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Les multinationales prennent l’eau de vie

En France le marché intérieur de l’eau minérale est à une niveau élevé. Les consommateurs semblent ne plus faire confiance à celle qui arrive par leur robinet. C’est même l’un des secteurs les plus rentables de l’économie hexagonale. La tendance s’avère être la même dans le monde. La situation se gâte et les exploiteurs privés des sources commencent à s’inquiéter car leur ressource est victime comme celle des réseaux publics de la raréfaction en cours. Des marques célèbres se retrouvent en difficulté.

Les marques leaders du marché de l’eau en bouteille (eau minérale, eau de source et eau traitée ou gazéifiée confondues) sont concentrées entre trois grands groupes : Neptune (Saint-Yorre, Vichy, Célestins, Thonon, Courmayeur, Cristalline, Vernière, Rozana) ; Nestlé Waters (Vittel, Contrex, Nestlé Purelife, Perrier, San Pellegrino, Acqua Panna, Hépar, Quézac, Valvert, Charmoise) ; Danone (Aqua, Evian, Bonafont, Mizone, Villa del Sur, Font Vella, Volvic, Badoit). Ces sociétés distribuent leurs produits essentiellement par le biais des grandes surfaces alimentaires en bouteilles de 0,5 l.,1 l. ou 1,5 l, en bonbonnes, en bouteille plastique ou verre (rares), en cannettes et parfois en tasses (dans les cafétérias par exemple). En fait une ressource naturelle considérée par la loi comme ayant des vertus si ce n’est médicinale mais au moins d’amélioration des la santé devient une matière première spéculative.

En effet si l’on compare les prix de vente de ces « élixirs de pureté » la notion de profit est évidente. Le prix moyen du litre des différentes eaux de boisson ou dite de source est extrêmement variable. La grande gagnante, reste l’eau du robinet, à 0,003 € le litre en moyenne, soit moins de 2 € par an pour une consommation du volume recommandé de 1,5 litre d’eau du robinet par jour ! Quand on utilise une carafe filtrante, le prix du litre est en moyenne multiplié par 20 soit 40 € par an pour cette même quantité. Le prix explose dès lors qu’on passe aux eaux en bouteilles : 0,20 € le litre pour l’eau de source et 0,40 € le litre pour l’eau minérale, soit de 110 à 220 € par an ! Une somme qui ne cesse d’augmenter en raison des coûts du transport et des récipients.

Tout est en passe de se modifier. Les récentes restrictions sur l’utilisation de l’eau et surtout le manque d’alimentation qui frappe certains bassins de vie rendent les puisages massifs dans les nappes phréatiques « minéralisées » très discutés. A Vittel par exemple le groupe Nestlé à la suite de la perte du marché allemand vient de réduire ses effectifs salariés. Autre difficulté à laquelle doit faire face l’exploitant et qu’il avoue : « les conditions climatiques », qui affectent les conditions d’exploitation des eaux de certains forages. Début mai, Nestlé a annoncé, pour des raisons liées justement aux aléas climatiques, la suspension sine die de deux des six forages prélevant l’eau commercialisée sous la marque Hépar, connue pour sa teneur élevée en magnésium. C’était une pépite économique car c’est l’une des marques les plus rentables sur le marché.

Ça chauffe aussi du coté de Volvic. Depuis des années des associations mettent en cause les volumes prélevés. Désormais le processus s’accélère et les recours devant la justice deviennent de plus en plus pressants. La sécheresse hivernale a obligé de nombreuses communes du Puy de Dôme à rationner leur consommation en eau potable. Afin d’éviter les risques de pénuries, les entreprises locales ont même été tenues de réduire leurs prélèvements sur le réseau d’eau de 25 %. Une situation alarmante touchant tout le monde… sauf Danone le producteur de Volvic. Il prétend que ses pompages se situent en amont des nappes alimentant celles dévolues aux réseaux publics. Il est à peu près certain que ces contestations ne sont pas prêtes de s’éteindre.

En France ce sont les habitants du Nord qui consomment le plus d’eau en bouteille. Ils privilégient cette consommation surtout en raison de la pollution des eaux souterraines et des eaux de surface causée par les pesticides et les nitrates notamment en Picardie, dans le Nord-Pas-de-Calais ou en Bretagne. Le vrai problème se trouve là. L’étau se resserre avec la diminution de la ressource naturelle et la pollution des eaux les plus faciles d’accès. La population de la région parisienne, de l’Est et du Sud-Est de la France privilégie l’eau minérale naturelle à l’eau de source. Les habitants du Sud-Ouest quant à eux sont moins consommateurs d’eau embouteillée. Probablement parce que l’on n’y met guère d’eau dans le vin.

L’attitude des exploiteurs de la « flotte » soulève néanmoins la responsabilité des multinationales face à l’épuisement des ressources naturelles, particulièrement dans un contexte de changement climatique. Mais ce n’est malheureusement pas spécifique au secteur de l’eau en bouteilles.

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Cet article a 3 commentaires

  1. christian grené

    Qu’est-ce qui nous reste à faire après ce constat? Boire du rosé, ça coule de source.

  2. J.J.

    J’avais fait l’expérience « en aveugle » de remplir pendant plusieurs jours une bouteille de l’eau de source que nous consommions habituellement, par de l’eau du robinet.
    Comme nous n’avons noté aucune différence notable, nous avons abandonné l’eau du commerce pour celle du robinet. Nous avons la chance d’avoir un eau relativement pure, distribuée par une entreprise publique sérieuse, dont les responsables (que j’ai eu l’occasion de rencontre à l’AG de notre association de consommateurs)sont parfaitement conscients de la gravité de la situation.
    Il nous arrive parfois, les jours de grande liesse de consommer un peu d’eau pétillante, mais c’est un luxe rare dont, en bons épicuriens, nous n’abusons pas.

  3. Gilbert SOULET

    Sacré Jean-Marie !
    Je me ressource grâce au vin rouge que j’aime bien taster et au Gewurztraminer sur un foie gras du Gers ou d’Alsace !
    Ensuite, en tant qu’ancien de la SNCF, je me souviens des affiches dans nos autorails et Victor Hugo signalant que le vin est la plus saine et la plus hygiénique des boissons.
    Quant à l’eau de vie, je n’oublie pas celle que fabriquait ma grand-mère Augustine et que je me régalais de goûter.
    Amicalement à tous
    Gilbert SOULET, comme la saoule.

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