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Dans la marine on l’appelle la « scélérate »

Peut-on vraiment espérer maîtriser la pandémie ? La question devrait être posée avec une certaine insistance aux personnes ayant en charge la sécurité générale de notre pays. L’impression actuelle c’est que l’on tente de manoeuvrer le paquebot France à la godille entre les écueils qui ne cessent de se rapprocher. Le danger s’accroît selon toutes les affirmations des prévisionnistes de la météorologie médicale, mais dans la cabine de pilotage on encore et toujours on discute sur le cap à tenir.

Tous les avertisseurs hurlent. Les gyrophares s’enclenchent. Les radars signalent des obstacles qui approchent. La panique règne à tous les étages.  Les vigies sont ballotées dans tous le sens. Le capitaine hésite entre enfermer les passagers dont il a la charge dans leurs cabines ou interdire, à certain.e.s d’entre eux.elles de se promener à leur guise dans les coursives. L’objectif est clair : empêcher la saturation des chaloupes de sauvetage !

Les chargé.e.s de proposer une route sûre aux navigateurs à la corne de brume sont formels sur les risques encourus. “Actuellement, nous avons perdu la maîtrise de l’épidémie”, explique tout de go la cheffe du service infectiologie de l’hôpital parisien de Saint-Antoine, au regard du taux de tests positifs qu’elle juge “vraiment énorme”.  Et en plus le nombre de cas déclarés positifs serait largement sous-estimé.

« Nous ne serions pas du tout étonnés s’il y avait, en réalité, deux fois plus de cas, puisque tout le monde ne se fait pas dépister, en particulier les personnes asymptomatiques », précise cette spécialiste connue pour son franc-parler. « Elles représentent pourtant un réservoir important du virus, qui circule probablement beaucoup plus que ce que nous pouvons avoir comme reflet avec le dépistage actuel” (1)

Sur RTL avec des circonvolutions de langage digne d’un plénipotentiaire aguerri, le président du Conseil scientifique évoque “une situation très difficile, voire critique”. D’après lui, “il y a probablement plus de 50 000 cas par jour. On estime au niveau du conseil scientifique qu’on est plutôt autour de 100 000 cas par jour”. Soit deux fois plus. En fait tous les marins vous diront que ce n’est jamais la première vague qui fait chavirer le navire en péril mais la seconde qui s’avère plus virulente. Dans la marine on l’appelle d’ailleurs la « scélérate »

C’est une  vague océanique très haute, soudaine, considérée comme très rare, même si elle reste plus répandue qu’on ne le pense. En effet, les témoignages consignés sur les livres de bord ne concernent qu’une très faible partie d’entre elles, compte tenu de l’étendue des océans et de la rapidité avec laquelle elles se forment et disparaissent au sein des trains de vagues où elles se propagent.

Jusqu’au milieu du XX° siècle, l’existence des vagues « scélérates » était mise en doute, faute de mesures objectives, par des scientifiques spécialisés dans l’étude des mouvements des mers, malgré les nombreux témoignages rapportés par les marins au cours des siècles et la rencontre de ces phénomènes par de gros navires modernes.

Il faut aussi constater que, durant des siècles, ces événements ayant conduit à des naufrages il a été difficile de récupérer des indices probants. En fait les « scélérates » sont subies et pas gérées. Il faudrait, selon les grands navigateurs, les affronter de face sans sourciller et ne pas tergiverser face à leur puissance alors que l’on louvoie en se présentant de coté.

Dans les quarantièmes rugissants il n’est ainsi pas recommandé de serrer les fesses mais plutôt de tenir fermement la barre et de régler la voilure en fonction de la violence de la tempête. Le temps presse mais grâce aux prévisions, si on veut bien les entendre et mieux se les approprier, il est essentiel d’anticiper même si on doit jeter par-dessus bord ce en qui paraît le plus précieux : ses certitudes !

