dans les grandes villes. La ruralité fout le camp. La zone moyenne se rétrécit. 2023 aura été une année charnière avec une conjonction de mouvements qui ne se sont pas rejoints. Jusqu’à quand ?

Cet article a 4 commentaires

  1. Pc

    Une seule question : à qui la faute?:

    1. François

      Bonjour @ Pc !
      Non seulement c’est la seule mais c’est la VRAIE question !
      Il n’est point besoin de remonter à la Préhistoire pour découvrir les vraies raisons: il suffit de décortiquer honnêtement … sans arrières pensées, les quarante dernières années de désinvolture générale, de laisser-aller bon enfant, de gourvenance par la peur ou à l’urgence, de Justice à tarif réduit voire en solde « pour assurer le fonds de commerce » (dixit un magistrat !) … et l’on voit les conséquences sur son pas-de-porte voire dans le logement …sur soi-même ! ! Merci les politicards ! !
      Bonne fin d’année !
      Amicalement.

      1. Pc

        Cher François ma réponse à la question est: NOUS TOUS!

  2. J.J.

    Ces inégalités sont d’autant plus criantes et mises en relief avec les images « d’actualité » où l’on nous expose sans honte des embouteillages monstres de vacanciers aux confortables revenus et « en même temps » les plus démunis, qui couchent dehors ou qui ont recours à des associations de solidarité au bord de la rupture d’approvisionnement et de personnel bénévole.

    Je n’ai pas voulu hier briser l’atmosphère de recueillement inspiré par ton émouvant texte, mais j’ai une petite remarque de « pinailleur » à faire : le pauvre soldat jean Corde, son casque ne pouvait pas vaciller, attendu qu’il n’en avait pas : les premières « cervelières », calottes de fer très peu efficaces portées sous le képi rouge (une excellente cible pour les mitrailleuses, comme les pantalons garance) pour protéger des éclats d’obus ne commencèrent à être distribuées qu’ au début 1915.
    Quant au casque Adrian, particulièrement efficace (d’après une étude d’ingénieurs d’armement US, il serait plus efficace que tous les casques « contemporains » pour amortir, grâce à son cimier, le effets d’une explosion.), il commença à équiper les unités au combat seulement fin 1915.
    À propos des pantalons garance : au cours d’une des dernières revues à Longchamps, (peut être 1914) une unité d’infanterie avait défilé avec le nouvel uniforme en projet , de couleur vaguement kaki. Les bons parisiens venus « voir et complimenter l’armée françai ai ze « , huèrent ce qu’il considéraient comme une mascarade indigne.

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