Un confinement aussi général que possible paraît inévitable pour que la Covid-19 n’envahisse pas tous les coins et les recoins du paquebot France. Il faut en effet fermer les écoutilles dans les délais les plus brefs en laissant des possibilités réelles d’activités individuelles responsables sur un laps de temps déterminé.

Inutile de viser uniquement les noctambules ou les couche-tard car ce ne sont pas eux qui provoquent les dégâts les plus graves. Diminuer la circulation collective et les virées d’équipages plus ou moins lucides n’interviendrait que quand la première préconisation aurait été suffisamment appliquée.

Chaque jour compte avant que la navire soit drossé à la côte. Le naufrage menace avec une marée « noire » liée aux décès inévitables puisque la bouée de sauvetage appelée « vaccin » risque bien de manquer durant toute la tempête. La croisière automnale puis hivernale va paraître interminable !

  1. sur https://www.medisite.fr/coronavirus-covid-19-nous-avons-perdu-la-maitrise-de-lepidemie-alerte-une-infectiologue.5586584.806703.html?xtor=EPR-55-%5BMedisite_Alerte_Infos%5D-20201026-%5BtestA%5D&tgu=goQPoN

Cet article a 8 commentaires

  1. Christian Goga

    Un texte de vérités préoccupantes en forme appaisante d’écriture.

  2. Maryse Pinol

    Si le capitaine n’avait pas supprimé des chaloupes à l’entretien certes difficiles, si le capitaine avait su s’entourer de « vrais marins » peut-être la « scélérate » n’aurait été qu’une vague habituelle .
    Il reste à souhaiter que la navire est assez de vivres et de carburant pour passer le cap et reprendre sa route le plus sereine possible.

    1. Maryse Pinol

      OUPS DESOLEE POUR LE MESSAGE – ET SES FAUTES- ENVOYE PAR ERREUR SANS RELECTURE.

  3. Dany Cazeaux

    Une croisière glaçante, mais un voyage génialement raconté …..Bravo Jean Marie.
    Hélas, nous sommes tous dans ce même bateau….

  4. J.J.

    On est mal barrés (matelot, tiens la barre). pourtant il y a des pays -très critiqués- qui semble-t-il on l’air de mieux s’en sortir ….provisoirement.
    Est ce que l’on a encore le moyens de » remonter au vent « et d’attaquer la vague « vent debout »?
    Nos marins d’eau douce, malgré leur bonne volonté n’ont semble-t-il pas les connaissances pour gérer cette situation (sans compter la détérioration programmée des services de santé, qui persiste contre vents et marées).
    L’hypothèse pandémie ou catastrophe sanitaire n’a pas été prévue dans les programmes, pourtant certaines Cassandre l’avaient évoquée, cette hypothèse.

    Bon choix pour cet excellent article, que ces métaphores marines, façon de rendre vivante une situation qui évoque effectivement une Méduse à la dérive.

  5. Laure Garralaga Lataste

    Les scélérates ne se rencontrent pas qu’en pleine mer ! Elles peuvent également se déchaîner sur nos côtes atlantiques… et gare aux conséquences ! Pour l’instant épargnées (sauf Pays Basque), nous allons, une fois encore, faire preuve de civisme et de solidarité… Nous pourrons dire : devoir accompli !

  6. LE GOREC

    Ma parole Jean Marie, tu as du avoir plusieurs vies dont celle de marin hauturier!
    En tant qu’ancien marin dans cette vie, je trouve tes analogies avec la haute mer , très pertinentes au regard de la situation de notre monde actuel.
    J’attends avec impatience ton prochain témoignage sur le monde souterrain!!!!!!

  7. Christian Grené

    Je retrouve bien là cette patte du journaliste que fut JMD après s’être frotté au dangereux métier qu’est devenu l’enseignement. Tout est dit dans ce qu’il écrit. Pas besoin qu’il y mette sa griffe, on reconnaît le politique doublé d’une qualité littéraire qui me rappelle, par certain côté. Hugo qui écrivait en son temps « Il y a parfois dans l’ordre social une pénombre complaisante aux industries scélérates »…

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